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On embarque beaucoup de choses sur un bateau. On en emporte trop, le plus souvent. On commence par se munir de l’indispensable : le matériel de sécurité. La liste en est précise, mise à jour par les Affaires maritimes et disponible dans le Bloc Marine notamment. On inventorie et on se procure aussi l’utile : cordages, lunettes de soleil, jumelles, sac étanche, outillage, pare-battages, lampe-torche, couteau et tire-bouchon bien sûr, surtout s’il n’y en a pas sur le couteau. Un inventaire à la Prévert… C’est bien tant qu’on reste en mesure de retrouver tout ce qu’on a embarqué. Dans un petit bateau, en général, tout est en vrac dans un coffre. Dans un bateau plus grand, quand il y a plusieurs coffres, des placards et ce qu’on appelle joliment des équipets, ils sont en général, tous pleins. De l’indispensable et réglementaire, de l’utile et jusqu’au superflu. Des manilles, tous les bateaux en sont pourvus et de toutes tailles, mais il faut reconnaitre qu’elles ne servent pas toutes bien souvent. Des couteaux, il en faut un par personne, pas plus. Une, allez deux lampes-torches, parce qu’elles ne s’allument pas toujours quand on en a besoin. Une paire de jumelles, une corne de brume, une pompe à carburant, une nourrice au cas où, et un bidon d’huile moteur parce qu’on ne sait jamais… Un moteur pour l’annexe qu’on ne sort pas souvent et qui sans doute ne démarrera pas le jour où il aurait pu servir, ce qui n’est pas grave car on ne va pas loin et que les avirons sont à poste. Combien de moteurs n’ont jamais démarré que dans le garage… S’il n’est pas entretenu avec soin et mis en route de temps à autre, le moteur de l’annexe ne sera pas fiable. Autant ne pas l’embarquer à moins d’avoir à faire des navettes.
Alimentaire
Maintenant, le rayon alimentation. Il y en beaucoup trop, sauf pour ceux qui se lancent dans de grandes traversées dont on ne connait pas bien la fin. Mais pour les sorties à la journée et les croisières de quelques jours, on en prend en général bien plus qu’il n’en faut. Packs d’eau minérale alors qu’on en trouve dans tous les ports. Caisse de vin rouge bien que les taches qu’il fait soient difficiles à ravoir sur le gelcoat. Caisse de vin blanc si on prend des maquereaux. Caisse de rosé parce que c’est un vin de bateau. Packs de bières pour tous les goûts, jus de fruits de toutes les couleurs. Caisse de champagne parce qu’il se trouve toujours quelque chose à fêter… Plus des conserves, des œufs, de l’huile et surtout du beurre. En général, les trois-quarts des provisions reviennent au port parce que sur les autres bateaux, ils ont prévu aussi. Au bout du bout, cela fait beaucoup et cela fait du poids, l’ennemi de tout moyen de transport, surtout ceux qui flottent. Il faut se rappeler que les caisses isothermes ne sont efficaces qu’une petite journée s’il ne fait pas trop chaud et que les réfrigérateurs de bateau sont capricieux : trop froids, pas assez froids, gourmands en électricité sur du 12 volts. On jette encore plus de nourriture sur un bateau qu’à terre, personne ne peut en disconvenir et tout ça par peur de manquer…
Répertorier
Donc, sur un bateau, on en prend trop. Tout le monde est d’accord sur ce point, mais personne n’est d’accord sur ce qu’il faut laisser à terre. Alors le meilleur moyen de s’entendre est d’abord de tout noter le moindre objet embarqué et de lui trouver un emplacement définitif. Noter par ordre alphabétique tout ce qui entre dans le bateau. C’est très facile avec un téléphone portable. Si vous notez « jumelles », le mot trouvera sa place tout seul entre « jeu de cartes » et « lampe torche ». Noter aussi en face de chaque objet désigné une place qu’il doit retrouver impérativement chaque fois qu’il en est sorti.
Ainsi à bord où on a peu de moyens parce qu’on vit dans un espace restreint, on trouvera les moyens du bord sans avoir à tout mettre sans-dessus-dessous chaque fois qu’on en a besoin.

Les choses peuvent aussi se mettre sans-dessus-dessous parce que la mer s’est formée plus vite et plus fort qu’on ne l’avait prévu. Sur une puissante vedette de 12 mètres, un plaisancier a voulu passer près de la Ponte du Raz à mi-marée, au moment où les courants se rencontrent. C’est un marin expérimenté qui navigue dans les difficiles parages de Paimpol et des Héaux de Bréhat où la mer se creuse pour peu que les courants et le vent soient contraires. Ce jour-là, à l’approche de la Pointe du Raz, la mer est belle et la brise légère. Entre la pointe et la roche de Gorebella qui porte de phare de la Vieille, il y a bien assez de fond pour passer. Mais quand on passe par gros coefficient de marée, et à certaines heures, il faut considérer qu’on descend d'un étage ! On peut passer, amis dans quelles conditions… Notre ami, marin trop confiant ou plutôt trop intrépide cette fois, a pu refaire l’inventaire de ce qu’il avait embarqué : tout est descendu sur le plancher du cockpit et des cabines, à commencer par les enfants qui somnolaient dans leur couchette…
Ils ne se sont pas fait bien mal, et heureusement si on peut dire, qu’ils se sont affalés, car les parents s’en sont préoccupés et ont relativisé les dégâts causés par la confiture et les autres denrées tombées du frigo…