Un racer Ferrari aux enchères

Dans le cadre des enchères d’Artcurial Motorcars à partir du 7 février au salon Rétromobile à Paris, un magnifique et rare bateau de course à moteur Ferrari, l’Antarès II, sera proposé à la vente. Ce racer de 1954 est, à ce jour, l'un des trois seuls bateaux Ferrari en existence et l’unique exemplaire équipé d'un moteur à quatre cylindres.
Evènement majeur pour tous les amateurs d’automobiles anciennes, Rétromobile (du 5 au 9 février à Paris, Porte de Versailles) accueille également comme chaque année une vente aux enchères Artcurial qui conjugue tous les superlatifs avec notamment quelques 177 voitures d’exceptions dont dix dépassent le million d’euros, une quinzaine de moto et un bateau à moteur Ferrari. L’Antarès II est un racer (coque monoplace à trois points) commandé pour la saison 1954 des courses par le pilote helvético-italien Augusto Schapira au chantier Guido Abbate. Ce constructeur emblématique a été fondé en 1946 sur le lac de Côme avec, dès l'origine, une orientation « racing ». En quelques années, Abbate a déjà battu huit records du monde de vitesse dont deux avec des moteurs Ferrari V12, conquis entre 1951 et 1953, sans compter d'innombrables victoires en circuit.
Le catalogue de la vente Artcurial précise que « les formes de l’Antarès II sont originales pour un racer italien car fortement inspirées par les lignes des racers américains du début des années 1950, tels que les Lauterbach qui dominaient la compétition aux Etats-Unis. Cette influence américaine se manifeste, entre autres, par un pont à deux niveaux avec des lignes tendues et très marquées contrairement aux bateaux italiens généralement plus arrondis. Sous la carène, le fond des flotteurs est lui aussi à deux niveaux pour favoriser l'arrivée d'air sous la coque et donc la sustentation. »
Côté motorisation, ce racer n’a pas opté pour un V12 propice aux records mais pour un 4 cylindres Ferrari et 2,8 litres de cylindrée. « Le dossier Ferrari d'origine indique que ce moteur fut monté à partir d'un bloc de 735. Sa puissance au banc était de 223 ch. à 6000 t/mn » nous explique Artcurial.
Une belle carrière sportive en Italie
La carrière sportive de ce racer Abbate a débuté le 20 juin 1954 sur le circuit de l’Idroscalo de Milan avec Augusto Schapira aux commandes. Pendant la course très disputée, le pilote devra abandonner en raison d'une écope de refroidissement d'eau cassée. Une semaine plus tard, les ténors de la classe des 2,8 litres, la catégorie reine à l'époque, se retrouvent à Turin. Ils ont pour nom Ezio Selva, Oscar Scarpa, Liborio Guidotti et Augusto Schapira. Son Antarès II termine à la troisième place, un bel exploit quand on considère la valeur et la longue expérience de ses opposants. Le 2 août 1954 a lieu la grande épreuve de Stresa sur le lac Majeur. Schapira resta longtemps en tête, n'étant finalement dépassé que par Selva vers la fin du Grand Prix. Le 12 septembre, le Championnat d'Europe se déroule à Campione d'Italia. Après une course mouvementée, Schapira termine une fois de plus à la troisième place, un exploit pour ce passionné. Au début de la saison 1955, la catégorie " M " des 2800 cc fut transformée en catégorie 2,5 litres d'un poids de 500 kg. Schapira continuera à participer à quelques compétitions en 1955 avec ce racer avant de quitter le circuit, trop occupé par sa carrière du textile. Au début des années 1970, il le vendit à un collectionneur italien d'automobiles.
« A l'époque, aucun amateur ne s'intéressait au passé des bateaux de course des années 1950 mais seulement à leurs moteurs prestigieux » précise le catalogue Artcurial. « De nombreuses coques ayant connu la gloire furent dépouillées de leurs moteurs afin de permettre la restauration de voitures de course telles que Maserati, Alfa Romeo et Ferrari. C'est ainsi que le moteur Tipo 700 d'Antares II quitta l'Italie, fit un passage par la France avant de partir en Angleterre. Il est probable qu'une Ferrari de sport ou monoplace du milieu des années 1950 ait été équipée de ce moteur ». Dans les années 1990, alors que la restauration des bateaux de compétition entra dans une phase active chez plusieurs passionnés d'automobile, le propriétaire d'Antarès II se décida à remettre un moteur dans sa coque. Il trouva dans le célèbre atelier Sport Auto de Diena & Silingardi à Modène un rare moteur de 553 F1 correspondant le mieux aux caractéristiques du moteur d'origine. Le moteur Ferrari qui équipe Antares II depuis plusieurs décennies est un Tipo 106, un quatre cylindres en ligne, développant 260 chevaux. Restaurée dans les années 90 en Italie, la coque Abatte/Ferrari entra ensuite dans une importante collection française d'automobile, dispersée il y a quelques années dans le cadre d'une succession. Le racer à moteur Ferrari F1 fut alors acquis par un passionné de la Scuderia basé dans le sud de la France. La valeur de l’Antarès II vendu aux enchères le 7 février est estimée aujourd’hui entre 400.000 et 600.000 euros !