
Après Carthagène, Salvador de Bahia et le Costa Rica, c’est à Itajaí qu’arriveront les concurrents de cette 20e édition de la Transat Jacques Vabre après un parcours libre de 5.450 milles entre la France et le Brésil. Un parcours que nous présente Pascal Bidégorry, co-skipper du 60’ IMOCA Safran.
Ce nouveau parcours n’aura rien d’un long fleuve tranquille pour les 44 duos engagés sur la Transat Jacques Vabre. Si les conditions resteront très sportives, elles seront plus maniables que les jours précédents. Après avoir progressé sur un bord vers Barfleur puis dans un flux de sud-ouest vers Cherbourg, les bateaux verront le vent forcir dans l’axe de la route au passage du Cotentin. Il faudra donc tirer des bords pour atteindre la pointe de la Bretagne et Ouessant. Il faudra ensuite bien optimiser la trajectoire à Ouessant en prenant en compte le vent, la mer mais également le DST avant de négocier le golfe de Gascogne dans des conditions musclées, avec 30 à 35 nœuds de vent de secteur ouest avec de la mer. Selon Marc Guillemot, skipper de Safran, « il y aura forcément des coups à jouer, des décalages et des anticipations sur des changements de voile. Plus nous irons vers le cap Finisterre et plus le vent viendra de l’ouest voire du nord-ouest. À la frontière portugaise, nous devrions profiter des effets de l’anticyclone ». Une fois qu’ils auront trouvé la bascule les emmenant au portant, les bateaux devront se positionner assez ouest relativement tôt dans les alizés pour anticiper le pot au noir, avance Pascal Bidégorry.
Un pot au noir incertain
« Une fois dans le pot au noir, on peut avoir un peu de tout, pas de vent, des grains forts, de la pluie très forte et pas de vent, de la pluie très forte et beaucoup de vent juste derrière, ou éventuellement des petits grains qui n’ont pas l’air méchants mais qui sont ceux qui montrent le plus les crocs. C’est quelque chose d’assez imprévisible mais on a toujours nos fichiers de vent et on se sert des images satellites pour regarder les nuages qui se créent. Cette zone de convergence entre l’hémisphère nord et l’hémisphère sud et de vents qui s’opposent est très dynamique en matière de nuages. On peut avoir une zone sans vent mais très orageuse. Il y a beaucoup de cumulonimbus. Il pleut, il vente, tu ne peux pas trop prévoir ce qui va se passer. C’est une partie de l’Afrique où il fait très chaud. Il y a une grosse différence de température entre le continent et l’océan, précise Pascal Bidégorry. On va essayer de ne pas trop passer dans l’est. On l’a fait sur des transats en multi quand on devait aller virer l’île de l’Ascension. On acceptait de passer dans une zone très perturbée. Après la sortie du pot au noir, on va retrouver un flux d’alizés de sud-est. On sera au près serré et plus on se rapprochera du Brésil, plus le vent sera stable en force, avec 15-20 nœuds, 25 dans les grains. Les bateaux qui seront devant devraient accélérer et creuser l’écart. C’est un phénomène classique pour une arrivée à Salvador de Bahia. On sera sous l’influence de l’anticyclone de Sainte-Hélène jusqu’à Bahia. Là, la différence, c’est qu’on va passer la pointe de Cabo Frio au sud de Salvador où il y a une sorte de barrière météorologique qui fait que le vent n’arrive pas bien à rentrer. On entrera dans une phase de transition. Les 600 ou 800 derniers milles vont être influencés par un certain nombre de phénomènes en fonction de la route que l’on empruntera. Le classement pourrait changer avant l’arrivée ». Selon lui, « dans une transat comme celle-là, il y a six ou sept points névralgiques qu’il ne va pas falloir louper. Il faut être dans le bon timing, avoir la bonne trajectoire. À chaque fois, tu peux gagner ou perdre entre 10 et 20 milles. Tout a donc son importance, le premier virement de bord, la première nuit, la sortie de baie ».