999 raisons d'aller à Cuba
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L’accueil Tainos, l’ampleur des forêts, la fraicheur des rivières, la couleur de la mer, la douceur du sable, l’odeur du tabac, le patchwork des Vegas, la musique à tous les étages, les routes de montagne, les cavaliers, les musées, les forts, les palais, les théâtres, les maximes du Che peintes sur les murs, les uniformes d’écoliers, le chant du Tocororo qui annonce la pluie…
Il y a 999 raisons d’aller à Cuba. Il pourrait y en avoir une de plus mais ce serait exagérer. Avant de réaliser votre rêve de traversée d’Atlantique et d’atterrissage dans le sillage de Christophe Colomb, vous pouvez vous y faire déposer par un Boeing 777. Vous ne serez donc pas seul à y débarquer mais l’ile est grande et personne n’est obligé de suivre les sentiers battus. Colomb, croyant avoir atteint les « Indes Orientales », avait nommé « Indiens » les premiers indigènes rencontrés. Ceux-ci n’étaient pas tous pacifiques mais à Cuba le peuple Tainos accueillit les conquistadors avec bienveillance… avant de réaliser que l’arrogance des nouveaux arrivants ne reflétait qu’un comportement de pilleurs. Pourvu que l’histoire ne se répète pas avec l’invasion des touristes. Car le sang Tainos qui se mêle depuis plus de 5 siècles à celui des espagnols n’a pas atrophié le gène de la gentillesse. On va à Cuba pour la rencontre d’un peuple aimable et cultivé, dans un pays où le poids du passé reste omniprésent. Après les conquistadores vinrent les colons et leurs esclaves, l’indépendance et bientôt la révolution. Tout a été très vite sur cette île avant que tout ne se fige dans les années 1960. La guerre froide continue à nous faire froid dans le dos quand on voit dans quel état elle a laissé le pays. A La Havane, j’ai l’impression de me balader dans une bande dessinée fantastique. La végétation tropicale a pris possession des immeubles qu’elle torture et fait exploser. Les habitants sont, par habitude d’oisiveté, contemplatifs. Assis sur leur perron ils regardent l’animation de la rue que les enfants envahissent dès qu’ils savent marcher. En ville, ça circule. Les triporteurs, pour passagers ou marchandises, zigzaguent à la force du mollet entre les vieilles américaines des années 50. Qu’elles soient Chevrolet, Buick ou Cadillac, elles doivent contribuer à elles seules à 50% du réchauffement climatique tant l’essence est de mauvaise qualité. Mais on voit peu ces voitures sur la route. Ou alors en panne, ou crevées. L’immense autoroute, 8 voies s’il vous plaît, qui traverse l’ile dans sa grande longueur, est surtout fréquentée par de lourdes charrettes tranquillement halé par des bœufs, par des carrioles accrochées à de fiers chevaux pas plus épais que la rossinante de Don Quichotte, par quelques vieux bus bondés de paysans ou par de bringuebalants taxis qui slaloment entre les nids de poule. Autour c’est la forêt ou la campagne parsemée de plantations de cannes à sucre, celles-là même qui avaient fait la richesse de l’ile. Les champs de tabac, avec leurs séchoirs imposants, dessinent des paysages magnifiques. Mais nous sommes marins sur une île, alors la côte attire. Après les villes, après la forêt tropicale, retournons à la côte. Les plages ne sont pas si nombreuses mais elles font les plus belles images de la Caraïbe turquoise et brûlante. Sur la côte nord, côté Atlantique, les Cayos semblent sortis de nos plus beaux rêves. En longeant la côte on arrive à son but. Comment ne pas faire le détour par Cojimar. J’avais évidemment l’intention de rendre visite à Hemingway en allant à Cuba. Je n’ai pas loupé sa chambre de l’hôtel Ambos Mundos avec sa machine à écrire fétiche, j’ai bu le daïquiri à côté de son buste au bar le Floridita, mais ce qui m’importait le plus c’était de humer le petit port de Cojimar. De là, il partait à la pêche au gros sur son Pilar. Son ami, le pécheur capitaine qui l’accompagnait et servit de modèle à Santiago, le vieil homme, vivait encore ici lorsqu’il a fêté ses 100 ans en 1997. « Tout en lui était vieux, sauf son regard, qui était gai et brave, et qui avait la couleur de la mer ». Maintenant je veux relire le Veil homme et la mer.