Cap sur l'évasion : à la découverte des destinations polaires

Sous les immenses dômes glacés de l’Arctique et de l’Antarctique, un autre monde s’ouvre à ceux qui osent s’y aventurer. Ces terres lointaines, pourtant parmi les plus hostiles de notre planète, offrent un spectacle à couper le souffle : fjords creusés par les glaciers, banquises où évoluent ours polaires et manchots, et nuits illuminées d’aurores boréales. Entre expédition et contemplation, le voyage polaire promet une expérience inoubliable. Mais cet éden blanc, aussi envoûtant que fragile, invite aussi à une réflexion : comment admirer sans dégrader ?

Naviguer dans les eaux glacées de l’Arctique, c’est partir à la rencontre de paysages bruts et fascinants. Le Groenland, par exemple, est une terre de contrastes : immenses fjords bleutés, glaciers titanesques et villages colorés comme Ilulissat, où les pêcheurs esquissent encore des gestes millénaires. Plus au nord, l’archipel du Svalbard, en Norvège, attire pour ses panoramas lunaires et sa faune incroyable, à commencer par les seigneurs de l’Arctique : les ours polaires.

Ceux qui cherchent l’insolite pourront tenter une navigation au nord de l’Alaska dans la mer de Beaufort, où la banquise dérive lentement, laissant apparaître un écosystème fragile : phoques annelés, morses et, si la chance est de votre côté, la silhouette rare de la baleine boréale.

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Expérience à bord : le confort des croisières d'expédition

Les croisières polaires ne riment plus seulement avec expéditions d’explorateurs robustes. À bord des navires de dernière génération, comme ceux de Ponant ou Quark Expeditions, les voyageurs profitent d’un confort digne des plus beaux yachts, tout en accédant à des zones inexplorées. Ces bateaux à propulsion hybride, souvent équipés pour minimiser leur impact environnemental, s’immiscent dans les glaces avec précaution, accompagnés de guides naturalistes pour une immersion totale.

Cap au Sud, vers l'Antarctique, l'ultime frontière

Si l’Arctique séduit par sa diversité, l’Antarctique, lui, hypnotise par son immensité. Sur ce continent vierge, aucune trace d’humanité, seulement une nature triomphante. Les îles Shetland du Sud ou la péninsule antarctique dévoilent des colonies gigantesques de manchots empereurs et Adélie. Les eaux qui les bordent abritent des orques et des phoques crabiers, glissant avec élégance sous les glaciers millénaires.

Pour les plus intrépides, une traversée du passage de Drake, ce mythique détroit reliant l’Amérique du Sud au continent antarctique, représente un rite initiatique. La mer y est souvent agitée, mais elle offre une transition grandiose vers cette terre de l’extrême.

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Manchot d'Adelie© Adobe Stock

Zoom sur le passage de Drake

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© Bloc Marine

Le passage de Drake est un détroit légendaire qui relie l’océan Atlantique Sud à l’océan Pacifique Sud, séparant la pointe sud de l’Amérique du Sud (le cap Horn) du continent Antarctique. Long d’environ 800 kilomètres, ce couloir maritime est un point de passage mythique pour les navigateurs, à la fois redouté pour ses conditions extrêmes et admiré pour la beauté brute de ses paysages. Il se situe au croisement des courants océaniques les plus puissants de la planète. Les eaux de l’océan Austral, qui encerclent l’Antarctique, y convergent sans rencontrer d’obstacles terrestres, générant des courants d’une intensité exceptionnelle. De plus, les températures glaciales de l’Antarctique rencontrent les eaux plus tempérées du nord, ce qui provoque des conditions météorologiques instables et souvent imprévisibles. Les marins doivent affronter des vagues colossales, pouvant atteindre 10 à 12 mètres de hauteur, et des vents violents dépassant les 100 km/h. Le Drake est un défi à relever pour les navigateurs les plus aguerris. Compétences techniques avérées en navigation, préparations physique et mentale, et robustesse du bateau seront les pré-requis.

- Courants et vagues : les courants circumpolaires antarctiques (jusqu’à trois nœuds) peuvent rendre la navigation très complexe, surtout pour les voiliers. Les vagues longues, typiques de cette zone, sont particulièrement déstabilisantes pour les bateaux de petite taille.

- Glace dérivante et icebergs : bien que moins fréquents dans la partie nord du passage, les fragments de glace et icebergs isolés restent un risque important, surtout par mauvais temps ou faible visibilité.

- Absence de ports-refuges : une fois engagé dans le Drake, il n’y a aucun port d’abri ou possibilité de repli avant d’atteindre l’Antarctique ou de revenir sur le cap Horn.

Le « Drake Shake » et le « Drake Lake »

Le passage de Drake est connu pour offrir deux visages très différents, selon les conditions :

- Le « Drake Shake » désigne la mer dans toute sa furie : vents violents, vagues monstrueuses et tangage incessant. Les marins décrivent souvent cette expérience comme un véritable baptême polaire.

- Le « Drake Lake » est la mer dans sa version plus clémente, avec des eaux relativement calmes et un ciel dégagé. Ce scénario, bien que plus rare, est un cadeau pour ceux qui traversent le Drake.

Un passage légendaire mais nécessaire

Malgré sa difficulté, le passage de Drake reste la voie la plus directe pour atteindre le continent Antarctique depuis l’Amérique du Sud. De nombreux plaisanciers considèrent le franchissement de ce détroit comme un rite initiatique, à la fois épreuve personnelle et exploration des limites de la navigation. « Traverser le Drake, c’est comme s’aventurer dans l’inconnu. Le sentiment d’isolement est total, mais c’est aussi là que l’on ressent toute la puissance de la nature », explique Louis, skipper amateur ayant navigué jusqu’à la péninsule Antarctique. Ce défi, une fois relevé, marque profondément les esprits et forge une humilité durable face à la mer.

Admirer pour mieux protéger : un tourisme polaire responsable

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Ours du Svalbard © Adobe Stock

Les régions polaires sont des écosystèmes extrêmement fragiles. L’empreinte humaine, même minime, peut y avoir des conséquences dramatiques. Pour limiter les impacts, l’Association internationale des tour-opérateurs de l’Arctique (AECO) et celle de l’Antarctique (IAATO) ont établi des règles strictes : nombre limité de passagers débarqués, interdiction d’approcher les animaux à moins de cinq mètres, ou encore retrait complet de tous les déchets.
Les croisières polaires s’inscrivent également dans une dynamique éco-responsable. Les navires récents utilisent des carburants moins polluants et adoptent des systèmes de traitement des eaux usées avancés. Ces efforts sont indispensables pour préserver la magie de ces territoires.

Les destinations polaires en autonomie

Pour les plaisanciers en quête de l’extrême, découvrir les régions polaires à bord de leur propre voilier ou bateau à moteur est une aventure unique. Cependant, se confronter aux eaux de l’Arctique ou de l’Antarctique demande une préparation rigoureuse et une expérience de navigation avancée. Les conditions météo imprévisibles, la présence de glace dérivante, et l’absence d’infrastructures portuaires exigent des compétences pointues et une vigilance constante.

Le Svalbard, par exemple, est une destination prisée des marins aguerris. Naviguer autour de ses îles demande une autorisation préalable et une connaissance approfondie de la cartographie polaire. Les plaisanciers doivent aussi être équipés pour faire face à des températures glaciales et à des risques comme les icebergs et les débris de glace. Les ports d’Isfjorden, comme celui de Longyearbyen, offrent un point de départ accessible, avec des infrastructures pour préparer un voyage plus profond dans l’archipel. Pour ceux qui envisagent l’Antarctique, les défis sont encore plus grands. La majorité des aventuriers partent d’Ushuaïa, en Argentine, pour franchir le passage de Drake. Toutefois, cette traversée mythique peut s’avérer éprouvante, même pour les navigateurs chevronnés. Les plaisanciers doivent aussi respecter des protocoles environnementaux stricts pour limiter leur impact sur cet écosystème vierge.

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Fjord Ilulissat© Adobe Stock

Préparation et équipements essentiels

Avant de larguer les amarres pour ces contrées extrêmes, un voilier ou un bateau à moteur doit être équipé pour les conditions polaires : chauffage performant, coque renforcée pour la glace, et systèmes de navigation hautement précis. Un dessalinisateur est indispensable, car les ressources en eau douce sont inexistantes, et une réserve importante de carburant est nécessaire pour pallier l’absence de points de ravitaillement.
La préparation ne s’arrête pas à l’équipement. Les plaisanciers doivent aussi étudier attentivement les marées et les courants, suivre les prévisions météo marines et être prêts à naviguer sans assistance pendant des jours, voire des semaines. Des formations spécifiques en navigation polaire sont proposées par des écoles spécialisées, comme celles en Norvège ou au Canada, pour préparer au mieux ces expéditions exigeantes.
Pour les amateurs souhaitant s’aventurer dans les régions polaires sans leur propre bateau, la location d’un navire est une option séduisante. Certains loueurs spécialisés proposent des voiliers ou des yachts motorisés adaptés aux conditions extrêmes. Ces navires, souvent accompagnés d’un skipper professionnel, permettent de vivre une expérience polaire authentique sans la responsabilité d’un bateau personnel.

Louer un bateau pour explorer les régions polaires

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Tromso, Norvege© Adobe Stock

Pour les amateurs souhaitant s’aventurer dans les régions polaires sans leur propre bateau, la location d’un navire est une option séduisante. Certains loueurs spécialisés proposent des voiliers ou des yachts motorisés adaptés aux conditions extrêmes. Ces navires, souvent accompagnés d’un skipper professionnel, permettent de vivre une expérience polaire authentique sans la responsabilité d’un bateau personnel.

Les bases de départ pour une location

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Moskenesoya iles Lofoten© Adobe Stock

En Arctique, plusieurs bases de location se trouvent en Norvège (Tromsø est un point de départ majeur), au Groenland, ou encore en Islande. Les voiliers proposés sont équipés pour naviguer dans des conditions froides et incluent souvent des guides ou naturalistes pour enrichir l’expérience. Pour l’Antarctique, les options de location sont plus rares et s’adressent à une clientèle d’expédition. Ushuaïa, surnommée « le bout du monde », est l’un des ports d’attache principaux pour ces voyages. Les yachts à moteur ou voiliers spécialement conçus pour la glace, comme ceux de la flotte Iceberg Charter, offrent des séjours sur mesure permettant de combiner aventure et sécurité.

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Ilulissat, Groenland © Adobe Stock

Que ce soit à bord de leur propre bateau ou d’un navire loué, les plaisanciers peuvent vivre l’évasion polaire de manière autonome tout en respectant les règles strictes de navigation et de protection environnementale. Naviguer dans ces eaux extrêmes, c’est non seulement se mesurer à la nature dans ce qu’elle a de plus grandiose, mais aussi participer activement à la préservation de ces territoires uniques. Pour ceux qui rêvent d’un voyage où liberté et responsabilité se rejoignent, les destinations polaires offrent une aventure sans égale.

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L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…
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Titulaire d'un doctorat en Climatologie-Environnement, Cyrille est notre expert METEO CONSULT. Après avoir enseigné la climatologie et la géographie à l'université, il devient l'un des météorologues historiques de La Chaîne Météo en intégrant l'équipe en 2000. Spécialiste de la météo marine, il intervient également en tant qu'expert météo marine pour des courses de renommée mondiale, comme la Route du Rhum, la Solitaire du Figaro, la Transat Paprec...
Irwin Sonigo
Irwin Sonigo
Irwin Sonigo
Capitaine 200 et ancien embarqué dans la Marine nationale, Irwin Sonigo a exploré toutes les facettes de la navigation. Des premiers bords sur un cotre aurique de 1932 à la grande plaisance sur la Côte d’Azur, en passant par les catamarans de Polynésie, les voiliers des Antilles ou plusieurs transatlantiques, il a tout expérimenté. Il participe à la construction d’Open 60 en Nouvelle-Zélande et embarque comme boat pilote lors de la 32e America’s Cup. Aujourd’hui, il met cette riche expérience au service de Figaro Nautisme, où il signe des essais et reportages ancrés dans le réel.