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Vendée Globe : Une météo et des héros
Le numerus clausus avait dû être élargi pour accueillir tout le monde. Ils étaient finalement 33, soit 5 de plus qu’en 2016 à prendre le départ. Il y aurait pu y avoir trois divisions (foilers, dérives et aventuriers), la météo en a décidé autrement, empêchant les foilers les plus récents de vraiment s’envoler. Les bateaux à dérives droites les plus performants et les mieux menés se sont donc battus jusqu’au bout, pour n’échouer qu’à une poignée d’heures du podium. Le vainqueur Yannick Bestaven ne doit rien à personne. Les heures compensées étaient incontestablement dues au grand marin qu’il est. Elégant jusqu’à vouloir partager sa victoire avec Charlie Dalin, qui avait passé la ligne en premier, celui-ci, immense de fair-play, n’a en rien protesté, et s’est même effacé, comme pour ne pas déranger. Si le premier pour sa victoire, et Jean Le Cam pour son sauvetage, ont été décorés à l’Elysée, ce sont tous les acteurs de cette 9ème édition qui auraient mérité une médaille, de nous avoir tenus en haleine pendant un peu plus de 80 jours. La prochaine édition est déjà attendue avec impatience, et attention, cette fois, ils pourraient être quarante !
Fastnet : course mythique mais pas statique
Créée en 1925, la légendaire course anglaise fêtera bientôt ses 100 ans. Pour éviter de se scléroser, elle n’a pas hésité, en cette année 2021, à innover. Si le départ dans le Solent, au pied des canons du Royal Yacht Squadron est resté immuable, l’arrivée à quitté les étroits bassins de Plymouth pour la grande rade de Cherbourg. Malheureusement, les restrictions liées à la crise sanitaire n’ont pas permis à tous de pleinement profiter de l’évènement. Mais la capacité d’accueil, l’enthousiasme et le dynamisme de la capitale du Cotentin dans l’organisation de cet évènement, ont emporté l’adhésion de tous : compétiteurs, organisateurs et surtout grand public. Sur l’eau, avoir 450 bateaux sur la ligne, même divisés en plusieurs classes, est toujours aussi impressionnant. Les géants sont là, qui remporteront la course en temps réel que ce soit Gitana pour les trimarans Ultims ou le Swan de 125 pieds Skorpios en monocoque. La compétition a été encore plus rude dans les classes phares, que ce soit en Imoca ou en Class40, remportées respectivement par Charlie Dalin et Paul Meilhat sur Apivia, et Palanad 3. Mais même avec une arrivée outre-Manche, la Rolex Fastnet Race conserve bien des traditions, dont celle du grand vainqueur en temps compensé, remporté cette année par le JPK 1180 Sunrise. Cherbourg pensait devoir attendre deux ans avant de revoir tout ce beau monde, mais la ville accueillera dès 2022 la Drheam Cup, avec un plateau moins nombreux mais tout aussi éclectique que qualitatif.

Solitaire du Figaro : Pierre Quiroga au firmament
Ils étaient certes seulement 33 au départ, contre une bonne cinquantaine les grandes années, mais le niveau n’en était pas moins relevé. L’absence de la vieille garde n’affaiblit pas le plateau, elle révèle au contraire qu’il faut se consacrer à 100% à ce support pour performer. Le podium réunit un trio de cadors, avec le benjamin Tom Laperche (24 ans) troisième, l’aîné Xavier Macaire (40 ans) second, et Pierre Quiroga (29 ans) sur la plus haute marche. Un grand vainqueur, à la fois à la régulière et à la régularité, tant il a su jouer « placé » sur les 4 étapes avec des places de 2, 1, 1 et 9. Entre St-Nazaire, Lorient, Fécamp, et la Baie de Morlaix, en passant par le Fastnet, La Corogne, ou l’île de Man, il fallait être résistant dans le petit temps, et avoir les nerfs solides tout au long des presque 2 500 milles nautiques théoriques ! Ils étaient tous les trois présents sur des supports plus grands au départ de la Transat Jacques Vabre. Notamment Tom Laperche coopté à 24 ans co-skipper de François Gabart sur le trimaran géant SVR-Lazartigue, et ce n’est qu’un début !

Multicoques : Ultims, Ocean Fifty, l’année de la maturité
Depuis le crash de la classe Orma, les multicoques, avaient du mal à redécoller. Entre des Multi50 hésitant entre la douceur du monde amateur et les contraintes du professionnalisme, et une flotte Ultim aussi famélique que fragile, le rêve semblait brisé. Mais à la faveur d’une saine évolution de sa classe de skippers, voilà les premiers organisés dans un Pro Sailing Tour des plus séduisants. Aussitôt le nom, plus médiatique, d’Ocean Fifty adopté, que de nouveaux projets sont dévoilés et autant de sponsors signés pour des budgets maîtrisés. Jeunes loups et habitués du circuit font cause commune, et on pourrait bientôt voir une dizaine de ces trimarans séduisants sur les lignes de départ. Avec deux mises à l’eau de premier plan pour Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) et François Gabart (-SVR-Lazartigue) la classe 32/23 a repris elle-aussi des couleurs. Ces forces s’additionnant à Gitana, Sodebo et au nouvel Actual (ex-Macif), le nombre de cinq concurrents compétitifs au départ des courses, est assuré. C’est un minimum pour crédibiliser une classe aussi prestigieuse. Le problème est d’être autant sur la ligne d’arrivée, ce qu’a permis la clémence météorologique de la dernière Route du Café. En volant régulièrement entre 40 et 50 nœuds, la partie immergée des foils et des safrans est bien fragile, et tout choc entraîne des dégâts souvent irrémédiables. Quant à élargir la flotte, la conséquence des budgets pour un bateau compétitif semble un frein important. Et pourtant quel bonheur de voir ces bateaux littéralement voler sur l’eau. La barre des 1000 milles en 24h leur tend les bras !
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Route du Café : la division a du bon
La dernière course automnale de l’année est encore dans toutes les mémoires. Alors nous ne reviendrons pas sur son déroulé, l’arrivée du premier Ocean Fifty, la bataille acharnée entre Imoca, le succès de la Class40, la fiabilité retrouvée des Ultims. Non, ce qui nous a séduit dans cette 15ème édition, ce sont les trois parcours distincts. Certes, seulement 4 classes étaient au départ, mais la flotte de 79 bateaux présentait des écarts de performance importants entre trimarans Ultims de 32 mètres et Class40 de 12m. Alors pour regrouper les arrivées, maintenir l’intérêt du public, simplifier l’organisation et la logistique, 3 parcours distincts ont été tracés. Le plus court pour les Class 40, qui pouvaient mettre le clignotant à droite dès les îles du Cap Vert franchies, le plus long pour les Ultims qui devaient descendre jusqu’à la latitude de Rio de Janeiro, et enfin une distance intermédiaire pour Imoca et Ocean Fifty qui devaient contourner Fernando de Noronha avant d’empanner. Une brillante idée que, si notre mémoire est bonne, nous devons à Jacques Civilise, organisateur de la Drheam Cup, mais que Francis Le Goff et son équipe ont su parfaitement adapter à la Route du Café.