
C’est un temps que les moins de trente ans ne peuvent pas connaître, celui de la chasse au pain de glace à chaque escale. Quelle autonomie et quelle liberté l’arrivée du froid mécanique nous a données ! Bien sûr, les premières années, sa consommation électrique nous forçait à quelques heures de moteur pas toujours désirées. Mais aujourd’hui, le rendement des panneaux solaires modernes nous affranchit de cette contrainte, peu écologique il faut bien l’avouer. Pour peu que l’on optimise le nombre d’ouvertures quotidiennes, et que l’on soit équipé d’un matériel de qualité, bien isolé, le bonheur est dans le froid. Attention, par facilité linguistique, il est souvent évoqué par les constructeurs une option congélateur. Il ne s’agit en fait dans la très grande majorité des cas de conservateurs. Atteignant une température négative (moins 18°C théoriquement), ils permettent de conserver un aliment congelé sans limite de durée, ou de garder consommable quelques jours un poisson pêché à bord. Mais il ne descend pas à -30°C comme le fait un vrai congélateur, permettant la conservation quasiment ad vitam aeternam des produits ainsi traités. Quant au compartiment "freezer" des réfrigérateurs, il ne permet de conserver les aliments que de deux jours à quatre semaines, selon qu’il descend à -6°C ou -12°C.
Ensemble réfrigérateur et conservateur à tiroirs sur le Nautitech 44 Open© Photo François Tregouet - MULTImediaFrontal, vertical ou à tiroirs ?

Cette précision étant faite, le conservateur remplit parfaitement la fonction à laquelle on le destine en croisière : des menus variés et de qualité même après épuisement des vivres frais et lisser la consommation d’une pêche soudainement miraculeuse ! L’isolation, il ne faudrait pas l’oublier, est dans le cas d’un conservateur jusqu’à deux fois plus épaisse que pour un réfrigérateur. Aussi, pour un même volume disponible à bord, le volume utile varie sensiblement. Là où un réfrigérateur proposera 130 litres, un congélateur ne proposera que 95 litres utiles pour un même encombrement. Bien sûr, il y a longtemps eu le débat ouverture verticale ou frontale. La première permet théoriquement une moindre déperdition de froid. Mais son ouverture souvent prolongée, le temps de trouver, caché tout au fond, l’aliment recherché, vient quelque peu grever l’avantage attendu. Apparus plus récemment, les frigos à tiroirs proposent une solution aussi originale qu’intéressante. Avec une ouverture facile et un accès aisé au contenu, ils permettent de diviser facilement l’espace dédié aux vivres frais, de celui des boissons ou des légumes. Cependant, leur profondeur importante ne facilite pas leur intégration en seconde monte. Enfin, les portes frontales "comme à la maison" ont fini par devenir largement majoritaires dans nos cambuses. On trouve même sur les plus grands multicoques des réfrigérateurs domestiques, en 220V, qui offrent un volume incomparable et sont très bon marché. Techniquement, un parc de batteries un peu surdimensionné, un convertisseur dédié, et le tour est joué.
Réfrigérateur dans l'axe sur l'Ovni 400, pour que rien ne tombe à la gîte© Photo Alubat - DROpération portes fermées

Cependant, il ne faut jamais oublier qu’à technologie équivalente, la consommation électrique est dépendant du volume à réfrigérer ! De 300 Wh par 24 h pour un tout petit 30 litres, on passe ainsi à 440 Wh pour un plus classique 130 litres, et à 800 Wh pour un combiné réfrigérateur/congélateur de 200 litres. Par forte chaleur comme actuellement, un modèle dit "tropical" capable de supporter des températures extérieures jusqu’à 43°C serait idéal. Comme leurs grands frères "terrestres", ces différents formats reposent le plus souvent sur un système de refroidissement à condenseurs à air statiques. Quand la température extérieure monte, on l’a vu, la consommation grimpe en flèche et/ou… la température interne monte ! Alors, pour ne pas grever encore leur bilan énergétique, il faut dégivrer très régulièrement et optimiser le nombre d’ouvertures ! Si l’espace disponible est suffisant, il peut être intéressant de prévoir deux petits frigos plutôt qu’un grand. L’un amené à être ouvert le plus souvent sera dédié aux boissons et produits quotidiens. L’autre recevra les viandes, le poisson, les produits laitiers, qui nécessitent une température toujours constante, et ne sera ouvert que deux à trois fois par jour maximum.
L’eau fait la différence
Longtemps, la technologie eutectique a fait figure de panacée en termes d’économie d’énergie. La plaque se refroidit quand un surplus d’énergie est disponible, moteur en marche par exemple, pour restituer progressivement le froid tout au long de la journée. En fait, son rendement est très faible, proche de celui d’un pain de glace. La température d’un frigo doit se situer entre 4 et 6 degrés Celsius. Plus le delta avec la température extérieure est élevé, plus le compresseur devra tourner souvent et user des batteries du bord. D’où, l’intérêt de groupes refroidis à l’eau de mer. Trois solutions existent : soit un condenseur fixé sur la coque, soit une pompe de circulation d’eau de mer, soit une déviation du circuit de refroidissement dans un passe-coque. L’amplitude thermique de l’eau de mer étant bien moins élevée que celle de l’air, cette technique permet une production de froid même par très forte chaleur. Inconvénient majeur en revanche, si le bateau est à terre pour maintenance ou hivernage, ou tout simplement échoué à marée basse, plus de froid à bord.
Pour finir, rappelons qu’il y a un revers à toute technologie. Un groupe froid fait du bruit, plus ou moins selon les modèles, mais aussi et surtout en fonction de la qualité de son installation. Enfin, parce que, dans la nature, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme, un groupe froid produit aussi de la chaleur. Voilà deux bonnes raisons d’éloigner les groupes froids des cabines et protéger ainsi votre sommeil.