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Dans les petits airs typiques de la mer Méditerranée, le VO65 Mirpuri Foundation Racing Team skippé par le français Yoann Richomme, déjà leader au classement général, ne s’est pas laissé surprendre en enchainant après Alicante, une seconde victoire d’étape d’affilée à Gênes. Chez les Imoca, le plus ancien, seul bateau à dérives droites et non à foils, de la flotte, Offshore Team Germany, a creusé un écart important en restant sur la route directe au Nord des îles Baléares. Il s’empare du classement général avec une belle progression en ayant gagné une place sur chacune des manches courues. Il lui sera cependant impossible de faire mieux samedi lors de la régate inshore de clôture qui se disputera devant le port Génois. Cette ultime manche devrait pourtant être décisive, puisque dans les deux classes, un seul point sépare les deux premiers de chaque classement après quatre régates, signe de l’homogénéité de la flotte.
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Du haut niveau en petit nombre
Pourtant, depuis son départ de Lorient, haut lieu de la course au large française, l’engouement n’est pas vraiment au rendez-vous de cette première course de niveau vraiment international depuis le Vendée Globe. Peut-être trop proche de l’arrivée de ce dernier, visitant des pays (France, Portugal, Espagne et Italie) pas encore au vent de la bouée de la pandémie, la flotte réunie -12 bateaux -paraissait bien faible au regard des 33 monocoques présents au départ des Sables d’Olonne en novembre dernier, et aux 15 à 20 Imoca attendus au départ de la prochaine Transat Jacques Vabre Normandie-Le Havre.
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L’union sacrée ?
Inaugurant la période de cohabitation entre traditionnels VO65, habitués des tours du monde en équipage, et 60 pieds Imoca, jusqu’ici menés exclusivement en solitaire ou en double, le plateau ne proposait que 7 unités dans la première catégorie et 5 dans la deuxième. La démarche initiée par Johan Salén et Richard Brisius, qui ont repris l’organisation de l’historique tour du monde à la suite du départ de Volvo est pourtant on ne peut plus méritoire. Il s’agit ni plus ni moins, si ce n’est de réconcilier, mais au moins d’associer les conceptions anglo-saxonne et française de la course au large. En effet, malgré la constante présence du trublion Alex Thomson en Imoca, et la victoire du Groupama de Franck Cammas dans la Volvo Ocean Race en 2012, voire celle des « Franco-Chinois » de Dongfeng en 2018, les deux mondes s’ignorent le plus souvent.
Un pari sur l’avenir
D’un côté les vénérables monotypes VO65, certes ultra performants, mais sur lesquels les équipages sont extrêmement exposés pour des bateaux conçus pour faire le tour du monde par les latitudes sud menés, sont menés à un train d’enfer par une douzaine d’équipiers. De l’autre, des foilers de haute technologie, menés par quatre ou cinq équipier(ère)s. Finalement, sur les trois étapes disputées entre Lorient, Cascais, Alicante et Gênes leurs performances s’avèrent très proches et si les VO65 arrivent toujours un peu devant ce n’est, sauf mistoufle météorologique, que de quelques minutes le plus souvent. Même si deux classements distincts sont bien réalisés, cela augure de belles bagarres autour du monde dès l’an prochain, mais combien seront-ils à l’automne prochain au départ d’Alicante ? Johan Salén espère « entre 10 et 15 Imoca et 5 à 7 équipes en VO65 ».
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Sponsors français ou mondiaux ?
Problème, les sponsors habituels des Imoca, habitués aux retombées mirifiques d’un Vendée Globe, sont pour la plupart des ETI françaises peu motivées par un parcours international aux coûteuses escales « exotiques » (Cap-Vert, Afrique du Sud, Chine, Nouvelle-Zélande, Brésil …). Des pays dans lesquels ils ont généralement peyu ou pas d’intérêts économique. On ne peut donc que saluer les trois représentants tricolores, tous en Imoca, sur cette édition inaugurale européenne, Louis Burton (Bureau Vallée), Thomas Ruyant (Linked Out / Advens) et Nicolas Troussel (Corum L’Epargne). Des transfuges français, en quête d’heures de vol et de visibilité pour leurs projets personnels de Vendée Globe ou/et The Ocean Race sont également présents à bord de bateaux battant pavillon allemand (Benjamin Dutreux), américain (Pascal Bidegorry) ou encore portugais (Yoann Richomme). Rien n’est encore gagné, mais rien n’est perdu non plus, pour les organisateurs du tour du monde qui, avec ce prologue européen ont fait la démonstration de la cohérence de leurs choix en termes de bateaux présents.