Yves Le Blevec : « Antho est allé très loin dans l'engagement »
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Comment qualifies-tu la dernière semaine de course d’Anthony Marchand ?
Cela fait une semaine que l’on fait des routages avec Brest comme destination… C’est très satisfaisant ! Là, il va falloir monter dans le bon wagon pour gérer le système dépressionnaire centré entre les Açores et le Golfe de Gascogne qui génère beaucoup de mer et de vent. S’il la passe sans encombre, ce sera globalement tout droit jusqu’à Brest.
Comment cela se traduit avec l’ETA ?
Si on tient les timings fixés et qu’il ne subit pas les ralentissements, il pourrait arriver lundi soir. S’il est obligé de tirer des bords, ‘Antho’ ira forcément moins vite et arriverait alors mardi matin, c’est la petite inconnue.
Il navigue sur un foiler, sans foil, depuis l’océan Indien… C’est un exploit en soi ?
Lui ne parlera pas d’exploit mais de corvée ! Quand on connaît le comportement d’un bateau avec foil et la nouvelle dimension que cela représente, naviguer sans, c’est comme revenir en arrière, c’est une punition. Le bateau est lourd, pataud, inconfortable, ça tranche avec ses performances en volant ! Après, faire un tour du monde en Ultim, avec ou sans foil, c’est un exploit. Ça fait 65 jours qu’Antho est en mer, en solitaire, sur un bateau hors-norme… C’est difficile de trouver les mots pour qualifier son aventure.
A-t-il franchi un palier pendant ce tour du monde ?
Pour le savoir, il faudra prendre le temps d’analyser sa course à froid. Mais aujourd’hui, il va bien, il est dans une bonne dynamique… Ce sera intéressant d’échanger sur ses sensations, sa perception du tour du monde une fois qu’il l’aura digéré physiquement et mentalement. Mais ce qui est sûr, c’est qu’il est allé très loin dans l’engagement. Personne ne peut sortir indemne de ça.
Est-ce qu’il y a une fierté en tant qu’équipe Ultim à être allé au bout ?
L’avarie au Sud de l’Afrique nous a couté cher, puis le problème de foil tribord. On n’a pas eu les moyens de pousser les investigations lors de l’escale technique en Nouvelle-Zélande. À part ça, le bateau est en parfait état, ça montre le travail collectif conséquent du team Actual.
À quoi va ressembler l’avenir pour le team ?
Au printemps, on va profiter du bateau, revenir à la Trinité-sur-Mer, faire quelques semaines de bricolage et participer à quelques petites régates locales. Le foil tribord a été ramené par l’équipe SVR-Lazartigue, on espère pouvoir le remettre à la mi-mai. Cet été, on fera un chantier pour avoir un bateau à 100% de son potentiel début septembre afin de participer aux deux courses de la rentrée, dont les 24h Ultim.
Plus globalement, quel bilan tires-tu de cette première édition de l’ARKEA ULTIM CHALLENGE-Brest ?
C’est la course de tous les superlatifs. Tous ceux qui connaissent la course au large savent à quel point c’est un exploit pour les six bateaux qui y ont participé. Peut-être que ce qu’on doit travailler, c’est d’expliquer davantage pour montrer à quel point le défi des skippers et des teams est colossal. Nous avons tous du mal à communiquer sur nos problèmes et peut-être qu’en parler un peu plus peut permettre à plus de non-initiés de prendre la mesure de ce que les marins vivent.
En quoi cette course est précieuse pour la classe Ultim ?
Pour qu’une classe ait sa place dans le paysage de la course au large, elle se doit d’avoir une épreuve-phare et indispensable. Les IMOCA ont le Vendée Globe, les Figaro la Solitaire, les Mini la Mini-Transat… La course emblématique des Ultimes, c’est l’ARKEA ULTIM CHALLENGE-Brest. Nous avons cinq bateaux sur six à l’arrivée. Certes, on voit que les bateaux ne sont pas arrivés à 100% de leur potentiel. Il y a du boulot, mais du boulot sportif. Ce que l’on sait, c’est que cette course légitimise la classe, qu’elle est incontournable ».
Source : ARKEA ULTIM CHALLENGE - Brest