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Figaro Nautisme. - Vous avez renforcé votre quatrième place ces derniers jours, sentez-vous que vous pouvez la conserver jusqu'à l'arrivée?
Alex Thomson. - Avec tous les problèmes que j'ai eus, je n'ai pas encore pu me concentrer à 100 % sur la course. Je n'ai pas trop fait attention aux concurrents à l'avant, je suis resté fixé sur ma course. Par contre, je suis très content de voir que je rivalise avec les bateaux de dernière génération et que les bateaux similaires au mien sont derrière moi.
Les deux bateaux de devant sont très rapides. Pensez-vous pouvoir refaire votre retard?
Armel (Le Cléac'h) et François (Gabart) ont des bateaux avec lesquels je ne peux rivaliser en vitesse pure. Je ne peux pas courir dans la même catégorie qu'eux en terme de vitesse, j'ai fait très attention à ne pas être attiré dans cette course-là. Je me concentre sur ma course et on verra ce qu'il se passe, le chemin est encore long.
Cela fait désormais 60 jours que vous avez quitté les Sables d'Olonne, qu'est-ce qui vous manque le plus?
Depuis que mes hydrogénérateurs ont lâché, ce qui m'a le plus manqué, c'est l'énergie. Je ne me connecte à mes outils informatiques que deux fois par jour pour les fichiers météo. Par conséquent, toutes mes communications sont limitées et donc les contacts avec ma famille me manquent ainsi que les appels avec mon équipe et mes amis. Le problème, c'est que l'énergie n'est pas seulement utile pour les communications mais aussi pour manger, pour désaliniser l'eau et pour tout ce qui est lyophilisé. Le chauffage est aussi limité. C'est une sorte de torture, j'ai toutes les capacités pour créer de la chaleur, mais je ne peux pas le faire. Ça rend les choses plus difficiles mais ça fait partie de la course.
Vous qui avez abandonné déjà deux fois, était-ce une satisfaction supplémentaire de passer l'Océan Indien qui est réputé pour casser les bateaux?
Absolument. Mais j'essaie de ne pas voir ma course comme une succession d'étape. C'est une course longue et difficile, mon but est de la finir. Je me rends compte que j'ai déjà passé des étapes significatives et je suis très heureux de ça. Pour autant, la grande satisfaction, ce sera de finir.
Vous sortez de l'Océan Pacifique, est-ce un soulagement?
En effet. Après avoir déjà démâté au milieu du Pacifique, je sais à quel point ce désert d'eau est dangereux. Le but, c'était d'atteindre le Cap Horn en un seul morceau et c'est chose faite. On ne gagne jamais la course dans les Mers du sud mais il est très facile de la perdre dans cette zone. Maintenant, il faut pousser fort pour rentrer en France, c'est une question de volonté.
Le Vendée Globe n'a jamais été gagné par les Anglais. Pensez-vous qu'il leur manque quelque chose?
Pour être honnête, je ne pense pas qu'il nous manque quelque chose. Pete Goss a fini 5e en 1997, Ellen (MacArthur) fait 2e en 2001 et Mike (Golding) prend la 3e place en 2005. Sam Davies a aussi fait du très bon travail lors de la dernière édition. Si vous comparez avec le nombre d'Anglais mais aussi avec le nombre d'étrangers du Vendée Globe ces dernières années, je pense que nous faisons vraiment du bon boulot.
Comment avez-vous passé les fêtes de fin d'année?
Ça ne ressemble jamais vraiment à Noël ou au Nouvel An quand vous êtes seul au milieu de l'océan. Mes communications étaient déjà endommagées donc je n'ai pas pu parler plus que ça avec les personnes à terre... J'ai tout de même réussi à avoir une petite discussion avec mon père et ma femme et c'était vraiment sympa. J'ai aussi ouvert mes cadeaux dont certains étaient vraiment pratiques. Il y avait aussi des chocolats et des sucreries...