
Bis repetita. Franck Cammas a remporté ce lundi le titre de marin de l'année pour la deuxième année d'affilée. Une performance inédite. C'est aussi la première fois qu'un vainqueur du Vendée Globe, en l'occurrence François Gabart, ne remporte pas le titre.
La foule des grands jours s’est pressée au théâtre Edouard VII, s’installant dans les allées une fois tous les sièges occupés. Il faut dire que le casting était alléchant après une année nautique forte en émotions. Difficile notamment - pour les 10.000 internautes consultés et le jury de 19 personnalités, présidé par l’acteur Charles Berling – de déterminer le second, entre deux coureurs au large, François Gabart et Yann Eliès. Mais c’est la saison hors norme de Franck Cammas, skipper de Groupama, qui lui permet de réaliser le doublé. Rien ne lui a échappé en 2013. Il a commencé l’année en remportant le championnat de France de match racing puis s’est imposé sur la quasi-totalité des épreuves du circuit en équipage M34. A tel point que sur Twitter, les internautes ont inventé le trait d’humour #cammasfacts au moment de son Tour de France remporté haut la main. En parallèle, Franck Cammas a également décidé de tenter la qualification pour les JO en se consacrant au catamaran mixte (Nacra 17) aux côtés de Sophie de Turckheim. Là encore, malgré une préparation écourtée, il réussit à s’imposer sur la Semaine olympique française à La Rochelle. Sans oublier sa victoire sur la petite coupe de l'America (Class C). Rencontre avec un marin de l’année insatiable.
Figaro Nautisme : Après un doublé inédit, il va falloir mener une très belle saison pour tenter le triplé. Comment se présente 2014 ?
Franck Cammas : Comme cette année finalement, je vais chercher à gagner des régates avant le titre ! Je vais consacrer une bonne partie de mon année à la préparation olympique car le maniement du bateau est nouveau pour moi. Avec l’équipe de France, nous partons en stage hivernal au Maroc. Mais je souhaite également participer au circuit des extreme sailing series avec une équipe française dont une bonne base vient de l’équipe de France de Nacra. Nous allons courir les huit régates prévues au programme mais je pense qu’on aura dû mal au départ car c’est une classe sur laquelle le niveau est très élevé et où on ne peut pas vraiment s’entraîner.
Vous ne cachez pas votre ambition pour la Coupe de l’America. Toutes ces courses vous aident-elles à vous préparer ?
Les équipiers de la Coupe de l’America sont majoritairement issus de l’olympisme, à l’image du tacticien d’Oracle Ben Ainslie, quadruple champion olympique. Or, c’est quelque chose qui me manque. Mais même si je ne me qualifie pas pour les jeux de Rio, oui, j’apprends plein de choses avec ces saisons de préparation.
Vous êtes sur le point de faire une annonce pour la Coupe de l’America. Pourquoi communiquer dessus dès maintenant ?
La Coupe, c’est peut-être avant tout une compétition technologique. Les spécialistes français du multicoque ont travaillé pour les deux équipes rivales de la Coupe de l’America 2013 (ils ont été récompensés dans le cadre de la soirée des champions ce lundi, ndlr). Or, l’urgence, c’est maintenant de garder nos cerveaux en France. C’est pour cela qu’on prévoit une annonce aussi tôt, pour avoir l’assurance d’aller au bout. Même si avant l’annonce d’un partenaire principal, rien n’est sécurisé. C’est encore très tôt pour les sponsors potentiels car l’organisation n’a pas encore dévoilé le timing ou les modalités donc nous ne pouvons pas encore établir de budget prévisionnel.
Votre sponsor, Groupama, pourrait-il s’engager sur la Coupe avec vous ?
Groupama me suit l’année prochaine et la suivante or je fais ce programme en vue d’une Coupe de l’America. Donc si le groupe n’a pas annoncé de participation à la Coupe, il me permet bien de mettre le pied à l’étrier. Mais ce n’est pas l’histoire d’un marin, seul vers la Coupe de l’America. C’est un équipage.
L’édition 2013 a fait de grands efforts pédagogiques. Avez-vous l’impression qu’une marche a été franchie ?
Oui, la dernière Coupe était une révélation par rapport à ce que la compétition offrait ces quinze dernières années. Nous avons assisté à un spectacle sportif extrêmement télévisuel, compréhensible par le grand public et non plus seulement par les amateurs de voile. Derrière mon écran, je réalisais la difficulté de l’exercice, nous pouvions voir les équipiers en équilibre précaire, gérer un système très complexe. La Coupe de l’America a toujours été la course la plus difficile à gagner mais ce n’était pas forcément perceptible. Désormais, elle est passée du monde du yachting – ce n’est pas péjoratif – au monde sportif professionnel. Et elle se joue dans un format, le multicoque, que nous connaissons bien en France.
Mais au-delà de la connaissance du support, nous avons parfois manqué d’unité en France. Qu’est-ce qui vous fait croire que cette fois-ci un team français pourrait fonctionner ?
Les premiers volontaires que nous allons annoncer cette semaine ont pour eux la légitimité, vous verrez. Et ce n’est qu’une première association, nous sommes ouverts à toutes les bonnes volontés. Il n’y a pas de querelle de chapelle car nous avons appris des erreurs du passé. Nous voulons porter une voix assez forte pour éviter que trop de projets différents se perdent dans la nature. Nous voulons montrer que nous serons sur la prochaine Coupe de l’America.