Route du Rhum 2022 : 40 ans de moments forts, deuxième partie

Par François Tregouet

La Route du Rhum a eu 40 ans en 2018. Si dans la vie on dit que le temps passe vite, il nous paraît plus long quand il faut attendre quatre années entre deux éditions. Pourtant que d’émotions fortes cette course folle nous aura fait vivre. En attendant le cru 2022 à destination une nouvelle fois de la Guadeloupe, et après vous avoir fait revivre les éditions de 1978 à 1994 dans l’épisode 1 de notre série, Figaro Nautisme revient les images fortes des six suivantes.

1998 – Laurent Bourgnon en démonstration, Ellen MacArthur en initiation

Les doigts d’une main suffisent à compter ceux qui ont remporté deux fois la Route du Rhum. Quatre ans après sa première victoire, huit après son podium derrière Florence Arthaud et Philippe Poupon, Laurent Bourgnon est l’un des grands favoris de la course. Nous sommes à l’apogée des trimarans Orma de 60 pieds et ils sont bien une demi-douzaine à pouvoir l’emporter au départ de Saint-Malo. Alain Gautier qui finit 3 heures derrière seulement aurait pu rafler la mise, tout comme le jeune Franck Cammas qui complète le podium. Mais Laurent Bourgnon a mis tout le monde d’accord, par ses choix météo judicieux, à bord d’un trimaran qu’il n’a eu de cesse de faire évoluer, véritable laboratoire évolutif au fil des ans pour le cabinet VPLP. Du classement unique un peu confus, réunissant monocoques et multicoques, qu’ils soient de 50 ou 60 pieds, deux noms attirent l’attention : un an seulement après avoir participé à la Mini-transat, Thomas Coville est le premier monocoque à Pointe-à-Pitre sur l’Aquitaine Innovations que lui a confié Yves Parlier accidenté, et Ellen MacArthur, sur l’ancien 50 pieds de Pete Goss, termine devant bien des bateaux plus grands. Une Anglaise et un surdoué à suivre…

 

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Thomas Coville et Ellen MacArthur en 2007© Jacques Vapillon

2002 – Et à la fin, s’il n’en reste qu’un…

L’organisation a bien choisi son année pour diviser la flotte en 6 classes distinctes. Résultat, le premier en Guadeloupe est une première. Il fallait suivre la petite Anglaise. Deux ans après un Vendée Globe de haut vol, et pour sa dernière course à bord de son 60 pieds de légende Kingfisher, elle remporte le classement Imoca et arrive devant les multicoques, il est vrai partis 24 heures plus tard. Mais surtout, la classe Orma des trimarans de 60 pieds a explosé en vol. Quinze abandons sur 18 partants, des bateaux retourné, éparpillés façon puzzle aux quatre coins du golfe de Gascogne, les images sont terribles. Le vent est monté à 75 nœuds, c’est d’abord l’apocalypse puis l’hécatombe. On frôle même le drame quand Jean Le Cam heurte de nuit, sans le voir, le Groupama de Franck Cammas retourné : « Mais qu’est-ce que tu fous-là ? » lance le breton abasourdi, à un Aixois qui ne l’est pas moins. Le plus malheureux d’entre tous est certainement le Suisse Stève Ravussin qui chavire à 800 milles de l’arrivée alors qu’il a 1800 milles d’avance sur le second. Celui-ci n’est autre que Michel Desjoyeaux, et si en plus du talent, il bénéficie d’un petit coup de pouce du destin, il ne se fait pas prier pour empocher à la barre du trimaran ‘Géant’ une victoire qui malheureusement sonnera le glas de ces bateaux. Marc Guillemot et Lalou Roucayrol complètent le podium. Il n’y aura pas de quatrième, tous les autres ont abandonné.

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2002 Franck Cammas Groupama© DR

2006 – Le bon choix de Lionel

Il tiendra longtemps le temps de référence établi par Lionel Lemonchois sur Gitana 11 en 7 jours 17 heures et 19 minutes. Il réalise une trajectoire parfaite en se positionnant dès le premier jour à l’avant d’un front qui le propulsera jusqu’en Guadeloupe. Pourtant ce sont peut-être deux bateaux rouges qui resteront dans les mémoires de cette édition. Le premier est un trimaran de 50 pieds, le Crêpes Whaou de Franck-Yves Escoffier. Vainqueur en 2002 sur un bateau de 20 ans d’âge, le Malouin dispose cette fois d’une véritable petite bombe dessinée par VPLP et construit chez les orfèvres de CDK. Il ne se loupe pas et signe un doublé qui ne souffre aucune contestation. L’autre bateau rouge (et bleu), c’est Sill et Véolia, l’Imoca Roland Jourdain. Arrivé quelques minutes seulement devant son compère et néanmoins concurrent Jean Le Cam, comme au bon vieux temps de leurs années Figaro, on ne peut que se réjouir de la victoire du très sympathique ‘Bilou’.

2010 – Le temps des géants

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2010 Franck Cammas Groupama 3© DR

Franck Cammas, s’est mis au vélo ! Non, ce n’est pas une plaisanterie, pour développer toute la force nécessaire et dompter les 32 mètres de Groupama 3, le surdoué de la voile s’est dit que ses bras n’y suffiraient pas. Il a beau avoir équipé d’un mât plus court (-3m), le modeste gabarit (1.7m) doit malgré tout, faire le travail habituellement dévolu à 10 équipiers. C’est ainsi qu’ils viennent de battre le record du tour du monde en équipage, portant le Trophée Jules Verne à 48 jours et 07 heures. Heureusement, Franck Cammas ne mettra que 09 jours et 03 heures pour relier St Malo à Pointe à Pitre, pour le retour des ultimes sur une course à nouveau éprise de liberté. Chez les Imoca, Roland Jourdain réalise le doublé, et Lionel Lemonchois s’offre lui la victoire en Multi50. Décidément, tout se que ce garçon touche se transforme en victoire ! Mais 2010, c’est aussi le succès grandissant de la Class40 qui voit son nombre de participants passer de 25 à 45 en 4 ans. Le vainqueur ? Un certain Thomas Ruyant. Nicolas Troussel est second et le quatrième s’appelle Sam Manuard. Skippers et architecte, ils font aujourd’hui l’actualité de la classe Imoca.

2014 – Peyron s’invite, Gabart confirme

A quoi tient une victoire ? À un accident domestique parfois. La victime en l’espère est l’infortuné Armel le Cléac’h. Trouver en quelques semaines, un marin capable de le remplacer et mener son Maxi Solo Banque Populaire VII, qui n’est autre que l’ancien Groupama 3, n’est pas chose facile. C’est simple il n’y en a sans doute qu’un. En vieux loup de mer plus qu’expérimenté, c’est Loïck Peyron qui s’y colle, et avec maestria en plus. En tête de bout en bout, il ne laisse que des miettes à ses adversaires, reléguant le second 14 heures derrière, en seulement un peu plus de 7 jours de course. Cette édition est décidément le temps des confirmations, car en Imoca, c’est François Gabart, vainqueur en titre du Vendée Globe qui s’impose. En Multi50 Erwan Le Roux fait le show quand du côté des Class40, c’est un certain Alex Pella, qui tourne actuellement autour du monde, à l’envers sur le trimaran « Use it again », qui l’emporte. Mais l’image la plus forte qui nous reste peut-être de cette édition, c’est Anne Caseneuve. Première de la classe hétéroclite sur son trimaran Aneo, ce sera sa dernière course. Un an plus tard, elle quittera les flots tôt, sans doute pour naviguer loin de nos yeux, mais pour toujours dans les cœurs.

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2014 - Anne Caseneuve© AFP

Dans notre prochaine parution, revivez l’édition 2018 avec un focus sur toutes les classes.

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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel
Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Jean-Christophe Guillaumin
Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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