
Accueil chaleureux aux sables d'Olonne pour le plus jeune vainqueur du Vendée Globe qui pulvérise, au passage, le record de l’épreuve.
Après une longue approche dans les petits airs, dimanche, à 15h18, en coupant la ligne d’arrivée devant les Sables d’Olonne, François Gabart (Macif) est devenu le septième vainqueur du Vendée Globe en bouclant le tour du monde en solitaire sans escale et sans assistance en 78 jours 2 heures 16 minutes et 40 secondes. A 29 ans, il devient le plus jeune lauréat de l’épreuve et pulvérise au passage de 6 jours et 23 minutes (15,3 noeuds de moyenne) le record établi en 2009 par Michel Desjoyeaux. Quelle belle image, cette remontée triomphante du chenal des Sables d’Olonne, le jeune Charentais à la proue de son monocoque acclamé par une foule immense massée sur les quais qui fond en larmes submergé par l’émotion. Quel beau symbole aussi, Michel Desjoyeaux, à qui il succède au palmarès, qui vient l’étreindre chaleureusement sur son bateau.
Merci Armel !
Les premiers mots prononcés sont empreints d’humilité à l’image de ce jeune marin talentueux : « C’est un soulagement énorme, tant que la ligne d’arrivée n’est pas franchie, on ne sait pas ce qui peut se passer avec les pêcheurs et les cargos. Ça faisait quelques jours que je commençais à y croire mais je voulais rester concentré. Les bateaux sont de plus en plus performants, et nous, nous sommes de mieux en mieux préparés. Donc ces performances qui s’améliorent à chaque course, c’est normal, en fait. J’ai pris un petit avantage au large de l’Argentine, je me suis décalé dans l’est et lui (Armel Le Cléac’h) a été bloqué dans une dépression orageuse, j’ai pu creuser l’écart. Il y a eu des yo-yo, des effets élastiques, mais j’étais devant. Quand je suis parti, je ne pensais pas jouer la victoire. Je savais que c’était possible mais je ne cherchais pas ça. Dans l’Indien, j’ai commencé à y penser et quand Armel et moi nous sommes tiré la bourre, je me suis dit que j’avais une chance sur deux de gagner. Et ensuite, dans l’Atlantique, j’y ai cru. Quand on prend des coups dans la figure, il faut se battre. Je me suis investi pour faire face à ce qui nous arrive, et il nous en est arrivé beaucoup ! Je n’ai jamais baissé les bras. Mon moteur m’a lâché cinq jours après le départ, ça a été dur, surtout qu’on a vu que l’énergie est importante dans cette course. Mais j’ai réussi à réparer. La longueur, l’enchaînement, c’est le plus dur. Je n’ai pas eu l’impression d’avoir un seul moment de répit. Même le golfe de Gascogne, à la fin, il fallait rester hyper attentif. Ce qui m’a manqué, c’est le calme et la vie terrienne. Merci à Armel, on a vécu des choses exceptionnelles. C’est plus beau pour moi mais je pense qu’il en gardera un beau souvenir aussi. Cette intensité pendant trois mois, c’est grâce à lui, ou à cause de lui, je ne sais pas comment dire… ».
Le Cléac’h dans la foulée
Pendant que François Gabart répondait aux nombreuses sollicitations des journalistes, Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) n’était plus dimanche, à 16 heures, qu’à 43 milles de la délivrance et devrait prendre la deuxième place du Vendée Globe vers 19 heures. Gabart, qui accueillera évidemment son ami, a décidé de passer la soirée avec lui. Comme quoi... Ils ont décidément du mal à se quitter après être restés deux mois au contact autour de la planète bleue. On n’en oublie pas pour autant Alex Thomson (Hugo Boss), à 978 milles des Sables, qui devrait prendre mardi la troisième marche du podium. Une pensée en ce jour de liesse pour Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec), en route vers les côtes portugaises, qui est pratiquement scotché sur l’eau (3,4 noeuds) dans une zone déventée. Le Niçois prendra la décision la semaine prochaine de tenter de rejoindre la Vendée sans quille ou d’abandonner au Portugal. Toujours cinquième devant Mike Golding (Gamesa) par le travers des îles du Cap Vert, Jean le Cam (SynerCiel) a été le premier à féliciter Gabart : « Félicitations pour cette belle place. Tu nous as bluffés, on en est les bras ballants. Ce que tu as fait est tout simplement impressionnant ». Suivent en file indienne dans un alizé nord-est établi, Dominique Wavre (Mirabaud), Arnaud Boissières (Akéna Vérandas) et Javier Sanso (Acciona 100% EcoPowered). Toujours dans l’hémisphère Sud, à l’approche de l’équateur, Bertrand de Broc (Votre Nom Autour du Monde avec EDM Projets) naviguait à 12 noeuds pendant que Tanguy de Lamotte (Initiatives-coeur) et Di Benedetto (Team Plastique) luttaient face au vent pour remonter l’Atlantique Sud.
LES VOIX DU LARGE
Jean le Cam (SynerCiel) : « Mon petit François, félicitations pour cette belle place. Tu nous as bluffés, on en est les bras ballants. Ce que tu as fait est tout simplement impressionnant. En premier : bravo parce que tu es le premier bizut. Le 2ème bizut, si je ne m’abuse, doit être Javier Sanso, que tu as relégué à une quinzaine de jours. Bravo à toi et aussi bravo à toute ton équipe. On est bien placés pour savoir que c’est un travail d’équipe. Bravo pour ce que tu as fait. Tu as su t’entourer avec l’équipe de Michel Desjoyeaux, avec Mer Agitée, parce que c’était une démarche personnelle de ta part et je l’apprécie, je la salue car c’était la bonne démarche. Je pense qu’on va faire des économies au niveau de la fédé (ndlr : Fédération Française de Voile), on ne va pas avoir besoin de faire un cocktail avec un jury pour élire le marin de l’année. Parce que quand on est recordman des 24 heures en monocoque – voilà ! Quand on est 1er bizut du Vendée Globe – voilà ! Quand on est 1er du classement général du Vendée Globe – voilà, voilà ! Et qu’on a passé la barre mythique des 80 jours et que tu es le 1er à avoir passé cette barre, je dis tout simplement chapeau bas. C’est beau ce que tu as fait et moi j’en suis baba. Y a rien à dire. Bravo mon petit François. Tu as fait une superbe course, tu ne l’as pas volée, tu t’es bien préparé et bravo encore. Il faut aussi savoir que pour faire un bon premier, il faut un bon second, c’est ce que je dis toujours. Et dans la foulée, si tu n’avais pas eu Armel avec toi, tu n’aurais pas fait ce que tu as fait. Alors bravo Armel que j’associe aussi à cette performance, pas à cette victoire mais tout au moins à cette performance. Parce que l’on sait qu’une performance comme celle-là, elle se fait grâce à l’autre qui te pousse dans l’affaire. Bravo François, Bravo Armel et … A bientôt ».
Bertrand de Broc (Votre Nom Autour du Monde avec EDM Projets) : « Bonjour, Je suis par 10°20, je repasse sur ma trace... Le soleil est aussi cogneur qu'hier mais j'en profite un peu car dans 8 jours ce sera re-polaire, re-chaussettes et re-bonnet. Le vent s'est un peu stabilisé car hier c'était bascule de 30°en 20 secondes, c'est juste un peu casse bonbecs ! Et là, je fais cap au nord, ça roule à peu près correct. Donc je vais pouvoir lire ou plutôt relire « la troisième race » de Hervé Recanati. Ensuite il faudra faire joujou avec le pot au noir et ensuite route sur les Açores ».
Mike Golding (Gamesa) : « Je suis vraiment très très secoué à bord, et mon ordinateur se déconnecte toutes les trente secondes, ce qui est extrêmement pénible car du coup, ça fait deux jours que je n’ai pas accès aux fichiers météo. Evidemment, ça ne m’aide pas dans la bataille qui m’oppose à Jean. J’ai perdu énormément de terrain sur lui et j’ai pourtant tout tenté. Je pense avoir enfin réussi à stopper l’hémorragie et je fais maintenant tout ce qui est en mon pouvoir pour revenir sur lui ».
CLASSEMENT
Positions du 27/01 à 16 heures : 1.François Gabart (Macif) arrivé le 27/01 à 15h18; 2.Armel Le Cléac´h (Banque Populaire) à 43 milles de la ligne d’arrivée; 3.Alex Thomson (Hugo Boss) à 935,6 m; 4.Jean-Pierre Dick (Virbac Paprec) à 1 037,6 m; 5.Jean Le Cam (SynerCiel) à 2 503,8 m; 6.Mike Golding (Gamesa) à 2 579,7 m; 7.Dominique Wavre (Mirabaud) à 2 881 m; 8.Arnaud Boissières (Akéna Vérandas) à 3 040,5 m; 9.Javier Sanso (Acciona 100% EcoPowered) à 3 151,2 m; 10.Bertrand De Broc (Votre Nom Autour du Monde avec EDM Projets) à 3 471,8 m; 11.Tanguy de Lamotte (Initiatives-Coeur) à 3 969,5 m; 12.Alessandro Di Benedetto (Team Plastique) à 4 727 m. Abandons : Marc Guillemot (Safran); Kito de Pavant (Groupe Bel); Samantha Davies (Savéol); Louis Burton (Bureau Vallée); Jérémie Beyou (Maître CoQ); Zbigniew Gutkowski (Energa); Vincent Riou (PRB); Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat).