The Ocean Race Europe étape 1 : Biotherm s’impose, le pari de Team Malizia à Douvres paye

Course au large
Par Le Figaro Nautisme

Ce matin, Biotherm a fait son entrée à Portsmouth avec le maximum de points et une avance solide dès le départ, tandis que la prise de risque de Team Malizia près des côtes de Douvres leur a offert une deuxième place in extremis.

©Jean-Louis Carli / The Ocean Race Europe 2025
Ce matin, Biotherm a fait son entrée à Portsmouth avec le maximum de points et une avance solide dès le départ, tandis que la prise de risque de Team Malizia près des côtes de Douvres leur a offert une deuxième place in extremis.

La première étape de The Ocean Race Europe 2025 s’est terminée aujourd’hui dans des conditions ensoleillées mais capricieuses au large de l’île de Wight, avec une victoire assurée pour Biotherm et une deuxième place arrachée par Team Malizia après une manœuvre tactique audacieuse dans le détroit de Douvres.

La flotte s’apprêtait à rallier directement Portsmouth, mais mercredi soir, la direction de course a prolongé le parcours de 60 milles nautiques, ajoutant une boucle de deux tours au large de Bembridge Ledge. Les trois premiers ont donc dû enchaîner un nouveau jeu de bords au près et au portant avant de pouvoir franchir la ligne.

Pour Biotherm, cette extension n’a été qu’une formalité. L’équipe de Paul Meilhat a dominé la course depuis le départ de Kiel, évitant les ennuis et maintenant ses rivaux à distance. Même le petit coup de vent de la nuit dernière - avec 25 nœuds venant de toutes les directions, les obligeant à affaler et renvoyer les voiles - n’a pas entamé leur avance.

« On est passés de cinq nœuds à 25 nœuds d’un coup, avec le vent qui tournait dans tous les sens », a expliqué Meilhat. « Il fallait réagir vite pour éviter d’abîmer le bateau ou les voiles, mais on s’en est bien sortis. »

À l’arrivée à Bembridge aujourd’hui, Biotherm avait une telle avance qu’ils ont pu enchaîner les tours sans réelle menace. Avec le deuxième encore loin à l’horizon, l’équipage aurait pu se contenter d’assurer, mais ils ont continué à régler et affiner jusqu’au dernier instant. À 09h50 UTC, la victoire de l’étape 1 était confirmée : sept points pour la victoire, plus deux points du passage de la "Scoring Gate" à Kiel, soit un score parfait de neuf points.

Paul Meilhat, heureux à son arrivée à quai, a déclaré : "C’est une énorme satisfaction de gagner cette course et, en plus, on a gagné la "Scoring Gate" au départ de Kiel donc là, on attend de voir ce que va donner le combat entre Team Malizia et Paprec Arkéa pour savoir combien de points on a d’avance mais tout débute très bien. On est sur une bonne dynamique. J’avais senti à Kiel que l’équipage, l’équipe et le bateaux étaient prêts. C’est vrai que cette étape était plus favorable pour nous, sur la mer plate et avec beaucoup de près et c’est très bien d’avoir gagné celle-ci. On devrait avoir beaucoup de conditions comme ça sur The Ocean Race Europe."

Derrière, le vrai suspense se jouait entre Team Malizia et Paprec Arkéa, engagés dans un duel intense pour la deuxième place. Pendant la majeure partie de l’étape, Paprec Arkéa avait l’avantage, défendant sa position face aux assauts de Malizia. Néanmoins, hier en fin de journée, l’équipage de Boris Herrmann a tenté un coup de poker.

À l’approche de Douvres, ils ont quitté la route centrale pour longer la côte anglaise, espérant ainsi éviter le plein effet du courant contraire. Un choix risqué : près des côtes, le courant est plus faible, mais on peut aussi perdre le vent. Le pari a immédiatement porté ses fruits. En une heure, après avoir viré vers les falaises, Malizia a repris cinq milles. Au coucher du soleil, ils n’étaient plus qu’à un demi-mille. « Là, on est à un mille derrière Paprec, ils avancent à 1,9 nœud et nous à 8,2 », expliquait la co-skipper Cole Brauer à bord. « C’est à ce moment-là qu’on devient les chasseurs. »

Paprec Arkéa a répliqué par une défense parfaite, calquant ses manœuvres sur celles de Malizia toute la nuit. Pendant des heures, les deux bateaux sont restés séparés d’à peine un mille, jusqu’au début de la boucle de Bembridge - où un seul choix tactique a tout changé. En voyant un changement de vent à la bouée sous le vent, Malizia a empanné ; Paprec Arkéa a laissé faire, pensant que c’était sans danger. Mauvais calcul : la manœuvre a permis à l’équipe allemande de passer devant et d’augmenter peu à peu son avance.

À l’arrivée, Malizia a verrouillé sa deuxième place. Pour Paprec Arkéa, ce léger relâchement leur coûte une place qu’ils avaient défendue depuis Kiel, les reléguant à la troisième marche du podium. Boris Herrmann a décrit ce retour en force : « Ce matin, c’était incroyable. On a envoyé le spi et vu qu’on pouvait descendre plus bas qu’eux, et c’est comme ça qu’on les a passés. »

« Nous avons eu un peu de chance, c’est vrai, mais hier, à un moment, on était à 15-20 milles derrière et on a réussi à recoller. Ce n’est pas que de la chance ! » a ajouté le co-skipper Will Harris. « C’est une flotte très relevée, tout le monde pousse en permanence, et le fait qu’on soit les seuls à avoir doublé un autre bateau prouve qu’on a l’esprit combatif. »

« On a mal joué le coup, tactiquement et dans le choix de voile, et ils ont réussi à passer », a reconnu le skipper de Paprec Arkéa, Yoann Richomme. « C’est une erreur de ma part. J’étais assez fatigué, j’ai laissé filer. Je suis déçu aujourd’hui. » Il a toutefois ajouté : « Malgré cela, je suis très satisfait de notre étape. On a été deuxièmes 99 % du temps. L’équipage était en super forme, le bateau marchait vite en permanence. Tout a été fluide, on a fait énormément de manœuvres impeccables - je ne pourrais même pas les compter. »

Plus loin dans la flotte, la progression était bien plus laborieuse. Canada Ocean Racing - Be Water Positive, quatrième, a passé une grande partie de l’approche de Douvres dans un brouillard épais avec moins de 30 mètres de visibilité. « On voit jusqu’à l’étrave et peut-être une demi-longueur de bateau devant, puis la mer disparaît dans un voile gris », a décrit Pip Hare, expliquant qu’ils naviguaient grâce à l’AIS, au radar et au système infrarouge OSCAR. « Le risque, ici, ce sont les collisions avec d’autres navires, car on ne les verrait qu’au dernier moment. »

L’équipe canadienne a terminé quatrième, un peu plus de trois heures après le vainqueur. Pour Team AMAALA, encore à environ 80 milles derrière les leaders en début d’après-midi, la frustration était grande : « Pour être honnête, on va devoir faire genre 20 000 virements, dans le courant et sans vent », plaisantait le skipper Alan Roura ce matin. « Mais bon, ça fait partie du jeu. Au moins, on sait maintenant virer dans toutes les conditions ! »

Sam Goodchild (Biotherm) a souligné que cette victoire était d’autant plus satisfaisante que l’équipage avait peu navigué ensemble : « Même si chacun a son expérience en IMOCA, Paul dirige très bien l’équipe pour trouver le bon équilibre entre l’expérience et sa connaissance du bateau. Chaque étape apportera ses conditions et ses défis, mais celle-ci, on l’a bien gérée. C’est bien de démarrer sur de bonnes bases », avant d’ajouter « mais il ne faut pas s’emballer - la route est encore longue et l’objectif, c’est de gagner la course entière. »

Avec neuf points, Biotherm est solidement installé en tête du classement provisoire. La remontée de Team Malizia leur offre six points pour la deuxième place, les mettant à égalité avec Paprec Arkéa, qui ajoutent un point du passage de la porte de Kiel à leurs cinq points pour la troisième place. Canada Ocean Racing et Team Amaala termineront plus tard jeudi, avec respectivement quatre et trois points.

La prochaine étape partira dimanche 17 août : la flotte quittera Portsmouth pour 1 400 milles nautiques vers Carthagène, Espagne, avec une escale de trois heures à Matosinhos / Porto, Portugal. Team Holcim PRB et Allagrande MAPEI Racing poursuivent leurs réparations, espérant rejoindre le reste de la flotte pour la suite de la compétition.

La couverture de la course est disponible sur www.theoceanrace.com ainsi que via le partenaire média Warner Bros. Discovery et leurs plateformes Eurosport, TNT Sports, HBO Max et Discovery+.

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
Charlotte Lacroix
Charlotte Lacroix
Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
Max Billac
Max Billac
Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
Denis Chabassière
Denis Chabassière
Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
Michel Ulrich
Michel Ulrich
Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
METEO CONSULT
METEO CONSULT
METEO CONSULT
METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…
Cyrille Duchesne
Cyrille Duchesne
Cyrille Duchesne
Titulaire d'un doctorat en Climatologie-Environnement, Cyrille est notre expert METEO CONSULT. Après avoir enseigné la climatologie et la géographie à l'université, il devient l'un des météorologues historiques de La Chaîne Météo en intégrant l'équipe en 2000. Spécialiste de la météo marine, il intervient également en tant qu'expert météo marine pour des courses de renommée mondiale, comme la Route du Rhum, la Solitaire du Figaro, la Transat Paprec...