Où et quand François Gabart a probablement gagné le Vendée Globe ?

Par Eric Mas

L'atlantique a tenu ses promesses et a permis d'ouvrir le jeu. C'est sur le bon usage de la météo que la victoire doit se jouer.

Le 4 janvier François a pu prendre de l’ascendant sur son rival. Alors qu'ils ne s'étaient pas lâchés tout le long du parcours contraint par les portes des glaces autour de l’antarctique, la stratégie a pu reprendre le dessus.

 

 

Par 52S 54W, à l’est des îles Falkland, dans des vents d’ouest, au sortir d’une dépression, Armel Le Cleach choisit de serrer plus le vent et de remonter autant que possible vers le nord. Il maintient son cap pendant plus de 24h et enfonce le clou dans la journée du 5 en insistant sur un tribord amure qui, dans du vent de nord, le mène encore plus à l’ouest. Armel justifie son option en exprimant son analyse et son souhait de pratiquer une route moins engagée que celle de François pour conserver plus de liberté dans une situation qui s’annonce complexe.

 

Cette stratégie, qui est en fait une non décision, puisqu’il souhaite rester ouvert à toute éventualité, est basée sur le fait que les prévisions reçues à bord sont très changeantes donc peu fiables. Il est vrai que les dépressions et perturbations qui s’agitent alors entre le Brésil et l’anticyclone de Sainte-Hélène ont un comportement qui ne met pas à l’aise les modèles de prévisions numériques. Mais, puisque la dépression est féminine, le marin devrait garder à l’esprit le misogyne dicton « Souvent femme varie. Bien fol qui s’y fie ». Ne criez pas Mesdames, je ne récupère ce cruel scepticisme de François 1er que pour la beauté de la démonstration météo.

 

Alors qu’il sait qu’il y a beaucoup de près à courir dans du vent de N à venir, Armel se hasarde sur le chemin le plus court semblant oublier que la seule chose solide sur laquelle il faudrait s’appuyer est l’anticyclone de Sainte-Hélène. En effet, si l’on ne peut pas se fier à l’évolution de la situation à court terme, ce qui est sûr c’est que « en moyenne » le vent de nord deviendra nord-est puis progressivement alizé d’est. Le régatier sait qu’il vaut mieux être au vent de l’adversaire c’est à dire, ici, le plus à l’est. Ce n’est qu’en fin de journée du 5 avec plus de 160MN (300km) d’écart latéral qu’Armel semble réaliser le danger. Trop tard.

 

En route vers les hautes pressions de Sainte Hélène, les rivaux tirent des bords presque parallèles. Aucun n’a d’avantage, mais tout le monde sait que lorsque le vent de nord commencera à donner un peu dans le nord-est, François aura gagné. Plus proche des hautes pressions il verra le premier l’état de la mer s’arranger, le vent devenir plus régulier et pourra allonger la foulée avant Armel. C’est ce qui se passe le 9 janvier.
Quand le 10 janvier à midi, François peut effectuer son dernier virement de bord pour remonter plein nord dans ce qui est enfin de l’alizé, Armel s’est aligné sur sa route, 130MN derrière. 130MN qu’il ne pourra même pas effectuer car, malchance en plus, le vent refuse déjà pour lui et il devra virer en ayant encore 50MN d’écart sous le vent. Le piège s’est définitivement refermé. Par rapport à l’arrivée aux Sables d'Olonne le retard n’est que de 90MN au moment où Armel vire à son tour. Mais il est sous le vent et doit serrer plus son près, donc être moins rapide !!!!

 

François a un angle au vent plus favorable. François s’échappe.

 

Bien sûr il peut se passer encore beaucoup de choses en Atlantique Nord, mais ce 13 janvier François a 250MN d’avance alors qu’il reste 4000MN à parcourir. Un avantage de 6% pour de tels régatiers, c’est énorme .
 

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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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