
Deuxième épisode de notre série sur les navires mythiques: après le Santa Maria de Christophe Colomb, l'Hermione qui porta le marquis de La Fayette jusqu'en Amérique. La réplique du célèbre navire a été reconstruite dans l’Arsenal de Rochefort devant les yeux du public, sous l’impulsion de passionnés. Elle est prête à larguer les amarres.
Construite dans l’arsenal de Rochefort en 1778, non loin de la Corderie Royale, l’Hermione faisait partie, avec la Courageuse, la Concorde et la Fée, d’une série de quatre frégates. Appartenant à la catégorie de frégates dites légères, caractérisées par leur vitesse et leur maniabilité, l’Hermione était équipée de 26 canons tirant des boulets de 12 livres, d’où son nom de « frégate de 12 ». Longue de 44,20 mètres pour plus de 11 mètres de large, le navire original a mobilisé pour sa construction des centaines de charpentiers, forgerons, perceurs, cloueurs, calfats et bagnards pendant 11 mois. « L’Hermione est un bateau de guerre construit sur ordre du Roi Louis XVI en quelques mois. C’est sur cette frégate que La Fayette a embarqué pour apporter son soutien aux partisans de l’indépendance des colonies anglaises en Amérique du Nord », nous explique Isabelle Georget, chargée de mission au sein de l’association Hermione Lafayette. Le Marquis de La Fayette, qui s’était porté volontaire au service de la cause américaine, s’efforce d’obtenir le soutien officiel de la France et réussit à convaincre le roi Louis XVI et son état-major d’apporter une aide militaire aux troupes du Général Washington. Il embarque le 21 mars 1780 à bord de l’Hermione et part combattre aux côtés des insurgés américains qui luttent pour leur indépendance. Après 38 jours de traversée, il débarque à Boston et rejoint le Général Washington pour lui annoncer l’arrivée imminente de renforts français. « L’Hermione a fait toute la guerre d’Indépendance et a eu une destinée assez glorieuse. C’est d’ailleurs à son bord que s’est réuni le jeune congrès américain en mai 1781 », rappelle Isabelle Georget. De retour en Europe, la frégate sombre dans un naufrage au large du Croisic en 1793. « C’était un naufrage assez bête lié à une erreur de pilotage », précise-t-elle.
La reconstruction de l’Hermione, un travail de longue haleine
C’est au début des années quatre-vingt-dix qu’une équipe de passionnés décide de reconstruire sous les yeux du public ce grand navire en bois, témoin d’une période phare de l’histoire maritime française, tout en rendant hommage à La Fayette. « L’association Hermione La Fayette a été créée en 1992 avec le soutien de la Municipalité, souligne Isabelle Georget. Plus de 550 navires ont été construits dans l’Arsenal de Rochefort ». La reconstruction de l’Hermione débute en 1997, avec le soutien de la ville de Rochefort, mais également du département de la Charente-Maritime et de la région. « Il a fallu plus de cinq ans pour convaincre les collectivités et retrouver les plans du bateau », précise-t-elle. Après un parcours semé d’embûches, la reconstruction a débuté en juillet 1997. « On n’a pas retrouvé grand-chose des plans d’origine de l’Hermione. On avait quelques cotes en pieds, pouces et lignes mais pas le plan général du bateau. On s’est rapproché du Musée Maritime de Greenwich car les Anglais avaient capturé l’un des sisterships de l’Hermione pendant la guerre d’Indépendance. C’est à partir des plans de ce navire que l’on a pu reconstruire l’Hermione ». Une reconstruction quasiment à l’identique utilisant les mêmes matériaux et les mêmes techniques qu’autrefois. « On a fait quelques entorses afin que le bateau puisse naviguer en toute sécurité. À l’époque, le bateau était cloué. On a décidé de le boulonner. On a également installé des cloisons de bois pour garantir l’étanchéité du bateau, et obstrué les sabords de canons », indique Isabelle Georget. Des aménagements nécessaires vu que l’Hermione devrait refaire le voyage de La Fayette l’an prochain. Aujourd’hui, la reconstruction historique, financée à plus de 60 % grâce aux droits d’entrées des visiteurs, est terminée. « Nous installons dans la cale tous les équipements contemporains nécessaires. Les marins dormiront dans des hamacs et des bannettes », conclut-elle. Les premiers essais en mer auront lieu au large des côtes françaises en septembre et en octobre prochains. « L’Hermione partira aux États-Unis le 18 avril 2015 et reviendra à Brest en août 2015 avant de retrouver son port d’attache de Rochefort ». Au programme, 15 étapes en trois mois, dont dix aux États-Unis sur les traces de La Fayette et de ses troupes. Si rien n’est encore défini pour la suite du programme, la frégate pourrait refaire épisodiquement d’autres épopées lointaines, et pourquoi pas en Inde, où le bateau s’est rendu autrefois.