Raies manta : comprendre, observer et protéger les géantes des océans

Culture nautique
Par Le Figaro Nautisme

Majestueuses, silencieuses et parfaitement adaptées à la haute mer, les raies manta fascinent autant les plongeurs que les biologistes. Dans le vaste groupe des raies, plus de 630 espèces recensées dans le monde, seules 2 appartiennent véritablement au genre Mobula dans sa forme « manta » : Mobula birostris (manta océanique) et Mobula alfredi (manta récifale).

Majestueuses, silencieuses et parfaitement adaptées à la haute mer, les raies manta fascinent autant les plongeurs que les biologistes. Dans le vaste groupe des raies, plus de 630 espèces recensées dans le monde, seules 2 appartiennent véritablement au genre Mobula dans sa forme « manta » : Mobula birostris (manta océanique) et Mobula alfredi (manta récifale).
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Elles se distinguent par leur envergure spectaculaire, leurs nageoires céphaliques enroulées et une façon de nager qui n’appartient qu’à elles. Souvent considérées comme les plus célèbres de toutes les raies, elles n’en restent pas moins mystérieuses. Nous vous emmenons explorer leur mode de vie, les régions où les rencontrer et les bonnes pratiques en cas d’observation.

Les géantes discrètes : portrait d’un animal hors norme

Avec une envergure pouvant dépasser 7 m pour la manta océanique et un poids supérieur à 2 t, ces géants comptent parmi les plus grands poissons au monde. Leur cerveau, proportionnellement l’un des plus développés chez les poissons cartilagineux, intrigue les chercheurs : certaines études suggèrent qu’elles pourraient manifester des comportements sociaux complexes, une forme de curiosité active et même des aptitudes de reconnaissance individuelle.
Contrairement à la plupart des raies, souvent enfouies dans le sable ou dissimulées sur les fonds, les mantas vivent en colonne d’eau. Elles évoluent dans les couches supérieures mais n’hésitent pas à plonger à plusieurs centaines de mètres, probablement pour suivre les mouvements du plancton ou réguler leur température. Leur nage, ample et silencieuse, s’apparente presque à un vol plané, ce qui leur permet d’économiser de l’énergie sur de longues distances.

Un régime étonnamment sophistiqué

Les raies manta sont exclusivement filtreuses. Elles se nourrissent de plancton, de larves et parfois de petites crevettes, qu’elles capturent grâce à un dispositif filtrant très fin situé dans leurs branchies. Leur technique d’alimentation varie selon la densité du plancton :
o Nage en spirale pour concentrer les proies dans une colonne d’eau.
o « Somersault feeding » : des vrilles rapides pour maximiser la capture.
o « Chain feeding » : un comportement collaboratif où plusieurs mantas se suivent en formation serrée.
o Passages sur les « stations de nettoyage » : des lieux fixes où des labres retirent les parasites et nettoient les tissus abîmés.
Ces comportements sont particulièrement visibles lors d’événements planctoniques saisonniers, attirant parfois des dizaines d’individus dans un même secteur.

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Habitat et migrations : une carte encore incomplète

Présentes dans les eaux tropicales et subtropicales de tous les océans, les raies manta fréquentent les zones riches en courants, les têtes de récifs, les passes et les îles océaniques isolées. Leur préférence pour les eaux claires et productives explique leur présence sur des « hotspots » marins où le plancton se concentre naturellement.
Leur capacité migratoire reste encore difficile à cerner. Certaines populations semblent sédentaires, tandis que d’autres parcourent des centaines de kilomètres. Les études basées sur la photo-identification montrent parfois des retours saisonniers aux mêmes sites pendant plus de 10 ans, signe d’une fidélité forte à certains habitats clés.

Où voir des raies manta dans le monde ?
Certains territoires offrent des chances particulièrement élevées d’observer ces géantes, notamment en saison planctonique.
Maldives : Hanifaru Bay, dans l’atoll de Baa, est l’un des lieux les plus spectaculaires : lors des marées et vents favorables, des dizaines de mantas se rassemblent pour former des « vortex » nourriciers.
Indonésie : Raja Ampat, Komodo, les îles Gili ou Nusa Penida concentrent stations de nettoyage et courants riches en nutriments, permettant d'observer des mantas récifales toute l’année.
Mexique : La Revillagigedo (Socorro) est réputée pour ses mantas océaniques particulièrement confiantes, parfois prêtes à évoluer longuement autour des plongeurs.
Hawaï : Les plongées nocturnes à Kona proposent un spectacle unique : des mantas venant se nourrir sous le plancton attiré par les projecteurs.
Mozambique, Micronésie, Polynésie, Papouasie-Nouvelle-Guinée : D'autres destinations insulaires figurent parmi les points chauds mondiaux, souvent lors de fortes montées planctoniques.

Approcher sans perturber : les bonnes pratiques

Rencontrer une raie manta est un privilège, mais cela implique un comportement rigoureux.
À respecter

o Garder 3 m de distance minimum.
o Rester en dessous de l’animal pour éviter de couper sa route.
o Se déplacer lentement, sans bulles dirigées vers la manta.
o Éviter de stationner dans les zones de nettoyage.
o Limiter la puissance des lumières.
À proscrire

o Toucher ou frôler une manta.
o La poursuivre ou tenter de la contourner.
o S’agglutiner en groupe compact.
Plus l’observation est discrète, plus la manta s’approche d’elle-même.

Des géantes vulnérables face aux pressions humaines

Les mantas sont classées « vulnérables » ou « en danger » par l’UICN selon les régions. Leur faible taux de reproduction, une seule portée tous les 2 à 7 ans, les rend particulièrement sensibles à la pêche ciblée (pour leurs branchiospines), aux captures accidentelles, à la pollution plastique et aux modifications des écosystèmes planctoniques liées au réchauffement climatique.
Plusieurs zones marines protégées ont été créées pour sécuriser les sites de reproduction et de nettoyage. Le tourisme responsable, lorsqu’il est encadré, participe également à leur conservation en valorisant l’animal vivant et en finançant la recherche.

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Les raies manta, ambassadrices d’un océan en équilibre

Rencontrer une manta, c’est croiser un géant parfaitement adapté à la haute mer, doté d’une nage quasi aérienne et d’un comportement social encore mal compris. Ces animaux jouent un rôle essentiel dans la dynamique des écosystèmes pélagiques : là où elles évoluent, le plancton abonde, signe d’un océan vivant.
Les connaître, les observer avec respect et soutenir les programmes de protection sont autant de gestes qui garantissent qu’elles continueront à planer dans les océans pour longtemps.

Le saviez-vous ? Les raies sont les cousines très proches des requins

Bien que leur silhouette aplatie puisse laisser penser le contraire, les raies, dont les mantas, appartiennent exactement au même groupe que les requins : les chondrichthyens, les poissons cartilagineux. Leur squelette est fait de cartilage, leurs dents se renouvellent en continu et leur système sensoriel, notamment l’électroréception via les ampoules de Lorenzini, fonctionne de la même manière.
En d’autres termes, une raie manta est bien plus proche d’un requin-marteau que d’un poisson osseux classique : une branche évolutive ancienne, élégante et redoutablement adaptée à la vie marine.

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros
Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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Titulaire d'un doctorat en Climatologie-Environnement, Cyrille est notre expert METEO CONSULT. Après avoir enseigné la climatologie et la géographie à l'université, il devient l'un des météorologues historiques de La Chaîne Météo en intégrant l'équipe en 2000. Spécialiste de la météo marine, il intervient également en tant qu'expert météo marine pour des courses de renommée mondiale, comme la Route du Rhum, la Solitaire du Figaro, la Transat Paprec...
Irwin Sonigo
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Irwin Sonigo
Capitaine 200 et ancien embarqué dans la Marine nationale, Irwin Sonigo a exploré toutes les facettes de la navigation. Des premiers bords sur un cotre aurique de 1932 à la grande plaisance sur la Côte d’Azur, en passant par les catamarans de Polynésie, les voiliers des Antilles ou plusieurs transatlantiques, il a tout expérimenté. Il participe à la construction d’Open 60 en Nouvelle-Zélande et embarque comme boat pilote lors de la 32e America’s Cup. Aujourd’hui, il met cette riche expérience au service de Figaro Nautisme, où il signe des essais et reportages ancrés dans le réel.