
1- Choisir son binôme avec soinCommençons par le Baba : pour réussir votre croisière en double consiste à choisir avec soin votre binôme. La première question à se poser est bien sûr celle de ses qualités de marin. Cherchez-vous un équipier amariné ? Un co-skipper ? Un simple compagnon de route ? Un cuisinier ? Au-delà de ses compétences nautiques, votre équipage doit être constitué par affinités, et compatible à une vie dans un espace contraint. Les qualités de votre « double » seront à évaluer différemment selon vos projets de navigation. Un convoyage en Bretagne en hiver ne demandera pas les mêmes compétences et expertise en navigation qu’une tranquille croisière aux BVI... Commencez par bien définir son profil et ce que vous attendez de votre partenaire. Soyez honnête et analysez ensemble la faisabilité du projet. Attention, à ne pas surévaluer les compétences de cet équipier potentiel sous prétexte que personne d’autre ne se présente et que vous devez appareiller. Un skipper responsable ne prend la mer qu’avec une météo, un bateau et un équipage fin prêts !Ceci dit, la majorité des navigations en double n’est pas celle d’un skipper embarquant un équipier, mais plutôt celle d’un couple en balade pour la journée, en vacances pour quelques jours, en année sabbatique ou en retraite. Dans ce cas, la question du « double » est bien plus épineuse… On sort de la stricte organisation de la vie en bateau pour entrer dans l’intime. Et ce choix de vie doit être désiré, accepté et validé par les deux équipiers ! Attention, votre couple peut ne pas se remettre d’une expérience nautique malheureuse…
2- Préparer sa navigationUn skipper responsable prépare forcément toujours la navigation à venir en fonction de la météo, de la destination choisie, de son bateau et… de son équipage. En double, cette préparation doit être encore plus minutieuse. Selon la météo et les routages, il faut définir les caps à suivre et les heures estimatives de leurs changements, les dangers, feux et balises que vous allez croiser sur la route et à quel moment… Enfin, les spécificités de la zone d’arrivée – qu’il s’agisse d’une marina ou d’un mouillage forain - doivent être connues et notées pour pouvoir rapidement se rafraichir la mémoire en cas de besoin. Bref, tout doit être préparé – idéalement ensemble – pour que chacun à bord connaisse parfaitement la navigation à venir et soit apte à la gérer.

3- Prendre les décisions collectivementL’époque où le « captain » était le seul maître à bord et avait « droit de vie et de mort » sur son équipage est belle et bien révolue. Et c’est tant mieux ! A deux, mais c’est bien sûr aussi valable à quatre ou à dix, les choix de la croisière, des temps de navigation à aux mouillages doivent être pris collectivement. Si l’un des deux est fatigué ou victime du mal de mer, il n’est pas envisageable de partir pour une longue étape avec une météo difficile et un temps froid. Mais, si les choix de destinations, de voiles ou de routes… se doivent d’être validés ensemble, il n’en reste pas moins qu’en cas de danger imminent, c’est le skipper qui doit impérativement prendre la main. Il est donc indispensable, avant le départ, d’avoir défini à qui revient cette responsabilité si la situation l’exige !

4- Anticiper chaque manœuvreVous avez l’habitude de gréer telle ou telle voile ? De naviguer à un régime moteur donné dans telles conditions de mer ? Et quid du mouillage ? Quelle que soit la manœuvre envisagée, à deux, elle doit être fortement anticipée. On ne lance pas un empannage sur un bateau de croisière de plus de 15m sans l’avoir correctement préparé. Surtout en équipage réduit. Chacun, à bord, doit connaître son rôle, son poste, ce qu’il doit faire (et ne surtout pas faire) pour éviter les situations hasardeuses ou pire, les bêtises et manquements qui entraînent des avaries ou des blessures. Les tensions sur les bateaux modernes sont énormes et d’une écoute à une drisse ou une chaîne de mouillage, le mauvais geste peut avoir des conséquences graves. Alors avant une manœuvre, même si elle est basique et déjà réalisée des centaines de fois, on rappelle à chacun son rôle et les gestes à faire et ceux à proscrire. Une évidence qui ne prend que quelques secondes mais qui peut tout changer…

5- Communiquer efficacementQuand un ordre pour une manœuvre part à la volée, il y a toujours quelqu’un pour l’entendre et s’en occuper à bord d’un bateau avec un équipage suffisamment nombreux. A deux, c’est forcément plus délicat. Il faut donc mettre en place une communication claire. L’anticipation (voir le point n°4) fait que vous ne devriez pas vous retrouver dans une situation où l’autre doit sortir de sa bannette en urgence pour vous venir en aide sur une manœuvre. C’est en tout cas la théorie, mais la réalité de la vie en mer est souvent toute autre. Et ces situations d’urgence existent, même si vous anticipez au mieux tout ce qui peut l’être. C’est là qu’il faut avoir mis au point une communication précise et parfaitement codifiée entre vous. Pour que l’appel ne soit pas le même si vous rêvez d’un café ou si vous venez de taper un OFNI…
6- Faut-il s’attacher jour et nuit ?Dans une société de plus en plus codifiée et sécurisée, l’un des grands plaisirs de la navigation de plaisance est de laisser à chacun le choix de ce qu’il souhaite – ou pas – faire. Les Anglo-Saxons n’imaginent pas naviguer, même par beau temps, sans avoir capelé un gilet gonflable souvent relié à une ligne de vie. Les Français n’ont pas cette culture et rares sont ceux, par beau temps, qui prennent cette précaution pourtant élémentaire.Que vous soyez un adepte du gilet et de la ligne de vie ou pas et pour être certain de faire le bon choix, prévoyez de simuler une opération « d’homme à la mer » en solitaire. Et oui, quand on est deux à bord et que l’un tombe à l’eau, on se retrouve… tout seul ! Pour rappel, il ne faut pas quitter « l’homme à la mer » des yeux, tout en faisant faire demi-tour au bateau et mettre en place le système pour récupérer et hisser à bord celui qui est à l’eau et qui peut être inconscient. Le tout en prévenant les secours et en notant les coordonnées exactes de l’accident. Oui, vu comme cela, il vaut vraiment mieux ne pas tomber à l’eau ! Et le meilleur moyen pour éviter cette situation, qui est celle qui génère le plus d’accidents graves en mer, c’est d’être relié au bateau…

7- L’autonomie de chacun, la règle de sécurité n°1A deux, l’autonomie est indispensable à la sécurité de tous. Chacun doit donc être capable de tracer la route, suivre le cap, comprendre la météo, prendre un ris, envoyer ou affaler une voile, arrêter une décision en cas d’urgence, régler un problème moteur et… réagir correctement en cas de début d’incendie ou « d’homme à la mer », etc. Trop de skippers laissent leurs équipiers dans une méconnaissance de certaines manœuvres sous des prétextes fallacieux. En double sur un bateau, chacun doit être capable de tout faire. C’est une simple question de bon sens (marin) et de sécurité. Si l’un des deux n’est pas à l’aise pour telle ou telle manœuvre, il faut la répéter jusqu’à ce qu’elle soit parfaitement acquise. Et si le skipper n’est pas assez pédagogue, il existe des formations adaptées à chacun, selon ses désiderata et son niveau.
8- A deux, on est beaucoup plus fortEn course comme en croisière, la navigation en double n’est pas du tout équivalente à la somme de deux solitaires à bord qui se croisent à chaque quart. Il suffit de voir les impressionnantes moyennes réalisées sur les courses en double par rapport à celles en solitaire. Les bateaux y sont menés à 100% de leurs possibilités 24 heures sur 24. En croisière, la notion de performances est bien sûr bien moins importante. Il n’empêche que chacun à bord doit être à même de tout faire (voir points n°3 et n°7) pour une simple question de sécurité. Quatre yeux voient beaucoup mieux que deux, quatre bras permettent de réaliser de plus belles manœuvres. Quant au partage des tâches, il doit être équilibré pour la bonne entente du duo et éviter les éventuelles rancœurs. Rien de pire qu’un équipage en double qui ne se parle plus : la croisière vire au cauchemar – surtout si le duo est un couple – et le risque d’accidents est démultiplié.

9- Le pilote, le 3e équipier indispensableLes navigations en double restent plus compliquées à gérer. Heureusement, les accastilleurs, informaticiens et autres voiliers, motoristes et équipementiers ont développé de nombreux outils pour simplifier la vie des duos.Le pilote est l’équipier parfait, que vous naviguiez en solitaire, en double ou en équipage. Il barre le bateau 24h/24, bien mieux que n’importe qui à bord – même les marins du Vendée Globe plébiscitent leur pilote automatique ! Alors il faut non seulement en embarquer un, mais aussi toutes les pièces de rechange indispensables en cas de croisière au long cours. Imaginer devoir s’enchaîner à la barre d’un bateau alors que vous n’êtes que deux à bord, pendant les 20 à 30 jours d’une transat, ça vous dit ?Toujours en termes de sécurité, le radar et l’AIS sont des outils très utiles en équipage réduit, même s’ils ne doivent jamais remplacer la veille continuelle à bord de votre bateau. Et oui, si vous naviguez en couple, vous dormirez seul pendant les navigations…Des winches électriques (et forcément self-tailing) permettent de manœuvrer tellement plus facilement qu’il serait dommage de s’en priver. Nos bateaux sont de plus en plus grands et la visibilité depuis le poste de barre souvent problématique. Pourtant, les ports, eux ne laissent pas plus d’espaces pour manœuvrer. Alors, un bon propulseur d’étrave, des talkies walkies pour communiquer facilement d’un bout à l’autre du bateau sans avoir à hurler et voici un accostage facilement réalisé dans le calme et la bonne humeur. Un système pour remonter un homme à la mer inconscient est aussi utile à bord. N’hésitez pas à vous renseigner auprès des spécialistes de la préparation de bateaux de course comme de croisière, ils sont d’excellents conseils sur ce qu’il est utile d’embarquer quand on navigue en double.

10- Etre complémentaire, en course comme en croisière, oui mais…Sur les courses en double, la formation des duos passe par une bonne entente des personnes, mais aussi – et même avant tout – par leur complémentarité. Mais attention, en croisière, à ce que cette complémentarité ne tourne pas à l’arnaque. Faire la vidange du moteur, ce qui n’est pas agréable mais est nécessaire toutes les 100 heures de fonctionnement et le carénage une fois par an, n’équivaut pas à faire à manger trois fois par jour et s’occuper de la lessive… Le respect de son duo et de son travail est essentiel pour la bonne entente du bord. Combien de couples ou d’amis n’ont pas résisté à quelques semaines en navigation dans la promiscuité d’un bateau ? La vie à bord n’est pas un « copié-collé » de la vie à terre. L’’important est que chacun trouve la place qui le valorise et lui donne envie… de continuer à naviguer en double ! Et avant de partir en mer, ayez les bons réflexes en consultant la météo sur METEO CONSULT Marine et en téléchargeant l'application mobile gratuite Bloc Marine.