Transat Jacques Vabre : 4 classes mais combien de favoris ? (Partie 1)
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ULTIMES : un favori et 4 outsiders
Comme à l’école, pour se mettre en confiance, autant commencer par l’exercice le plus facile. Depuis deux ans, il vole sur l’eau et survole la classe Ultime du bout de ses foils. Optimisé, fiabilisé, et parfaitement maîtrisé par son duo de skippers Franck Cammas et Charles Caudrelier, le Maxi Edmond de Rothschild est forcément le grandissime favori. Mais les vitesses atteintes par ces trimarans qui naviguent en permanence entre 30 et 40 nœuds sont facteurs d’incertitudes. Le risque le plus élevé c’est le choc avec un Ofni ou un animal marin. A ces vitesses, c’est destructeur pour les foils, la dérive ou les safrans, et donc le plus souvent synonyme d’abandon. A ce risque incontrôlable, il faut ajouter l’aléas météo sur le long parcours qui verra les Ultims descendre jusqu’à la latitude de Rio de Janeiro avant de remonter jusqu’en Guadeloupe, soit deux passages du Port au Noir, dont un Nord-Sud toujours délicat. Vous restez coincés dans une bulle sans vent quand les autres filent à 20 nœuds avec seulement quelques milles de décalage et c’est la course qui se joue. D’autant que le Sodebo de Thomas Coville et Actual (ex-Macif) de Yves Le Blevec sont eux-aussi fiabilisés et vont très vite. Quant à Armel Le Cléac’h sur Banque Populaire et surtout François Gabart sur SVR-Lazartigue, s’agissant de leur première course à bord de trimarans tout juste sortis des chantiers, l’objectif premier sera sans doute de finir. Mais leur potentiel semble tellement énorme que si la malchance les épargne ou accable leurs concurrents, tout est possible.
IMOCA : revanche, confirmation ou révélation ?
Le Pot au Noir, nous nous garderons d’évoquer ce très mauvais souvenir à Jérémie Beyou et Christopher Pratt. Alors qu’ils menaient la course de la tête et des épaules de taureau de leur Charal, ils avaient passé deux jours complètement arrêtés et tout perdu sur ce terrible coup de dés. Autant dire qu’ils reviennent deux ans après avec une furieuse envie de gagner et un Charal au meilleur de sa forme. Mais celui qui ne les avait pas attendus il y a deux ans pour l’emporter, est à nouveau présent. Depuis il a aussi été le premier à couper la ligne d’arrivée du Vendée Globe, même s’il a été finalement classé second, le tout sans sourciller, remportant sans contestation possible le Grand prix du fair-play. Charlie Dalin et le talentueux Paul Meilhat sur Apivia, puisque c’est bien d’eux dont il s’agit, ayant également remporté le dernier Fastnet, sont donc eux-aussi favoris pour pointer leur étrave spatulée les premiers en baie de Fort de France.
Mais derrière ce duo de choc, ils sont, à nos yeux, une petite dizaine à pouvoir prétendre aux-aussi à la victoire. En premier lieu il convient de citer le vainqueur du dernier Vendée Globe, Yannick Bestaven pour l’une des dernières courses de son Maître Coq avant de passer à une nouvelle monture. Si ce parcours, plus court qu’un Tour du Monde, statistiquement moins musclé météorologiquement parlant, effectué en double qui plus est, devrait être moins favorable à son bateau d’ancienne génération, le natif d’Arcachon a prouvé qu’il pouvait créer la surprise. Mais à l’image des deux favoris, les bateaux mis à l’eau pour le dernier tour du monde en solitaire devraient être particulièrement performants sur les 5 800 milles nautiques d’une course qui les verra contourner l’archipel de Fernando de Noronha. Alors qui de Arkea Paprec pour la dernière de Sébastien Simon à son bord, de LinkedOut du rapide Thomas Ruyant ou de Nicolas Troussel sur le body-buildé Corum sera le premier en Martinique ? Avec les co-skippers qu’ils se sont choisis, soit respectivement Yann Elies, Morgan Lagravière et Sébastien Josse, une seule certitude, le facteur humain ne manquera pas de talents ! Mais si on parle humain, il ne faut surtout pas oublier les deux bateaux qui ont fini hors-course le Vendée Globe mais ont confirmé, avec panache qui plus est, tout le bien que l’on pensait d’elles : Sam Davies sur Initiatives Cœur et Isabelle Joschke sur MACSF. Quant à l’équipe de 11th Hour, elle double ses chances de podium en plaçant deux bateaux sur la ligne de départ. Celui du dernier Vendée Globe placé dans les mains de Justine Mettraux et Simon Fisher, et leur tout dernier Imoca prévu également pour le Tour du Monde en équipage, confié à Charlie Enright et à l’expérimenté Basque Pascal Bidégorry. Enfin, le who’s who des prétendants ne serait pas complet sans évoquer le Bureau Vallée de Louis Burton. Epouvantail du dernier Vendée Globe aux mains d’Armel Tripon, le scow dessiné par Sam Manuard fera des émules dans la prochaine génération Imoca c’est sûr. Mais sur cette transat Jacques Vabre il reste le seul, alors si son skipper a eu le temps d’en acquérir toutes les subtilités, il pourrait bien, comme aux Sables d’Olonne il y a quelques mois, forcer l’admiration.
Un ultra-favori d’un côté, deux prétendants de l’autre, foule d’outsiders dans tous les cas, voilà, vous savez tout, sur les classes des plus grands bateaux. Mais sachez qu’au petit jeu des pronostics, les Ocean Fifty et les Class 40 sont eux aussi très difficiles à partager. Alors rendez-vous jeudi pour une deuxième partie tout aussi serrée.