Maxime Sorel, 10e du Vendée Globe

Par Figaronautisme Vend?e Globe

Ce samedi 30 janvier, à 04 heures, 50 minutes, 15 secondes (heure française), Maxime Sorel a franchi la ligne d’arrivée des Sables d’Olonne après 82 jours, 14 heures, 30 minutes et 15 secondes à l’issue de ce Vendée Globe. Il termine à 2 jours, 10 h, 45 min du vainqueur, Yannick Bestaven. L’objectif est donc atteint pour le skipper de 34 ans qui désirait avant tout « boucler son tour du monde ». Mais avec l’abnégation qu’il a démontré jusqu’au bout, notamment en affrontant une forte dépression ces dernières heures, le skipper de V and B - Mayenne a fait beaucoup mieux. Explications.

Il fait nuit, le vent de sud-ouest souffle à plus de 25 nœuds, la mer est courte, les creux s’élèvent à 2,5 mètres de haut et la pluie tombe. Voilà le décor de l’arrivée du premier tour du monde de Maxime Sorel.

 

La course de Maxime

 

Il a la tête d’un jeune premier, les traits du visage fin et la chevelure blonde, plus ou moins étincelante en fonction des saisons. Mais derrière son sourire et son aisance générationnelle à communiquer, Maxime Sorel, 34 ans, n’a rien d’un novice. Avant de batailler sur tous les océans de la planète, l’homme a toujours fait preuve d’une sacrée abnégation. Lui qui admire Michael Jordan « parce qu’il s’est battu toute sa vie », s’est toujours démené pour mener ses projets. Il y a eu sa vie d’avant, ingénieur d’affaires où les heures ne sont jamais comptées, puis l’idée de se lancer dans la course au large. « Ce qui m’en a donné envie, ce n’est pas seulement de courir sur les mers, c’est de gérer un projet dans son ensemble » explique-t-il.

 

Des vagues iodées à la vague d’émotion

 

Mener sa vie comme on le fait en mer, sans rien lâcher. Au fil des années, il enchaîne les courses en Class40 (une Route du Rhum, trois Transat Jacques Vabre dont une victoire en 2017), rassemble des partenaires fidèles (VandB) et constitue une communauté autour de lui, au point qu’un département ne comptant aucun accès à la mer, la Mayenne, le supporte et se passionne pour son aventure. L’envie d’évasion le titillait les jours précédent le départ, au point de braver le confinement et de s’offrir une dernière session de surf à l’abri des regards. Des vagues iodées avant la vague d’émotion. Le Jour-J, il s’amuse – « tu te lèves le matin et tu te dis que tu pars faire le tour du monde » - puis fond en larmes dans les bras de son frère, Jérémy. Ensuite, la brume s’est levée et l’aventure a débuté.

 

La première nuit est délicate (plus de 40 nœuds), il a fallu enlever un filet engoncé dans son safran mais Maxime fait mieux que résister. Il prend même la tête de la flotte lors du 2e jour et est leader à 8 reprises*. Ensuite, il y a la dépression tropicale. Le skipper parle « d’une mer bouillonnante », de « manœuvres éprouvantes », évoque des problèmes de pilotes mais assure « qu’on a encore notre mot à dire jusqu’à l’équateur. » Il le franchit à la 14e place, au lendemain des leaders. Ses premiers jours de course ? « Exceptionnels à tous les niveaux. Je me suis sentis faire corps avec les éléments, la machine et le temps ».

 

Conditions musclées et avaries : un skipper jamais épargné

 

Maxime Sorel conserve son sourire en toutes circonstances, les yeux sont légèrement plus cernés mais le regard toujours fixe, toujours lucide. Certes, il n’est pas épargné et reprend d’ailleurs la maxime « une emmerde par jour » chère à Michel Desjoyeaux. Il y a cet arrêt buffet après une semaine de course, probablement causé par un OFNI, qui fait sauter le capuchon du réservoir de gasoil et vibrer la quille. Progressivement, le skipper engrange les nouveautés : le temps le plus long jamais passé à bord, la découverte des mers du sud « qui oblige à serrer les fesses pendant un mois », le froid qui ronge et le chaos qui affleure.

 

Début décembre, il flirte à 1,2 mille de la zone d’exclusion des glaces, s’adapte tant bien que mal à la mer désordonnée et aux rafales de 40 nœuds dans l’Indien. « C’est grains sur grains… On m’avait dit que le grand Sud était gris, froid, humide, mais pas que la mer était défoncée comme ça ! »  Maxime doit s’adapter au décalage horaire – « c’est très perturbant » - et se transformer en bricoleur acharné. Il doit monter au mat sous 18 nœuds, la faute à deux grandes déchirures sur ses voiles d’avant, puis passer « neuf heures non-stop » pour réparer son J2. Ses genoux le font souffrir, ses mains aussi (« elles sont défoncées, elles brûlent »). Pourtant, le skipper tient bon, solidement accroché à une 11e place qu’il conserve dans les mers du sud.

 

« Je ne suis pas un marin solitaire pur »

 

Sur la longue route qui le mène au cap Horn, les déboires de certaines journées ne font pas oublier les sourires et les discussions plus légères. La charcuterie et la mousse au chocolat dans l’Atlantique ont été remplacées par les plats chauds. À Noël, il savoure le repas concocté par un chef étoilé de Saint-Malo. Et puis Maxime reste connecté avec la terre – « je ne suis pas un marin solitaire pur » - lit des articles et sait qu’à terre, la situation est bien plus chaotique qu’en mer.

 

En fin d’année, il veut transmettre un message : « dire aux gens de faire attention et de ne pas se transmettre le virus à Noël : on aimerait tous faire une énorme fête à l’arrivée »  

 

Après le franchissement du Cap Horn, suite à l’abandon d’Isabelle Joschke (MACSF) qui naviguait non loin de lui, Maxime gagne une place. « Je suis dégoûté pour elle », lâche-t-il alors qu’il a dû affronter des rafales jusqu’à 55 nœuds.

 

La suite, c’est « l’autoroute des alizés », l’envie de « donner son max » et de résister au retour d’Armel Tripon. Le navigateur réalise à quel point il aura appris – « on pourrait faire encore dix fois le tour de la terre qu’on apprendrait encore » malgré les jours qui passent et la fatigue qui s’accumule. Alors que l’arrivée se rapproche, il y a une dernière difficulté et de taille : une forte dépression, violente avec des rafales qui tutoient les 60 nœuds… Comme un ultime défi pour un organisme et un bateau déjà soumis à rude épreuve. « C’est une course contre la montre, j’ai du mal à manger, à dormir, je cravache », confiait-il vendredi, les traits marqués. Mais Maxime a résisté, jusqu’au bout, et son tour du monde lui ouvre un peu plus le champ des possibles.

 

*Sur l’ensemble des classements de la course (6 classements par jour), Maxime Sorel apparaît en tête à 8 reprises.

 

 

 

LES STATS DE MAXIME SOREL / VandB - Mayenne

 

Il a parcouru les 24 365 milles du parcours théorique à la vitesse moyenne de 12,29 nœuds.

Distance réellement parcourue sur l’eau : 27 346,91 milles à 13,79 nœuds de moyenne.

 

Les grands passages

 

 

Equateur (aller)

 

14e, le 19/11/20 à 22h59 UTC, après 11j 09h 39min de course, 1j 09h 40min après le leader

 

Cap de Bonne Espérance

 

13e, le 03/12/20 à 03h01 UTC, après 24j 13h 41min de course, 2j 03h 50min après le leader

 

Cap Leeuwin

 

11e, le 15/12/20 à 12h06 UTC, après 36j 22h 46min de course, 2j 00h 40min après le leader

 

Cap Horn

 

8e, le 05/01/21 à 00h16 UTC, après 57j 10h 56min de course, 2j 10h 34 min après le leader

 

Equateur (retour)

 

10e, le 18/01/21 à 21h57 UTC, après 71j 08h 37min de course, 2j 02h 45 min après le leader

 

Meilleure distance sur 24 heures

 

Le 27 janvier 2021, à 07h30 UTC : 410,64 mn à 17,1 nds

 

Son bateau

 

V and B - Mayenne, plan Verdier VPLP, construit chez Indiana Yachting (Scarlino Italie)

 

Mise à l’eau : septembre 2007

 

 

 

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Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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