
Cette Mini-Transat 2013 marquera décidément les esprits par son orginalité. Après les péripéties liées au départ et au changement de parcours, la course connaît ce mercredi le deuxième abandon d'un de ses concurrents.
C'est une configuration inédite: Stan Maslard, le jeune skipper havrais de Groupe Sefico, abandonne pour la seconde fois sur une même course, la Mini-Transat 2013. L'allongement de la liste des avaries à gérer, la fragilité de certains postes cruciaux du bord comme le pilote automatique et la recharge de ses batteries, ajoutées à l'évanouissement de tout espoir de retrouver la compétition avec une tête de course désormais pointée à plus de 650 milles des Canaries, ont eu raison des velléités du marin. Stan Maslard avait pourtant fait preuve d'une persévérance à toute épreuve. Retour sur son parcours du combattant.
Acte I : Premier abandon
Comme les 83 concurrents de la Mini-Transat 2013, Stan Maslard s’est élancé une première fois de Douarnenez le 29 octobre dernier, après un report de 16 jours pour laisser passer un coriace ballet de dépressions automnales. Direction Lanzarote pour une étape avant la Grande Bleue et la ligne d’arrivée de Guadeloupe. Mais la mer était encore troublée par le passage de la tempête Christian au large de la Bretagne et, peu après le départ, Stan Maslard déplorait l’arrachement de la fixation du vérin hydraulique de son pilote automatique. Le jeune homme décidait alors de rebrousser le chemin pour bricoler en vitesse cette pièce de navigation essentielle. Il reprenait sa course à 13h45, bien décidé à revenir rapidement aux avant-postes de la course de ses rêves. Mais trois heures plus tard, la poisse frappait de nouveau. La fixation textile de son hauban tribord, ce câble vertical qui contribue au maintien du mât, rompait. Une pièce essentielle venait donc de lâcher, cabrant dangereusement son mât. Ce n’est qu’en empannant immédiatement que le skipper a réussi à éviter le démâtage. Bon réflexe ! En bon marin, Stan Maslard a donc sécurisé son bateau et repris le chemin du port. Le règlement de course autorise un arrêt technique de 36 heures : le temps est compté mais, à 19 heures, la nuit étend déjà son voile sombre sur le port et il est donc inutile de tenter une réparation dans la foulée. Une longue nuit s’annonce pour le skipper qui doit laisser là le bateau blessé qu’il a construit de ses mains. Stan Maslard, aidé de deux membres de l’équipe d’Arnaud Boissières, répare finalement son voilier le lendemain matin. Tout est enfin prêt. Mais là encore, le destin joue contre lui, sous la forme d’un violent coup de vent orienté au sud-ouest. Trop dangereux pour un léger voilier de 6.50 et son skipper solitaire. La direction de course lui intime donc l’ordre de ne pas repartir. La mort dans l’âme, Stan Maslard se décide donc à voir la course se dérouler sans lui.
Acte II : Le golfe de Gascogne par la route
Mais le destin est parfois capricieux : ce sont finalement ces conditions météorologiques défavorables qui lui permettent de reprendre la course. En effet, la direction de course a dû demander aux concurrents de rejoindre au plus vite la côte espagnole pour se mettre à l’abri. Le premier tronçon au départ de Douarnenez est purement et simplement annulé et, pour la première fois de l’histoire de la course, les skippers ayant officialisé un premier abandon peuvent reprendre la compétition. Aussitôt dit, aussitôt fait : Stan Maslard hisse son bateau sur une remorque et prend la route pour la côte espagnole avec deux camarades et le soutien de ses sponsors. Quitte à dormir sur son bateau une fois arrivé en Espagne.
Acte III : Un nouveau départ
Et l’attente est longue : l’automne se montre particulièrement coriace cette année. Le 5 novembre, soit près d’un mois après le départ initialement prévu, l’organisation officialise enfin une nouvelle procédure de départ. Mais c’est un coup de théâtre de plus : la Mini-Transat 2013 ne comptera finalement qu’une seule et même étape en route directe de l’Espagne à la Guadeloupe. C’est donc la plus longue étape jamais courue sur le circuit mini avec 3 600 milles à avaler. L’escale à Lanzarote, aux Canaries, est annulée mais les concurrents devront y virer une bouée et pourront s’y arrêter pour une escale technique. Cette nouvelle configuration oblige la majorité de la flotte en attente à Gijón, dont Stan Maslard, à un convoyage à plus de 200 kilomètres plus à l’ouest, jusqu’à Sada, où les cinq premiers de la première étape annulée les attendent. Le skipper Havrais accepte cette nouvelle configuration avec fatalisme : « Toute solution permettant de disputer cette Mini est bonne à prendre ». Le marin, échaudé par sa douloureuse expérience bretonne, est bien décidé à prendre le temps de s’amariner convenablement. « Je vais prendre tranquillement mes marques, assurait-il alors. Et surtout évacuer tout le stress de ces dernières semaines au profit d’un seul mot d’ordre, le plaisir ! »
Acte IV : Une traversée infernale
Une fois la course lancée, les concurrents ne peuvent pas communiquer avec la terre. La spécificité du circuit mini est de n’embarquer ni téléphone satellite, ni moyen iridium à bord. Juste une radio qui permet de communiquer avec les bateaux les plus proches et une balise embarquée pour demander de l’assistance à la direction de course. Sur la Mini, l’adage « pas de nouvelles, bonne nouvelle » prend tout son sens. Mais au fil des jours, la trajectoire de Stan Maslard est de plus en plus inquiétante. Et pour cause. Ce vendredi soir, le marin va devoir aller jusqu’à plonger sous son embarcation pour couper un bout pris dans le safran et qui maintenait son bateau couché. Stan Maslard est finalement arrivé exténué aux Canaries ce dimanche… pour ne plus repartir. « C'est une décision terrible à prendre et je me sens écrasé par un sentiment d'échec, témoigne-t-il. Mais la multiplication des épreuves depuis le vrai-faux départ de Douarnenez, la course contre la montre pour rejoindre Sada, la plongée traumatisante sous le bateau… tout cela pour un éventuel et inutile convoyage jusqu'en Guadeloupe, me pousse, avec l'accord très amical et compréhensif de mes partenaires, à arrêter les frais et à abandonner cette drôle de Mini Transat 6,50. »