
L’absence de message de détresse de l’avion et la météo totalement standard laissent planer un grand mystère sur cette disparition.
La disparition du Boeing 777 de Malaysia Airlines, volatilisé entre la Malaisie et le Vietnam depuis près de trois jours, stupéfie les spécialistes qui ont tout de suite pensé au cas de l’AF 447 disparu au large du Brésil le 1er juin 2009 avec 228 personnes à son bord. Comme l'Airbus d'Air France, le Boeing 777 de Malaysia Airlines volait à son altitude croisière au FL350 (Flight Level, niveau de vol de 35 000 pieds) au moment du drame, mais c’est là finalement le seul point commun entre les deux accidents. En effet, à la différence de l’AF 447 le vol de la Malaysia était encore en contact radio et radar avec le sol, et à la différence de l’AF447 qui s’est écrasé dans le no man’s land de l’Atlantique sud après avoir traversé le Pot au Noir et que l’on a retrouvé 2 ans plus tard par 4 000 mètres de fond, le vol de la Malaysia a disparu par grand beau temps, probablement non loin des côtes ou en tout cas dans une zone à fort trafic maritime, et dans une mer peu profonde : environ 50 à 80 mètres de fond seulement.
Un accident sans indice
La disparition du Boeing 777 a rapidement rappelé celle de l’AF 447 pour laquelle les autorités avaient mis 6 jours à retrouver le moindre débris. Néanmoins, l’avion d’Air France avait émis des messages Acars (messages automatiques générés par l’avion) qui avaient aussitôt alerté sur un givrage des sondes Pitot. Le scénario du décrochage de l’avion avait alors vite été avancé par les experts sans qu’aucune preuve ne permette de l’affirmer alors.
Dans le cas du vol de la Malaysia Airlines, les seuls indices dont disposent aujourd’hui les enquêteurs sont pour l’instant que « l’altitude report » de l’avion a indiqué d’une façon soudaine la valeur zéro alors que cette valeur était stable à 35 000 pieds depuis que l’appareil avait atteint son altitude de croisière, soit depuis un peu moins d’une demi-heure.
La disparition soudaine d’un appareil en phase de croisière est rarissime. De mémoire d’expert aéronautique, il y a le cas du Boeing 747-100 de l'ancienne compagnie américaine « Pan Am », qui assurait la liaison Londres – New York. L’appareil explosa au-dessus du village de Lockerbie en Écosse et causa la mort de 270 personnes. L’enquête conclut en un attentat. Autre drame en plein vol : Le Boeing 747-131 du vol TWA 800, New York JFK - Rome Fiumicino, qui explosa au large de l'île de Long Island, le 17 juillet 1996. L’enquête conclut que c’est le réservoir central du Boeing qui avait explosé.
Une possible décompression explosive
La possibilité d’une décompression explosivefait partie des pistes envisagées : une perte soudaine de la pression dans une cabine ou un cockpit pressurisé, comparable à une explosion. Elle aurait l’avantage d’expliquer l’absence de concentration de débris, ceux-ci étant éparpillés sur une large zone puisque l’avion volait à plus de 10 000 mètres. «Ce type d’événement a des effets physiologiques importants tels que la diminution du taux d’oxygène dans le sang ainsi qu’un effet traumatique important sur l’équipage, explique un commandant de bord d’Air France. Mais tous les équipages de la planète ont été entrainés à faire face à ce genre de situation, à mettre leur masque à oxygène et à lancer une procédure d’atterrissage d’urgence ».
La piste d’une panne d’ADIRU
Autre piste, pour l’instant réfutée par Boeing : le problème de centrale inertielle déjà vécu en 2005 par un 777-200ER de Malaysia Airlines. Un bug de l’ADIRU (Air Data Inertial Reference Unit) avait entrainé un cabrage brutal de l’avion alors qu’il se trouvait à 10 000 mètres sous pilote automatique. Les pilotes avaient pu maîtriser l’appareil l’incident s’était soldé par quelques blessés légers. Le faiblesse de cette piste, c’est que la chute de l’avion jusqu’à l’impact a dû prendre plusieurs minutes – celle de l’AF 447 avait duré 3 minutes 30 – et que le transpondeur aurait dû indiquer cette chute au contrôle aérien qui aurait également dû être alerté sur le fait que l’avion avait quitté son altitude de croisière.
Quelles sont les chances de retrouver l’appareil ?
Malgré les difficultés rencontrées par les équipes sur place, les chances de retrouver l’appareil sont importantes, beaucoup plus que celles de retrouver l’AF 447. Le contact radar a été perdu vers 17:40 heure locale le 7 mars, soit après une heure de vol, et une demi-heure de vol à son altitude de croisière. Pour voir le début du vol 370 il suffit d’aller sur le site Flightradar, de cliquer en haut à gauche sur « playback », d’indiquer 2014-03-07 pour la date et 16h55 pour l'heure. On retrouve alors l’appareil ( MAS370) de son point de départ jusqu’à sa dernière position connue. L’appareil repose donc probablement dans une zone à proximité des côtes. En revanche, le périmètre de recherche est immense : les experts parlent d’ores et déjà d’un rayon de 1500 km.
La piste terroriste est-elle la plus probable ?
Les circonstances de l'accident interpellent les autorités. L'absence de message envoyé par l'équipage peut laisser penser à un événement brutal. D’autre part, les enquêteurs ont découvert que deux passagers européens, un Autrichien et un Italien, qui figuraient sur la liste des personnes embarquées dans l'avion, ne se trouvaient en réalité pas à bord. Les passeports de ces deux personnes avaient été volés en Thaïlande en 2012 et 2013, et ont visiblement servi à d'autres pour s'inscrire sur le vol. De même, le fait que l’appareil n’ait envoyé aucun message alors qu’il se trouvait à portée du contrôle aérien peut surprendre. « Les accidents aériens sont de plus en plus rares, explique un expert aéronautique, et quand ils surviennent encore, leurs circonstances sont de plus en plus extraordinaires. On peut s’attendre à un scénario hors norme dans le cas de cet accident».