
PORTRAIT : L’impétueux Alex Thomson (Hugo Boss) jure de se comporter avec modération pour son troisième Vendée Globe. Terminer l’épreuve sera donc son objectif premier.
Des multiples affectations de son père, pilote d’hélicoptère des lifeguards de sa gracieuse majesté, Alex Thomson garde en souvenir les railleries de ses petits camardes d’école se moquant de l’accent du nouvel arrivant. Pays de Galles, Irlande ou îles Shetland, aux tonalités abruptes, ont ainsi été ses premiers rivages où les côtes bien déchiquetées taillent un tempérament. A défaut d’air comme papa, le Gallois d’origine brasse de l’eau. Celle du Solent d’abord, puis celle du British Steel Challenge, course en équipage autour du monde contre les vents dominants qui le fait connaître comme skipper à 25 ans. Déjà bravache et se croyant immortel comme tout jeune de son âge.
Engagé pour sa troisième tentative pour chantourner enfin un beau parcours, le marin de 38 ans évoque sa carrière en dents de scie. « Il y a eu de belles performances comme mes deuxièmes places sur la Barcelona World Race en 2008 et sur la Transat Jacques Vabre 2011, ou encore mon record de la traversée de l’Atlantique en solitaire en 8 jours et 22 heures l’été dernier. Mais de toutes mes expériences, celle dont je suis le plus fier, est la remise en état de mon bateau par mon équipe il y a quatre ans. » Malheureusement, fâcheux arrière-goût d’échec. En effet, alors qu’il s’apprêtait à rentrer dans le port des Sables-d’Olonne quelques semaines avant le départ de la sixième édition, il heurtait un chalutier. Il réussissait cependant à se présenter sur la ligne de départ mais les réparations furent trop précaires pour continuer.
Repères
De la fibre de carbone déchirée, il y en a eu. Plus d’une fois il s’est fait tailler des costards pour son impétuosité… Un euphémisme. Malgré les multiples aléas, Hugo Boss, fidèle sponsor, est resté. « La première fois, j’avais investi 1 million d’euros avant de travailler avec eux. Conserver mon sponsor en le valorisant était donc ma priorité, avant la performance. Depuis, les choses se sont équilibrées » explique l’Anglais.
Alex Thomson a donc beaucoup appris de ses fortunes de mer. Ne pouvant construire un bateau cette fois-ci, il a choisi l’ancien Veolia de Roland Jourdain. Il ne le regrette en rien : « Il me plaît bien. Tout a été vérifié et revérifié. Le moindre boulon a son repère. Il y en d’ailleurs partout des repères. Cela fait gagner du temps lors de mes check-up quotidiens. Nous avons renforcé la structure en particulier au niveau du pied de mât. Toutes les transformations, bien calculées en concertation avec tous les membres de l’équipe, n’ont en rien altéré son potentiel. Il n’est pas le plus performant dans certaines allures mais il reste bon partout. Quand je regarde les nouveaux engins du plateau, où la légèreté a été recherchée au maximum, je me dis qu’ils ne seront certainement pas tous à l’arrivée ».
Finir
Vouloir arriver, c’est déjà avoir fait un bon bout de chemin. Leitmotiv de tous les recalés des éditions précédentes, prendre à rebrousse-poil les passes des Sables demeure l’ardillon sur lequel il souhaite s’accrocher. « Je pense que je me suis bonifié avec le temps. Je traîne une réputation de casse-cou mais je reste un compétiteur. Le but est de terminer la course, et s’il peut y avoir un bon résultat, tant mieux. La gestion du risque, je sais maintenant l’appréhender. S’il est petit, j’irai », essaye de convaincre le jeune papa.
Chasser le naturiste, il revient au bungalow dit-on. Il y a quelques semaines, son cousin lui a proposé de traverser le Goenland à pied. Le fonceur a dit ok mais en kitesurf pour battre un record. Toujours la vitesse et l’adrénaline en moteurs. Alex Thomson saura-t-il tempérer ses ardeurs sur les 24 000 milles du parcours ? Une autre paire d’Outre-Manche. Il faut le lui souhaiter. Pour pourquoi inscrire son nom au firmament, où pour l’instant, seuls des Français ont su s’imposer.