
Après le chavirage de leur trimaran Arkema – Région Aquitaine le dimanche 10 novembre à 23h00, Lalou Roucayrol et Mayeul Riffet ont passé plus de trois jours et demi, à deux, dans les 4m² de la coque retournée de leur bateau. Mais le calvaire touche à sa fin. A midi, un remorqueur est arrivé au contact des deux hommes.
Ballotés par les vagues, risquant leur vie à chaque instant, Lalou Roucayrol et Mayeul Riffet ont fait preuve d'un incroyable courage pour attendre les secours, communiquant le moins possible pour préserver la batterie de leur téléphone satellite. "La structure du bateau - bras et flotteurs - est intègre, a assuré Lalou Roucayrol, lors d'un échange avec son équipe à terre. Même si nous ne savons pas ce qu'il se passe sous l'eau. Nous avons perdu les masques de plongée et nous ne savons donc pas dans quel état est le gréement du bateau." Les deux marins sont indemnes physiquement et ils ont pu utiliser les réserves d'eau et la nourriture installées dans la trappe de survie. "Nous occupons notre temps comme nous pouvons. On se parle beaucoup, on philosophe, on essaie de garder le moral. Sortir de la coque centrale est un peu périlleux car les vagues la submergent de temps en temps. Alors nous vivons recroquevillés à l'intérieur".
Il était inconcevable pour Lalou Roucayrol, skipper et armateur, de se faire secourir par hélicoptère et d'abandonner son trimaran en pleine mer. "Je suis un marin et je n'ai jamais abandonné un bateau, avait-il déclaré. Nous avons organisé une tanière à l'arrière du bateau, et nous avons la chance de ne pas avoir d'eau à l'intérieur". Son équipe à terre s'est donc lancée dans une course contre la montre pour coordonner les secours et affréter un remorqueur pour organiser le sauvetage. Un casse-tête logistique que l’équipe a réussi à mettre en place en 48 heures. Mais le chemin jusqu'au voilier a été considérablement ralenti par les conditions météorologiques: des vents à plus de trente noeuds, dans une mer formée avec des creux de quatre mètres.
Une manoeuvre incertaine
Les deux marins vont maintenant rejoindre le remorqueur hollandais West, où quatre membres de leur équipe à terre les attendent. A bord, ils organiseront le sauvetage de leur navire. "Soit nous essaierons de le remettre à l’endroit en pleine mer, soit nous le remorquerons à l’envers vers les côtes portugaises", a expliqué Lalou Roucayrol. Le retournement d'un trimaran n'a été mené avec succès qu'une seule fois par le passé. C'était en 2005 avec l’hydraplaneur d’Yves Parlier. La manoeuvre consiste à lester l’arrière du bateau, pour l’enfoncer dans l’eau, puis à fixer deux sangles à l’avant de la coque centrale du trimaran et enfin à tirer le bateau à faible vitesse. L’arrière s’enfonce ainsi dans la mer, grâce aux quatre tonnes de lest (ferraille coulée dans du béton), et le bateau se retourne doucement en faisant 180°. Dans le cas où la manœuvre réussirait, le remorqueur ramenerait le bateau à l’endroit, dans le port de Cascais. Mais il s'agit d'une manœuvre complexe, notamment dans les conditions de mer actuelles – houle forte et croisée – et sa réussite n’est pas garantie. En cas d’échec, le bateau serait également remorqué dans le port portugais, mais à l’envers sur près de 200 milles nautiques, avec le risque d’endommager davantage la structure du bateau