
Les « tracances » ou comment concilier vie à bord et vie professionnelle ?Le concept est totalement « tendance ». A tel point qu’un mot désigne maintenant le fait de travailler tout en étant en vacances et inversement : « tracances ». Le concept est un peu fourre-tout : on y trouve les cadres qui ne débranchent jamais, même en vacances en famille au bout du monde, les salariés qui télétravaillent d’un lieu de villégiature (et donc pourquoi pas de leur bateau), ceux qui passent quatre à six mois par an sur leur bateau à Porquerolles ou ailleurs et qui travaillent tout en profitant d’un cadre de vie exceptionnel… Ces « tracances » se développent auprès des cadres depuis la pandémie et sont même, parfois, encouragées par les entreprises qui voient cette nouvelle méthode de travail d’un œil positif si elle est bien encadrée.Mais avant d’imaginer se lancer dans l’aventure de la vie à bord tout en continuant son activité professionnelle, encore faut-il bien comprendre à quoi vous vous exposez. Vivre sur un bateau au quotidien et y travailler n’a rien à voir avec le télétravail depuis sa maison. Un bateau demande un entretien et une surveillance constants. Selon la situation – si vous êtes dans un mouillage dans un atoll du Pacifique ou au port de La Rochelle – vous aurez à vous occuper de votre bateau quelques minutes ou… plusieurs heures par jour. L’entretien courant, mais aussi la charge des batteries, l’avitaillement ou gratter la coque, sont vite chronophages. Rien d’insurmontable et qui n’empêche, normalement, de cumuler sa journée de travail et son rôle de skipper, si vous êtes un minimum organisé.

Un bateau comme habitat principalPourquoi utiliser son bateau comme habitat principal ? Certains prennent cette décision pour des raisons financières – difficultés à se loger, à louer ou à acheter un logement – pour des arguments fiscaux, d’autres par choix de vie pour une durée plus ou moins longue. Il n’y a donc pas un portrait-robot type du navigateur-résident à bord de son bateau à plein temps. Mais des spécificités propres à chacun qui justifient cette décision de choisir un habitat un peu différent. Que ce soit pour quelques semaines, mois ou années. Cette population très diverse va pourtant, se retrouver côte à côte, au port ou au mouillage. Certains à bord d’unités prestigieuses (et coûteuses), d’autres sur des bateaux d’une taille modeste, construits il y a plusieurs décennies ! Un « peuple des mers » bigarré et attachant, le plus souvent uni et pratiquant une entraide que l’on ne retrouve que trop peu à terre. Quoiqu’il en soit, transformer son bateau en résidence principale est possible, mais nécessite de prévenir les différentes administrations pour être en règle. Le ministère chargé de la Mer précise ainsi que "le principe fiscal est que toute personne (physique ou morale) doit avoir et préciser sa résidence fiscale. Sont considérées comme fiscalement domiciliées en France :• les personnes qui ont sur le territoire français leur foyer ou le lieu de leur séjour principal (maison, appartement, hôtel, bateau...) et qu'ils y séjournent plus de 6 mois (183 jours) au cours de l'année.• celles qui y exercent une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles n'établissent que cette activité n'est exercée en France qu'à titre accessoire,• celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques,• les agents de l'État exerçant leurs fonctions ou chargés de mission dans un pays où ils ne sont pas soumis à un impôt personnel sur l'ensemble de leurs revenus."Vous avez donc parfaitement le droit de vivre à bord de votre bateau à condition de faire connaître à l’administration une adresse de résidence fiscale. Certains ports proposent ces services. Sinon, il faudra élire domicile chez un parent ou des amis. Le concept du domicile fiscal reste complexe et, si vous prévoyez de vivre sur votre bateau au bout du monde – et de vous domicilier en dehors de France -, il est utile de demander conseils à un spécialiste qui saura vous aider efficacement en fonction de votre situation personnelle.

Comment trouver du travail lors d’une escale en grand voyage ?Vous voilà parti à bord de votre bateau. Selon votre profession, vous pourrez trouver – plus ou moins facilement – du travail. Sur le littoral français, si vous avez un métier en tension, il n’y aura aucun problème pour trouver un job pour quelques semaines ou quelques mois. Cela se complique quand on quitte le territoire national. Certains métiers sont aussi très recherchés en Europe ou sur les rivages plus lointains. Encore faut-il justifier de ses diplômes et éventuellement avoir fait valider des équivalences en fonction des escales que vous aurez prévues en amont. C’est possible pour certaines professions, beaucoup moins évident pour d’autres. Renseignez-vous avant le départ auprès des ambassades des pays que vous souhaitez visiter. Enfin, il faut, en dehors de l’Union Européenne, obtenir le fameux « sésame » pour travailler. Là encore, la demande doit souvent être effectuée avant d’arriver sur place et peut demander de longs mois d’attente avant une éventuelle réponse positive.En Méditerranée, mais cela est quasiment valable partout dans le monde, le fait de voir un marin arriver en provenance d’un rivage lointain est une qualification qui peut être suffisante pour trouver un job sur un navire, que ce soit en tant que marin, hôtesse, ou pour s’occuper et entretenir les bateaux sur zone. Attention toutefois, encore une fois, à avoir l’autorisation de travail indispensable pour être couvert en cas d’accident et éviter les problèmes avec les administrations locales qui peuvent être au moins aussi tatillonnes que la nôtre.

Télétravail et grand voyageChef de cuisine, infirmier, mécanicien… ces métiers qui sont recherchés un peu partout dans le monde existent, mais ne sont pas la majorité. Alors pour vivre à bord de son bateau tout en travaillant, le télétravail est peut-être la solution idéale pour vous. Depuis la pandémie de 2020, les entreprises ont appris à comprendre, accepter et surtout tirer profit cette nouvelle donne en matière de temps de travail et surtout de la localisation de celui-ci. Et oui, aujourd’hui, nul besoin d’être attaché à son bureau, de participer en présentiel à des meetings, briefings et autres conférences pour être efficaces dans son travail. Certaines études démontrent même que les télétravailleurs sont plus performants que lorsqu’ils étaient au bureau.Ne rêvez pas non plus… Aller voir son patron en lui expliquant que vous partez en tour du monde (ou de l’Atlantique ou de Méditerranée…) pour plusieurs mois mais que vous allez travailler durement depuis votre bateau… ne sera pas simple à vendre ! La donne sera bien sûr différente si vous êtes associé, ou que votre présence dans l’entreprise est tout à fait indispensable ! La négociation est toujours possible, à vous de trouver les arguments vraiment convaincants.Mais, force est de reconnaître que cette discussion sera beaucoup plus facile si vous êtes, votre propre patron, et que vous exercez une activité professionnelle telle que consultant, ingénieur informatique, illustrateur, journaliste (nautique ou autre !)... Ces professions ont été popularisées sous le terme de « Digital Nomad » par Tsugio Makimoto et David Manners dans leur livre éponyme en 1997. Un livre devenu cultissime dans le milieu des « voyageurs-actifs-diplômés » a tel point qu’aujourd’hui, il y aurait 35 millions de « digitals nomads », des personnes qui travaillent loin de leur bureau, grâce à internet et la multiplication des connexions haut débit partout dans le monde, du développement des clouds. Pour attirer et garder ces talents, les entreprises sont prêtes à accepter cette nouvelle manière de travailler. Pour les « nomades digitaux » à leur compte, de nombreuses plateformes offrent une visibilité mondiale et donc, des contacts et des contrats. CQFD !Seule certitude : travailler de son bateau ou pendant un grand voyage est possible mais nécessite une préparation importante et surtout d’embarquer un équipement adéquat.

Les équipements indispensables pour vivre à bord et travaillerCommençons par la base, à savoir votre lieu de vie et donc de travail : le bateau. Essayez, si cela est possible, de créer un espace de travail dédié à votre activité professionnelle. Ce lieu devra être protégé des éléments extérieur (embruns, pluie, soleil, etc.), suffisamment intime pour vous éloigner des distractions et des autres membres de votre équipage. Il devra être confortable, car vous risquez d’y passer de nombreuses heures tous les jours. Un bateau, même les plus grands, offre un espace de vie limité qu’il faut partager. La bonne gestion de cet espace contraint est une des clefs de la réussite de votre vie professionnelle nomade…L’environnement marin peut être extrêmement rude pour les appareils numériques. Il faut donc les protéger le plus efficacement possible. Appareils marinisés, boitiers étanches, contrôle de l’humidité ambiante dans votre « bureau » et éventuellement utilisation de systèmes déshumidificateurs seront un plus pour la sauvegarde de vos données et de vos instruments de travail. La préparation du bateau en termes de réseau électrique, de production d’énergie et en général d’autonomie doit être particulièrement soignée. Devoir arrêter votre travail parce que les batteries sont vides est impensable ! La clef du « nomade digital » reste l’accès à internet. Même en pleine mer, en transatlantique ou transpacifique, le haut débit est devenu accessible. Le nec plus ultra est aujourd’hui la solution Starlink et sa connexion offrant de 40 à 220 Mbits/s avec une couverture mondiale. En gros, c’est la 5G à bord, tout le temps… C’est par ce système que les marins du Vendée Globe nous envoient des vidéos en haute définition depuis les 50e hurlants.

Evidemment, cela représente un coût (le forfait mensuel 50 GO coute 287 euros – 1128 euros pour 1 TO), mais qui reste tout à fait acceptable dans le cadre d’une activité professionnelle. N’oubliez jamais que cette connexion est le sésame qui va vous permettre de vivre sur votre bateau avec le même internet qu’au bureau de votre entreprise…Pour le reste de l’équipement, il n’y a rien de plus à prévoir que pour un télétravail à la maison : un système de sauvegarde cohérent, si possible sur un cloud pour éviter les pertes en cas de vol et de détérioration des disques durs à bord et un VPN pour sécuriser vos données si votre activité est sensible (et même si elle ne l’est pas). Selon votre activité professionnelle, l’équipement de votre bateau peut aussi évoluer. Si vous êtes un plongeur chevronné, un compresseur sera indispensable à bord, avec tous les périphériques qui vont avec. Si votre activité consiste à livrer des pizzas aux bateaux au mouillage autour de vous, investissez dans un bon four et si vous êtes mécanicien, la caisse à outils à embarquer devra vous permettre de répondre à toutes les demandes de vos clients.Enfin, même au bout du monde et au mouillage dans un lagon paradisiaque, votre activité nécessitera une assurance professionnelle pour vous couvrir en cas de problème. Alors, avant d’appareiller, voyez avec votre assureur pour clarifier votre situation et avoir la police qui conviendra à votre situation.
Vivre à bord en travaillant : bonne ou mauvaise idée ?Le choix de vivre et travailler de son bateau est un choix de vie qui a de nombreux avantages mais qui n’est pas adapté forcément à tout le monde. Avant de vous lancer dans cette aventure, n’hésitez pas à tester cette vie – un peu particulière – en organisant quelques jours ou quelques semaines en télétravail depuis votre bateau pour être certain que c’est bien la vie que vous souhaitez. Et qu’elle est réellement compatible avec votre activité professionnelle et votre situation familiale…Et avant de partir en mer, ayez les bons réflexes en consultant la météo sur METEO CONSULT Marine et en téléchargeant l'application mobile gratuite Bloc Marine.