
Une vie guidée par le vent
Née en 1962 à Bron, loin des embruns, Catherine Chabaud découvre la mer à l’adolescence et ne la quittera plus. Étudiante à Paris-Dauphine, elle fonde avec des amis le Spi Dauphine, une régate étudiante encore active aujourd’hui. Le goût du large l’emporte rapidement sur celui des chiffres : après des études de journalisme, elle multiplie les embarquements, d’abord comme équipière, puis comme skipper.
Pendant plus de vingt ans, elle conjugue deux passions : raconter la mer et la naviguer. Journaliste pour Thalassa ou Europe 1, elle explore les histoires d’hommes et de bateaux avant de se lancer dans sa propre épopée.
Le large comme terrain de vérité
En 1996-1997, sur son voilier Whirlpool-Europe 2, Catherine Chabaud entre dans l’histoire : première femme à boucler un Vendée Globe, seule et sans escale. 140 jours de course autour du monde, un exploit qui l’installe durablement dans le panthéon de la voile française.
Elle enchaîne ensuite les traversées : 15 Atlantiques, dont 5 en solitaire, la Solitaire du Figaro, le Tour de l’Europe, ou encore le Fastnet Race, qu’elle remporte sur temps compensé en 1999, une première pour une femme. Même ses mésaventures, comme le démâtage de son second Vendée Globe en 2000, forgent sa réputation de navigatrice solide, lucide et tenace.
Sur l’eau, elle se distingue moins par la performance brute que par sa constance : celle d’une femme qui avance sans bruit, mais sans relâche, au rythme des vents et de la fatigue.
De la course à l’engagement
Pour Catherine Chabaud, la mer n’a jamais été un décor : c’est un sujet, une cause, presque un devoir. Dès le début des années 2000, elle met son expérience au service de projets concrets : missions ministérielles sur le nautisme durable, participation au Grenelle de la Mer, recherche sur les matériaux écologiques pour la construction navale.
Elle cofonde Innovations Bleues, un laboratoire d’idées dédié à la transition énergétique maritime, et porte le projet du Voilier du futur, conçu comme vitrine d’un transport plus sobre et intelligent. En 2018, elle lance « Océan, bien commun de l’humanité », plaidant pour une reconnaissance internationale des mers comme patrimoine collectif, un sujet sur lequel nous avions eu l’occasion de l’interroger, tant son engagement à défendre la cause océanique dépassait déjà les frontières du monde de la voile.
Toujours entre deux caps, elle alterne écriture (Possibles rêves, Entre deux mers) et engagement scientifique, siégeant notamment au Conseil économique, social et environnemental et au sein de la Marine nationale comme capitaine de frégate de réserve.
Une navigatrice à la barre du maritime
Sa nomination au sein du gouvernement Lecornu II ne relève pas du hasard. À 62 ans, Catherine Chabaud a ce que peu de responsables peuvent revendiquer : une vie entière à observer la mer depuis le pont, à en comprendre les logiques, les dangers et la beauté.
Son expérience du large lui a appris la patience, la décision et la lucidité, trois qualités que l’on attend d’un marin comme d’un ministre. Qu’elle parle d’érosion, de pêche, de transition énergétique ou de biodiversité, elle le fera avec le regard de celle qui a affronté les océans, pas seulement leurs rapports d’experts.