Transat Café L’Or : la Martinique se prépare à accueillir les leaders, la course s’emballe à tous les niveaux
ULTIM : Dix pour cents
Les jours se suivent et ne se ressemblent pas en ULTIM. Avant hier, on sentait SVR Lazartigue menacé par Sodebo. Hier, c’est Sodebo qui voyait revenir sur ses talons Actual Ultim 4. Ce matin, la hiérarchie reste la même mais avec des écarts qui ont très sensiblement augmenté. Chaque gain au Sud après le Pot au Noir offrant plus de brise, l’élastique s’est tendu. Franck Cammas ne s’en excuse pas mais reconnait « ne rien avoir fait de spécial ! » « Le Pot s’est refermé derrière nous continue l’aixois. Sodebo a été un peu rattrapé, Actual est encore sous son influence et je ne parle pas de Banque Populaire...C’était un Pot au Noir un peu spécial. On dit que c’est risqué de passer dans l’Est du 28ème, on était tous dans une zone à risque, eux un peu plus que nous...»
SVR Lazartigue n’a donc pas attendu de dérouler son grand gennaker au passage des petits îlots de San Pedro et San Paolo, enroulés à l’heure de l’apéritif hier soir, mais a creusé l’écart au près avant la dernière marque de parcours, doublant son avance en une journée. De 80 milles en sortie de Pot au Noir, elle se portait à 173 au passage des îles et culmine maintenant à 185 (315 sur Actual), le plus gros écart enregistré depuis Le Havre.
Sachant qu’il reste moins de 1800 milles, il faudrait donc que Sodebo soit au moins 10% plus rapide sur le dernier tronçon vers Fort de France pour espérer contester le leadership de SVR Lazartigue. Pas simple car aux dires de Franck Cammas, c’est une navigation sur le fil du rasoir qui démarre: « Avec 400 m2 de J0 en l’air dans 15-20 noeuds de vent, on essaie de border au max et on est toujours à la limite de la tranche. Tu ne peux pas t’endormir sur le siège de pilotage, c’est sur Tu as deux trois réglages entre les mains, l’autre qui dort et la responsabilité du bateau. C’est un exercice d’équilibre, et il faut continuer à vivre, se reposer, s’alimenter...»
Dans cet univers de tension permanente, les deux leaders ont quand même trouvé le temps de faire un peu de drone hier au passage des îles ! Cette nuit, la montée de la lune qui grossit et sera presque pleine à l’arrivée sur Fort de France jeudi était bienvenue pour piloter au portant. Et dans 24 heures, SVR Lazartigue repassera déjà le Pot au Noir, « dans une zone très ouest qui préserve normalement des gros grains même si ça peut se lever très vite » dit Franck.
Dans l’habitacle confiné de SVR Lazartigue, les marins se concentrent sur le moment présent, pour ne pas faire d’erreur et maintenir leur matelas, de plus en plus significatif au fur et à mesure que les milles défilent.
IMOCA : Sur la tangente
Qui arrêtera Charal pouvait-on se poser la question hier, tant le plan Manuard semblait supérieur au portant dans l’alizé ? On a une partie de la réponse ce matin. Positionné plus Ouest mais aussi plus Nord que ses concurrents, Charal est venu buter dans ce que Jérémie Beyou appelle « une dorsale » et qui en fait un front qui se désagrège et vient perturber l’alizé. Peu importe la sémantique, l’IMOCA noir est venu se frotter le premier à cette barrière et a du empanner pour se recaler, perdant un tiers de son avance sur ses poursuivants Macif Santé Prévoyance et 11th Hour Racing qui avaient effectué la manoeuvre un peu plus tôt, conservant le vent établi plus longtemps. A propos d’Eleventh Hour d’ailleurs, on a appris que Francesca Clapcich et Will Harris avaient effectué dimanche après-midi leur pénalité de 30 minutes suite à la rupture du plomb de leur radeau de survie. Rageant pour le double mixte, leader aux Canaries mais qui reste sur le podium.
Les dernières 24 heures n’ont pas été de tout repos pour personne comme l’expliquait ce matin Jérémie Beyou à la vacation : « C’est l’inconvénient d’être devant dans ce genre de situation. Le vent a adonné plus que prévu, il a fallu changer de voiles, manoeuvrer pas mal. Ça fait 20 heures qu’on a lâché les quarts avec Morgan qui vient juste d’aller à la bannette ».
Le petit jeu des décalages dans le Sud qui va durer au moins 36 heures puisqu’il faut descendre encore d’environ 200 milles en latitude pour retrouver une alimentation correcte de l’alizé. « Le vent très Nord ce matin facilite un eu les choses dit Jérémie. On est toujours tenté de couper le fromage mais il faut aller dans l’Ouest avec des pincettes ! »
Les cinq premiers se tiennent encore en 100 milles et tout reste possible dans ce groupe alors qu’il reste encore 2000 milles à couvrir pour les IMOCA qui ne sont pas attendus avant le week-end. Plus loin dans la flotte, Café Joyeux et Fives Group lantana Environnement continuent de se livrer une belle bagarre pour le classement officieux des IMOCA à dérive et s’apprêtent à voir passer par leur travers Paprec Arkea. Treizième ce matin, le tandem Ricomme-Horeau qui est revenu au Havre en début de course peut tout à fait espérer se glisser dans le top ten d’ici l’arrivée.
Ocean Fifty : Recalages, recadrages
Cinq concurrents en moins de 60 milles à 1500 milles de l’arrivée, la course est belle chez les Ocean Fifty. Fidèle à sa stratégie, Edenred tient le coup et a vu ses poursuivants commencer à se recaler derrière lui, venant chercher dans le Sud qu’avait inversti dès le Cap Vert Manu Le Roch et Basile Bourgnon, un alizé plus consistant. C’est une bonne nouvelle pour le leader et Manu Le Roch ne cachait pas son soulagement à la vacation ce matin : « On est moins stressé. Les autres sont sur la même trajectoire que nous et on voit depuis hier qu’à conditions égales, on est au moins aussi rapide ». Bref, c’est à Viabilis Oceans, Solidaires en Peloton ou encore Le Rire Medecin Lamotte de provoquer leur chance. Que peuvent-ils faire ? « Appuyer plus sur le champignon, ce n’est pas facile car on est déjà tous au taquet. Ils peuvent se décaler dans notre Sud pour récupérer plus de vent sans doute ...».Voilà le conseil du matin d’Edenred à la concurrence ! Mais qui voudra lâcher sa position dans le petit groupe de poursuivants et prendre un risque qui pourrait coûter très cher au classement final ?
Les cerveaux doivent bouillir dans les cockpits des Ocean Fifty qui commencent à subir des conditions étouffantes par 15 degrés de latitude. « C’est difficile de dormir la nuit à l’intérieur quand le moteur charge confirme Manu Le Roch. « Hier, on a pris une douche en allant se tremper à l’avant pour se rincer ensuite à l’eau douce qui est comptée. On essaie de se protéger comme on peu du soleil, mais toute la matinée sous la véranda, c’est dur ! »
Class40 : Tous au front !
Le vent a pris un cran pour les Class40 qui progressent vers l’Ouest à bonne vitesse dans un vent de Sud d’environ 20 noeuds ce matin. Leader de la flotte au Nord, Seafrigo Sogestran n’était pas joignable et c’est son dauphin au classement qui commentait la situation. « Ça commence à secouer ! Le jour se lève, il fait gris et la mer est encore maniable et on avance à bonne vitesse » disait Corentin Douguet sur SNSM faites un don. Le vent va continuer à forcir au fil de la journée et à refuser, passant au Sud-Ouest. « On saura assez clairement les intentions de chacun après le front que l’on devrait passer la nuit prochaine. L’important pour nous à l’instant T, c’est de profiter de ces conditions de reachning propices à notre bateau pour accélérer et générer de l’écart ».
Des écarts pour l’instant assez faibles puisque les 10 premiers se tiennent encore en 15 milles, alors que la flotte s’étale déjà sur plus de 75 milles du Nord au Sud entre Andrea Fornaro- Alessandro Torresani (Influence 2) et Vincent Riou-Yann Doffin ( Pierreval-Fondation Good planet)
Les plus rapides sont en ce moment le groupe médian dans un jeu de placements où les leaders s’observent.
Une chose est sûre, les cirés vont rester de rigueur toute la semaine pour les Class40 qui vont faire du près, du reaching et négocier les bascules un bon moment avant de pouvoir ouvrir les voiles et glisser vers la Martinique. Avec le retour en course de Rêve à Perte de Vue-Qwanza, ce sont 40 Class40 qui progressent vers l’Ouest ce matin. Pour ces 80 marins, il est bien trop tôt pour parler d’ETA !
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