Route du Rhum – Destination Guadeloupe : Quel beau départ !

Au large de la pointe du Grouin, l’image de ces 138 voiliers menés en solitaire était impressionnante. Tous parfaitement alignés, les trimarans Ultims et Ocean Fifty au Nord et les 55 Class40 tout au Sud, entouraient les deux portes du centre réservées, l’une aux 38 Imoca et l’autre aux catégories Rhum Mono et Rhum Multi.
Précipitation ou erreur dans le timing, selon nos confrères du Télégramme, 17 skippers seraient partis avant le top départ de 14h15. Parmi eux, plusieurs favoris, à commencer par Charles Caudrelier sur Gitana, mais aussi Yoann Richomme, Alberto Bona ou encore Axel Trehin en Class 40. Sans oublier les pourtant vieux briscards de la classe Rhum Multi, Philippe Poupon, Halvard Mabire et Roland Jourdain, eux-aussi flashés en train de passer alors que le feu était encore rouge. Et ce départ anticipé pourrait avoir de lourdes conséquences pour ceux qui jouent la gagne, puisque le règlement prévoit 4 heures de pénalité à effectuer dans les 48 heures après le départ pour un tel cas de figure. Quand on sait que Francis Joyon l’avait emporté en 2018 en finissant seulement 7 minutes devant François Gabart, cette petite erreur pourrait avoir de graves conséquences à l’arrivée à Pointe à Pitre.
Pénalité à venir ou pas, Charles Caudrelier, en grand favori qu’il est, a tout de suite pris la tête de la course et passé la porte du Cap Fréhel en tête devant Armel Le Cléac’h puis François Gabart. La marque passée, les deux leaders repartent au large. Mais derrière eux François Gabart continue vers la côte, peut-être pour s’abriter du courant contraire qui frôle les 2 nœuds à cette heure de la marée. Les Ocean Fifty, menés par le local Thibaut Vauchel-Camus, optent d’ailleurs pour la même tactique. Chez les trimarans de 50 pieds, le début de course a été marqué par la blessure et le probable abandon de Sam Goodchild. L’infortuné skipper Britannique a en effet dû être évacué après s’être blessé dans une manœuvre, à priori à la fois à la tête et aux bras. Un gros coup dur pour le skipper du trimaran Leyton, qui revenait souvent comme l’un des favoris de cette classe très disputée. Départ compliqué également pour le local Gilles Lamiré, qui a visiblement dû faire face à des problèmes techniques et accuse déjà 24 milles de retard après seulement 4 heures de course.
Côté Imoca en revanche tout va bien. Seuls François Guiffant et Nicolas Rouger semblent avoir volé le départ. Un écueil qu’a évité l’ultra-favori Charlie Dalin, dont le Apivia a bien sûr passé Fréhel en leader, suivi comme son ombre par le Malouin Louis Burton. En ces premières heures de course les bateaux neufs, tout juste mis à l’eau, en profitent pour se mettre en évidence. Ils sont six à être dans les dix premiers, Jérémie Beyou en tête, intercalé en troisième position entre Louis Burton, toujours à l’aise dans ses eaux, et Thomas Ruyant. En Class40, Matthieu Perraut a été le premier à passer la marque de Fréhel, suivi de près par l’Italien Ambrogio Beccaria et Ian Lipinski. Xavier Macaire, Corentin Douguet, Luke Berry et tous les favoris de cette classe très disputée sont au avant-postes. Seul Yoann Richomme (17ème) manque à l’appel : perturbé par son départ volé ou déjà en train d’effectuer sa pénalité ?
Chez le Rhum Multi, alors que Philippe Poupon semblait s’envoler dès le départ à la barre de Flo, l’ancien bateau de Florence Arthaud, passer la marque du Cap Fréhel contre le vent et le courant a rabattu les cartes et à l’heure où nous bouclons ces lignes ils n'ont toujours pas passé la marque. Halvard Mabire et Brieux Maisonneuve qui feraient partie des skippers à avoir volé le départ sont, à voir leur route, profitent peut-être déjà de la lente progression de leurs concurrents pour effectuer leur pénalité de 4 heures, et repartir avec un moindre écart. En Rhum Mono, les écarts sont faibles et il faudra attendre, alors que la nuit est tombée sur Fréhel, que les skippers passent la porte pour connaitre le podium très provisoire.
Au près, dans un vent oscillant entre 15 et 20 nœuds, les skippers ont souvent hésité entre la prudence de prendre un ris dans la Grand-Voile, ou l’attaque en portant toute la toile d’entrée. Les 17 premiers milles jusqu’à Fréhel semblent avoir donné raison aux seconds. Mais la route est encore très longue jusqu’à Pointe à Pitre. Les solitaires abordent leur première nuit en mer, heureux d’être enfin partie et de pouvoir exercer pleinement leur métier, mais aussi concentrés sur cette partie difficile du parcours, entre bords à tirer, courant à gérer, concurrents à marquer et trafic à éviter.