
Le procès, qui va durer jusqu’au 17 octobre, remonte le fil de la tempête de 2010 qui a fait 29 morts à La Faut-sur-mer, en Vendée. Un drame dont les causes se balancent entre mémoire collective perdue des inondations passées et phénomène météorologique rare.
Après le rappel des inondations répétées sur cette mince langue de terre au siècle dernier (1940, 1941 ou 1957), le président du tribunal a sévèrement mis à mal, en fin de journée, l'ancien maire René Marratier, qui peu après le drame répétait en boucle: "De mémoire de Fautais jamais une inondation ne s'est produite à La Faute-sur-Mer." Le président a fustigé l'ancien maire René Marratier et son "autisme absolu par rapport aux antécédents historiques" d'inondations. Face à lui, bafouillant mais têtu, René Marratier a maintenu qu'il ne savait pas, ou si peu... Pourtant dans l'histoire de cette commune, les agriculteurs qui choisirent de s'installer après la Révolution française sur cette langue de sable, coincée entre l'océan à l'ouest et l'estuaire du Lay à l'est, furent confrontés aux inondations. Et d'emblée, ils dédièrent ses parties basses régulièrement inondées au pâturage du bétail, a expliqué à la barre du tribunal correctionnel des Sables-d'Olonne Thierry Sauzeau, universitaire spécialisé dans l'histoire des constructions littorales, co-auteur de Xynthia ou la mémoire réveillée (2014).
La dangereuse table rase du passé
La digue construite au sud-est de la commune au XXe siècle, pour protéger ce bétail des submersions marines fréquentes, n’a pas empêché les inondations. Des événements qui ont laissé des traces importantes dans les archives départementales, a expliqué Thierry Sauzeau, même si la mémoire collective a eu tendance à les minimiser en raison des pertes uniquement matérielles. Et c’est justement la génération touchée par les inondations des terrains agricoles qui, dans les années 1960, avec l’essor du tourisme balnéaire, a enclenché les mouvements de construction. Une construction qui a gagné au fil du temps les pâturages inondables. Thierry Sauzeau a rappelé que la croissance des constructions fut exponentielle : 250 entre 1980 et 1990, puis 450 entre 1990 et 2000, avant de retomber à 250 entre 2000 et 2010. Et aucune tempête n'est venue troubler ce développement de 1957 à 1999. La tempête de 1999 ne causera pas non plus de submersion. Des dizaines d’habitants se sont donc installés dans les anciens pâturages inondables, sans connaître les risques auxquels ils s'exposaient. Or, dans la nuit du 27 au 28 février 2010, la commune connut un phénomène météorologique extraordinaire.
Un phénomène météo hors norme
Le drame de la tempête Xynthia est lié à une « concomitance exceptionnelle » de surcote marine liée à la tempête et à une pleine mer de coefficient 102. Les vents orientés au sud-ouest ont poussé une houle de 8 mètres dans le golfe de Gascogne. Cette dernière nourrissant ensuite des vagues extrêmement puissantes qui ont déferlé contre la digue. Un tel phénomène a 4% de risque de se produire dans la vie d'une personne, sur une durée de vie de 78 ans, relèvent les experts. « Il y a une chance sur 2000 chaque année de tirer une tempête de cette importance, voire plus importante. Et chaque année qui passe, la probabilité augmente », a précisé l’un de ces experts, Luc Hamm.