Transat Café L’Or 2025 : la course contre la dépression fait rage sur la route du Sud
LE FAIT DU JOUR. La flotte des Class40 bientôt à La Corogne
Certains skippers de la TRANSAT CAFÉ L’OR Le Havre Normandie vont donc poser pied à terre. Comme annoncé par la direction de course dimanche dernier, les Class40 feront escale à La Corogne. Objectif ? Se protéger d’une violente dépression qui va s’abattre sur toute la péninsule ibérique. « Il y a un premier front en milieu de journée jeudi et ça reste très perturbé vendredi », précise Pierre-Yves Guillerm, le météorologue de la course. Désormais, tous s’organisent donc pour assurer cette escale en Galice. Une partie de l’équipe logistique est déjà sur place et deux membres de la direction de course s’y rendent dans la soirée. « Les premiers devraient arriver demain dans la matinée entre 11 h et 12 h, précise Yann Château. La grande majorité de la flotte arrivera avant midi le lendemain. »
« Ce n’est pas facile à estimer, tout dépend de la longueur de la dorsale où nous sommes actuellement, on en saura plus dans la soirée », abonde Yannig Livory (Interaction). À noter qu’une attention particulière est portée par la direction de course aux quatre bateaux encore en Manche. Pour les autres, les regards sont tournés vers le nouveau départ. « Il pourrait y avoir une fenêtre entre samedi et lundi, les conditions de mer s’améliorent », explique Pierre-Yves Guillerm. Sur les monocoques, on se réjouit de cet arrêt qui permettra de se préserver face à la virulence du phénomène. « Le début de course a été assez éprouvant, j’ai dû attendre 24 heures avant de manger un plat chaud, l’arrêt va nous faire du bien », reconnaît Mikael Mergui (Centrakor Hirsch). « Moi je suis super contente d’aller en Espagne, assure dans un éclat de rire Aina Bauza Roig (Engie - Dessine-moi la high-tech). On va pouvoir se reposer et bien manger surtout ! »
LES TOPS. Le match des stratèges
Un temps, Francesca Clapcich et Will Harris (11th Hour Racing, IMOCA) étaient les sensations de la journée. À l’approche du cap Finisterre, alors que les IMOCA fusaient après avoir traversé la dorsale, voici le duo international qui parvenait à revenir puis à jouer des coudes avec le trio de tête. En tentant de filer vers l’ouest, les premiers bateaux tentent de se positionner afin de bénéficier d’un flux de nord-est afin de glisser en vent arrière par rapport à la dépression. Si Fransesca et Will ont impressionné, c’est tout le groupe de tête (Charal, Macif Santé Prévoyance, Allagrande Mapei, Association Petits Princes - Quéguiner) qui pourraient bientôt se réjouir. Leur stratégie pourrait leur permettre de creuser l’écart alors que le reste de la flotte risque d’être ralenti par une zone de molle au cap Finisterre demain matin.
Du côté des Class40, le passage de la dorsale dans le golfe de Gascogne a accaparé les esprits toute la journée. Chacun sa méthode et sa stratégie pour la franchir : un groupe s’est constitué à l’Est avec le leader SNSM Faites un don ! et un autre 30 milles plus à l’Ouest mené par Amarris. Les deux ont accéléré dans l’après-midi, creusant progressivement l’écart avec le reste de la flotte.
Les Ocean Fifty, eux, profitent de quelques degrés en plus, eux qui progressent à la latitude de Madère. « Ils ont un bon flux de vent qui leur permet de bien avancé », précise Guillaume Evrard à la direction de course. Chez les ULTIM, les forces en présence sont les mêmes même si SVR-Lazartigue a décidé de filer vers l’Ouest alors que Sodebo Ultim 3 persévère à l’Est.
LES PÉPINS. « Pas mal de bobos »
Alors que les marins s’apprêtent à passer une troisième nuit en mer, la fatigue se fait sentir et les pépins se multiplient forcément. Sanni Beucke s’est ainsi blessé au genou « après être tombée d’un matossage », confie sa coskippeuse, Sasha Lanièce (Alderan, Class40). « J’ai eu l’impression que quelque chose s’était cassé », raconte Sanni qui reste depuis assise dans le cockpit. À bord de Mon Bonnet Rose, Laurent Bourgues explique « avoir la crève » : « je ne sais pas trop ce que j’ai, ça ressemble à un petit Covid ».
Pour d’autres, c’est la technique qui joue avec les nerfs. À bord de Coup de Pouce, Manuel Cousin et Jean-Baptiste Daramy ont multiplié les réparations, sur le safran dans la nuit puis la grand-voile et la girouette dans la journée. « On a eu pas mal de bobos, de voiles déchirées, de girouettes qui se sont envolées... Plein d’aspects qui sont réparés au fur et à mesure », confie Guillaume Evrard de la direction de course.
LE POINT SUR LA SUITE. Les Ocean Fifty bientôt rattrapés
Alors que les Class40 sont donc attendus à La Corogne à partir de demain matin, les IMOCA, eux, poursuivent leur course et doivent donc se positionner face à la dépression qui va leur barrer la route. Il faudra également surveiller l’impact de la stratégie des bateaux de tête : en filant vers l’ouest toute la journée, ils pourraient mieux négocier le passage de la dépression et creuser l’écart avec le reste de la flotte. Devant, les Ocean Fifty devraient atteindre les Canaries dans un vent plus léger. Ils ne devraient pas être les seuls puisque les ULTIM vont les rattraper dans la nuit : SVR-Lazartigue pourrait ainsi être à la hauteur de Wewize demain matin. Enfin, il faudra surveiller la stratégie de Maxi Banque Populaire XI qui s’est fortement décalé vers l’ouest. Armel Le Cléac’h et Sébastien Josse cherchent à éviter de se retrouver face à la dépression et tentent aussi un coup afin de rattraper leurs camarades de jeu. Ce soir, ils pointaient à plus de 250 milles de SVR-Lazartigue.
L’ANECDOTE. Mathieu Blanchard et les bancs de dauphins
Afin d’expliquer les raisons pour lesquelles il a souhaité disputer la Transat Café l’Or avec l’ultra-trailer Mathieu Blanchard, Conrad Colman (MSIG Europe) expliquait qu’il voulait s’émerveiller à nouveau. Revoir le large avec des yeux de néophyte en somme et s’émerveiller de tout ce qu’offre la mer. C’est ce qu’il s’est passé dans la journée, alors que le binôme a repris sa course et progresse dans le golfe de Gascogne après une escale à Roscoff. Mathieu est à la proue du bateau et plusieurs dauphins s’amusent dans le sillage de leur monocoque. « Ce n’est pas si pire l’IMOCA finalement, il y a des moments de bonheur », s’amuse Mathieu. Conrad ne dit pas autre chose : « ça fait toujours plaisir d’être entouré par des dauphins, surtout après deux nuits très complexes ».

