
On y accède à pieds à marée basse, au bout d'une plage de sable fin. Sur ce fort battu par les vents au large de Saint-Coulomb, en Bretagne, Léo Ferré composa certaines de ses plus belles chansons, comme La mémoire et la mer.
De 1959 à 1968, Léo Ferré vécut épisodiquement sur l'île, achetée grâce à une avance de sa maison de disques, en compagnie de sa deuxième femme Madeleine, de la fille de celle-ci, et de Pépée, sa guenon. Près de quarante ans plus tard, la demeure renoue avec son histoire grâce à la volonté de son actuel propriétaire d'y créer une résidence artistique. Uniquement musicale pour le moment "car la maison d'y prête", explique le maître des lieux, Serge Porcher. Mais, à terme, tous les arts pourraient y être les bienvenus. "En général, le lieu se prête à la création. Léo Ferré a acheté l'île spécifiquement pour y écrire des chansons".
La marée, force créatrice
"Quand mes parents ont racheté l'île, en 1996, la cage de Pépée, une immense cage en fer, occupait tout un côté de la maison", poursuit le propriétaire. La maison, longtemps bastion militaire, entourée d'un jardin peu entretenu mais luxuriant, que des palmiers et lavandes rendent presque méditerranéen, est fermée aux curieux mais ouverte aux amis. Deux fois par jour, la marée l'isole du monde extérieur."Quand la mer se referme, on laisse tout de l'autre côté, on ne pense plus qu'à la création", confie Corentin Chassard, un violoncelliste qui a séjourné plusieurs fois dans l'île et qui y organisera un festival de musique classique en juillet prochain. "On sent aussi qu'on est dans un lieu chargé d'histoire. Léo Ferré est toujours présent sur l'île, on y pense tout le temps", souligne-t-il.
Pour sélectionner les artistes, un appel à candidatures va être lancé. "Nous espérons faire venir de jeunes artistes, peu connus, pour qui la résidence sera l'occasion de se créer un réseau, ce qui est indispensable dans ce milieu", explique Isabelle Dacheux, présidente de la fédération EIFEIL (Éditeurs Indépendants Fédérés en Ile-de-France), chargée de la mise en place de la résidence. "Ce projet, c'est comme un héritage tardif de Léo Ferré", pour Serge Porcher, qui reconnaît malgré tout que le poète, à la fois humaniste et misanthrope, "n'aurait peut être pas apprécié l'initiative".