Le sel des Andes : héritage des Incas dans les salines de Maras 5/9

Culture nautique
Par Figaronautisme.com

À flanc de montagne, dans la vallée sacrée des Incas, s’étendent des milliers de bassins scintillants, accrochés aux pentes arides comme un damier géométrique et lumineux. Bienvenue à Maras, au cœur des Andes péruviennes, où l’on récolte depuis l’ère inca un sel d’exception : le Sel des Andes. Ce trésor minéral, issu d’un procédé artisanal ancestral, séduit aujourd’hui chefs cuisiniers, nutritionnistes, amateurs de terroir et voyageurs curieux.

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À flanc de montagne, dans la vallée sacrée des Incas, s’étendent des milliers de bassins scintillants, accrochés aux pentes arides comme un damier géométrique et lumineux. Bienvenue à Maras, au cœur des Andes péruviennes, où l’on récolte depuis l’ère inca un sel d’exception : le Sel des Andes. Ce trésor minéral, issu d’un procédé artisanal ancestral, séduit aujourd’hui chefs cuisiniers, nutritionnistes, amateurs de terroir et voyageurs curieux.

Un héritage millénaire : les salines de Maras
Situées à environ 50 kilomètres au nord de Cusco, à plus de 3 200 mètres d’altitude, les salines de Maras forment un paysage aussi spectaculaire que chargé d’histoire. L’origine de ce site remonte à l’époque pré-inca, mais ce sont les Incas qui ont structuré les terrasses salines telles qu’on les connaît aujourd’hui.
Au total, plus de 4 500 bassins en pierre et argile forment un véritable réseau hydraulique de montagne. L’eau, chargée en sel, provient d’une source naturelle appelée Qoripujio, dont les origines géologiques restent encore mystérieuses. L’hypothèse la plus répandue : il s’agirait d’un ancien océan souterrain piégé dans les couches rocheuses lors du soulèvement des Andes.
Chaque bassin est géré par une famille locale, souvent de manière communautaire et traditionnelle. Le site est aujourd’hui exploité de manière durable par la coopérative Salineras de Maras, qui regroupe près de 400 familles.

Avant de commencer votre lecture, ne manquais pas l'article sur l'or blanc des mers, retour sur l'histoire du sel à travers les siècles.

Voyage au cœur du sel : visiter Maras
C’est un lieu qui frappe dès l’arrivée : des milliers de bassins éclatants, suspendus entre ciel et montagne, sculptent la roche comme un immense miroir fragmenté. Ce spectacle minéral hypnotisant n’a rien de figé. Il vit au rythme du soleil, du vent, de la récolte, et de la mémoire collective des familles qui l’entretiennent.
Accessible en un peu plus d’une heure depuis Cusco — en voiture, en taxi ou via des excursions organisées au départ de la vallée sacrée — Maras est bien plus qu’une simple étape touristique. C’est une immersion dans un monde suspendu, où chaque geste perpétue une tradition vieille de plusieurs siècles. La meilleure période pour s’y rendre s’étend d’avril à octobre, pendant la saison sèche, lorsque les bassins sont pleins et que la lumière des Andes donne au sel des teintes nacrées, parfois rosées.
En longeant les sentiers qui serpentent autour du site, on profite de points de vue exceptionnels sur l’ensemble des salines. Des arrêts sont aménagés pour permettre aux visiteurs de contempler les terrasses depuis les hauteurs, mais aussi de descendre à leur niveau, au plus près des ouvriers du sel. Certains membres de la coopérative invitent les voyageurs à assister à la récolte ou à participer à des ateliers de tri. Ces démonstrations, bien plus que touristiques, transmettent un savoir ancestral avec humilité et fierté. Il est même possible de goûter différentes variétés de sel sur place, ou de discuter directement avec les producteurs. Tout autour, le paysage andin déploie ses contrastes : montagnes arides, champs en terrasses, villages aux maisons d’adobe. Maras n’est jamais isolée : à quelques kilomètres seulement, le site archéologique de Moray, avec ses terrasses circulaires mystérieuses, offre un autre témoignage de l’ingéniosité inca en matière d’agriculture de haute altitude. Et plus largement, la vallée sacrée déroule ses trésors : marchés colorés, ruines précolombiennes, artisans tisserands et hameaux quechuas où la langue, les gestes et les rythmes semblent inchangés depuis des générations.
L’entrée du site des salines coûte environ 10 soles (environ 2,50 €), une somme modique, mais essentielle, car elle contribue directement à soutenir la coopérative locale et à préserver ce patrimoine fragile. Visiter Maras, c’est donc bien plus qu’une escapade. C’est un moment suspendu, entre géologie et spiritualité, entre travail patient et beauté brute — une parenthèse dans le temps, à 3 200 mètres d’altitude.

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Un processus de récolte inchangé depuis des siècles
Le processus de récolte est un véritable ballet d’équilibre et de patience. Les familles remplissent manuellement les bassins à l’aide de petits canaux. Ensuite, sous l’action du soleil andin et du vent d’altitude, l’eau s’évapore lentement, laissant apparaître une couche de cristaux de sel. La première couche est souvent blanche, fine et croquante : elle est considérée comme la plus pure.
Selon la durée d’évaporation et la profondeur du bassin, différents types de sel peuvent être extraits :
• Sel blanc : cristallin et délicat, pour un usage quotidien.
• Sel rose : légèrement teinté en raison de sa richesse en fer, très recherché.
• Sel brun ou gris : plus humide, utilisé localement pour ses vertus médicinales ou cosmétiques.
Chaque récolte prend plusieurs jours, voire semaines, selon les conditions climatiques, ce qui confère au produit une rareté naturelle.

Une richesse nutritionnelle et gastronomique
Contrairement aux sels raffinés industriels, le Sel des Andes est non traité, non lavé, et non iodé artificiellement. Il contient naturellement du magnésium, du calcium, du fer, du potassium, du zinc et des oligo-éléments essentiels.
Sa saveur est douce, légèrement sucrée en fin de bouche, sans l’amertume parfois présente dans d’autres sels marins. En cuisine, il est souvent utilisé :
• En fleur de sel, à la fin de la cuisson sur des légumes rôtis, poissons ou viandes grillées.
• En sel gemme, à râper sur une planche ou à utiliser en cuisson lente.
• En sauce ou marinade, dilué avec des herbes andines (comme l’origan sauvage ou la muña).
De nombreux chefs étoilés, notamment en Europe et au Japon, vantent son élégance et sa texture.

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Où acheter du Sel des Andes ?
Aujourd’hui, le sel de Maras voyage bien au-delà des montagnes péruviennes. Il est disponible à l’international, notamment en France, où plusieurs boutiques spécialisées en produits d’épicerie fine proposent ce sel brut ou en cristaux. Issu de récoltes artisanales, chaque gramme est porteur d’un terroir unique.
Parmi les enseignes sérieuses et reconnues :
• Terre Exotique propose un sel rose de Maras en pot de 1 kg à environ 52 €, conditionné avec soin et traçabilité, destiné aussi bien à l’usage domestique qu’aux chefs.
• Place des Épices offre une version comparable, également en conditionnement de 1 kg, au tarif de 51,40 €, avec des informations précises sur la provenance et la méthode de récolte.
• Pour les curieux ou les amateurs de petites quantités, L’Île aux Épices vend des sachets de 50 g à 3,30 €, parfaits pour une première découverte ou pour un usage ponctuel à la table.
Il convient de noter que les prix peuvent varier selon les formats, les gammes (sel fin, cristaux, fleur de sel), et le conditionnement (sachets kraft, pots en verre, moulins intégrés). Le prix moyen au kilo pour un sel de Maras de qualité artisanale se situe entre 45 et 55 €, ce qui reflète à la fois la rareté du produit et le soin apporté à sa production.
On peut aussi trouver, dans certaines épiceries biologiques ou magasins de produits du monde, des petits lots conditionnés par des marques équitables, souvent importés via des filières certifiées, mais il est toujours conseillé de vérifier l’origine exacte et les conditions de récolte indiquées sur l’étiquette.

Le sel comme vecteur de culture
Le Sel des Andes ne se limite pas à son usage culinaire. Pour les communautés quechuas, il est aussi symbole de purification et d’abondance. Certaines cérémonies agricoles l’utilisent dans des offrandes à la Pachamama, la déesse Terre.
Les habitants racontent qu’un bon sel est un sel « vivant » : il réagit à la chaleur, à l’humidité, et même à l’ambiance du foyer. C’est pourquoi le sel de Maras est parfois conservé dans des sacs en tissu de coton brut, ou dans des jarres en terre, pour préserver ses propriétés.

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Un produit précieux, mais fragile
Le succès croissant du Sel des Andes attire inévitablement certaines convoitises. Des tentatives d’exploitation industrielle ont été rapportées dans les années 2010, incitant la coopérative à renforcer son modèle communautaire. Le gouvernement péruvien envisage d’ailleurs de classer les salines comme patrimoine culturel immatériel, afin de les protéger durablement.

Plus qu’un simple condiment, le Sel des Andes incarne une alliance unique entre terre, eau, soleil et tradition humaine. En le goûtant, on découvre un fragment intact de la mémoire inca. En le visitant, on touche du doigt la beauté sobre mais puissante des cultures andines. Et en le soutenant, on contribue à préserver un savoir-faire ancestral, transmis de génération en génération depuis les hauteurs du monde.

L'équipe
Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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