
La météo donne des cauchemars aux organisateurs de cette course multi-classes, déjà reportée de 4 jours en 2003 et de 3 jours en 2011. Au Havre, les skippers mordent leur frein en attendant un départ jeudi.
Dimanche, sur un port bousculé par les grains, les marins s’étaient conditionnés pour la baston. Ils avaient rangé leurs habits de terrien, préparé leurs bateaux au gros temps et certains étaient déjà couchés lorsqu’ils ont reçu le fameux SMS. Il était plus de 22 heures et la direction de course annonçait le nouveau report du départ prévu initialement dimanche puis lundi et désormais jeudi au plus tôt. Tout en précisant que cette prochaine fenêtre météo restait incertaine. « Ce soir mon sentiment principal est la frustration, a alors réagi Vincent Riou, skipper du monocoque 60 pieds PRB. En général, nous avons toujours réussi sur ces transats d’automne à trouver une solution pour partir et bien partir.»
Les équipages des voiliers Imoca, conçus pour boucler le tour du monde en solitaire du Vendée Globe, s’attendaient à une mise en jambes sportive mais ils ont été surpris par le report général. Seuls les rapides et instables multicoques, ainsi que les plus petits Class40, avaient exprimé leurs craintes. « Je jugeais les conditions de lundi assez difficiles mais faisables. En tout cas pour les meilleurs bateaux de la Class40, commente Sébastien Rogues, considéré comme favori sur GDF-Suez. Mais il ne faut pas oublier les amateurs qui ont moins d’expérience et des bateaux moins costauds. »
En partant lundi, les plus petits voiliers auraient été obligés de tirer des bords dans une mer croisée et un vent fort, à deux pas des cargos. À l’autre bout des pontons, les équipages de Multi-50 auraient pu rejoindre plus vite le large mais le moindre incident risquait de les faire chavirer. Là encore, les duos très différents n’ont pas pu trouver de position commune. « Nous savons bien que la direction de course fait ses choix en son âme et conscience, commente Erwan Leroux (FenêtréA-Cardinal). Si on nous avait dit qu’il fallait y aller, nous serions partis, quitte à naviguer en bon marin et aller faire escale dans un port si les conditions étaient trop mauvaises. C’est aussi cela, naviguer en bon marin : connaître et accepter ses limites . » Les 88 concurrents ont des fourmis dans les jambes et s’inquiètent de ne pouvoir conserver leur concentration jusqu’au départ. « Cela va être compliqué de ne pas sortir de la course », nous confie Sébastien Rogues, en voiture avec ses enfants pour une escale imprévue chez lui.
Une fenêtre météo étroite
La Transat Jacques Vabre, comme la Mini-Transat, paye des conditions actuelles délicates. « La fenêtre météo des transatlantiques est toujours étroite, rappelle Éric Mas, directeur de l’information pour La Chaîne Météo-Météoconsult. Il faut partir après les cyclones tropicaux qui se dressent sur la route transatlantique mais aussi avant que la situation automnale se corse sur les côtes européennes. »
Les organisateurs de la Transat Jacques Vabre doivent également tenir compte de la diversité des classes représentées. En effet, les Class40 naviguent deux fois et demie moins vite que les plus rapides des multicoques, les MOD70, et connaissent donc des situations météo très différentes. Un large créneau est donc nécessaire. Qu’en est-il de jeudi ? « Un répit assez marqué se confirme, observe Éric Mas. Nous prévoyons un vent de force 5 à 6 avec toujours une forte houle. Et, comme souvent après plusieurs jours perturbés, un dernier coup de vent devrait fermer la marche samedi. » Une tempête sur le golfe de Gascogne cueillerait alors les Class40…
Le casse-tête du départ de la Transat Jacques Vabre 2013 pourrait donc encore rebondir.