Après l'hostilité du Grand Sud, la bagarre pour Eric Péron ! - ARKEA ULTIM CHALLENGE Brest

Par Figaronautisme.com

Une semaine après avoir franchi son premier cap Horn, Eric Péron bataille au large du Brésil avec deux adversaires. Le premier est un camarade, mais non moins concurrent : Anthony Marchand (Actual Ultim 3) n’est distant que de 200 milles dans l’Ouest de l’ULTIM ADAGIO et cherche lui aussi à frayer un chemin vers l’équateur. Le deuxième est leur carburant à tous les deux, ce vent absent d’une large zone où les alizés devraient souffler à cette époque de l’année.  Après avoir essuyé les conditions les plus rudes de son tour du monde le long de l’Argentine, Eric Péron qui vient de recroiser sa route aller au large de l’archipel de Trindade, va devoir se coltiner un premier Pot au Noir jusqu’à la fin de la semaine, … avant d’attaquer le véritable équateur météorologique, dernier péage vers l’Atlantique Nord.

Il s’en est passé des choses depuis ce 21 février où Eric Péron immortalisait d’un joli dessin sur son ardoise les contours bleutés de l’Antarctique qu’il venait d’enrouler, laissant derrière lui son premier cap Horn. Avec en prime le meilleur temps de la course pour traverser le Pacifique, le chapitre Grand Sud de cet ARKEA ULTIM CHALLENGE - Brest était bouclé, mais l’affaire était-elle gagnée pour autant ? « Je n’aime pas cette partie de l’Atlantique Sud. Je m’étais préparé à quelque chose de difficile et j’ai été servi. Ça a été l’enfer …», dit sans détour le skipper de l’ULTIM ADAGIO. « La Cordillère des Andes bloque les dépressions, poursuit le skipper, mais il y a tellement d’air froid en altitude que de nouvelles perturbations se créent plus vite qu’il ne faut pour le dire ». Par deux fois, le vent a changé à 180° avec des pointes à plus de 60 nœuds qui sont venues brutaliser le trimaran avec d’incessantes manœuvres à la clef. « Rien de visible à la surface de l’eau pour te prévenir, ça vient d’en haut. C’était brutal et je me suis vraiment senti vulnérable ». Par deux fois donc, il a fallu se mettre en fuite, rouler en catastrophe et esquiver ce vent lourd et froid. Puis reprendre sa route dans un clapot infernal, l’atmosphère vidée de sa substance laissant claquer chaque ancrage et mettant à la torture l’accastillage du trimaran. S’en est suivi une montée au mât pour récupérer un lazy-jack (cordage qui tient la housse de grand voile, indispensable lors des réductions de voilure), pas mal de bricoles sur les bouts de remontée de foils, le bras de liaison ou le J1, mais rien de rédhibitoire.

Il n’y a pas d’alizé au numéro demandé…

Ça tombe bien, car après s’être bien tendu au profit d’Anthony Marchand, crédité de plus de 600 milles d’avance dimanche encore, l’élastique s’est détendu à la faveur d’Eric. 200 milles seulement séparent les deux compagnons ce matin et leur décalage en longitude est frappant. « Antho est arrivé plus tôt que moi devant la zone de vents faibles et n’a pas eu d’autre choix que de tricoter à la côte. Nous avions la possibilité de suivre ou d’optionner. Avec David, (Lanier, son routeur NDR) on a préféré partir au large. C’est potentiellement plus rapide, il n’y a pas le trafic maritime à gérer le long de la côte et moins de manœuvres… J’ai franchi un petit talweg hier et maintenant j’attaque la dorsale. Ça va m’occuper jusqu’à la fin de la semaine ! »  Après le tango argentin, voici donc la bossa brésilienne. Sur plus de 1000 milles nautiques carrés, l’Atlantique Sud est un désert. Pas de gradient de pression, pas d’alizé non plus. Parti au large, l’ULTIM ADAGIO va pointer ses étraves nettement plus à l’Est vers l’équateur qu’Actual Ultim 3. « Sur les routages, on s’en tire normalement assez bien », veut croire Eric qui sait Actual privé d’un foil et sans l’usage du second, donc archimédien comme lui. Le juge de paix entre les deux concurrents sera donc le Pot au Noir qu’Eric traversera à partir de mardi dans une zone en théorie moins propice (à l’Est), mais en bonne place ensuite pour raccourcir le chemin du retour et accélérer avec un bon angle dans l’alizé de Nord-Est.

Hommage à Charles

Des considérations assez lointaines sur cet espace temps qui s’effiloche et que la moiteur brésilienne contribue à rendre moins palpable. Dans ce contexte, chaque signe du chemin parcouru est bon à prendre. Avoir recroisé sa route la nuit dernière au large de l’archipel de Trindade en est un premier. Tout comme l’arrivée victorieuse de Charles Caudrelier à Brest suivie en direct cette semaine par Eric : « J’ai pu voir le replay comme à la maison grâce à la Starlink ! La synergie entre le talent de Charles et celui de son équipe donne envie. Et ils se projettent déjà dans l’après, c’étaient de belles images », appréciait le skipper de l’ULTIM ADAGIO qui a félicité par message le vainqueur de ce tour du monde historique. Pour l’heure, Eric se concentre sur la trajectoire de son trimaran dans des conditions qui réclament de l’attention pour exploiter au mieux l’existant et rester lucide. « Depuis le cap Horn en fait, on a beaucoup enchaîné sans jamais s’offrir de longues plages de repos. Je sens la fatigue à la capacité de sortir de mes siestes. Je m’arrache plus difficilement de la bannette qu’au début et la chaleur qui empêche de dormir la journée ne facilite pas la récupération », confiait le skipper.  Avant de retrouver l’air vif de l’Atlantique Nord, l’adrénaline de la régate reste la meilleure des motivations pour oublier la fatigue de 53 jours passés en mer. 

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Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…
Cyrille Duchesne
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Titulaire d'un doctorat en Climatologie-Environnement, Cyrille est notre expert METEO CONSULT. Après avoir enseigné la climatologie et la géographie à l'université, il devient l'un des météorologues historiques de La Chaîne Météo en intégrant l'équipe en 2000. Spécialiste de la météo marine, il intervient également en tant qu'expert météo marine pour des courses de renommée mondiale, comme la Route du Rhum, la Solitaire du Figaro, la Transat Paprec...