Route du Rhum - Destination Guadeloupe : Sébastien Rogues, le skipper solitaire qui aime le collectif

Par François TREGOUET

Sur le plus ancien trimaran du plateau très relevé de la classe Ocean Fifty, il aimerait bien réaliser le doublé Route du Café / Route du Rhum. Mais conscient du bien commun, il est aussi sincèrement heureux de faire partie de cette classe qui a « des valeurs qui vont bien au-delà du pur aspect sportif ».

Sébastien, quelle est ton histoire avec la Route du Rhum ?

C’est avant tout un rêve de gosse, c’est LA transat la plus emblématique qui existe. Mon aventure personnelle avec la Route du Rhum a commencé en 2014, quand j’ai eu la chance avec mon Class40 de prendre le départ, mais je n’ai pas réussi à aller au bout. Donc, le premier objectif en 2022 c’est de finir et de voir la Guadeloupe se dresser devant les étraves de Primonial.

Tu cours en Ocean Fifty, le plateau peut-être le plus homogène et le plus relevé, comment tu te situes au sein de la flotte après ta victoire en double l’an passé sur la Transat Jacques Vabre ?

Je veux d’abord faire une Route du Rhum sans regret. Dans la performance il y a différentes choses, il y a bien évidemment le résultat en soi, et nous on part avec l’objectif de faire un podium, et plus si affinités, c’est une évidence mais le plus important c’est d’avoir tout donné et d’avoir navigué à son meilleur niveau. Si tout ça est respecté, je serai en capacité à faire une belle Route du Rhum, et après on sera dans le jeu de la régate, de la stratégie et là tout est possible. En multicoque, on a la capacité de mettre très rapidement de la distance avec des adversaires, ou de la voir fondre comme neige au soleil, avec en plus la possibilité qu’on se fasse un petit peu chahuter au départ. Il faut donc à la fois naviguer en bon marin car ce sont des bateaux qui sont excellents, et même incroyables, mais qui restent aussi les bateaux les plus compliqués à naviguer de la flotte : légers, rapides (4 à 5 fois plus légers que les Ultims, 2 fois plus petits) et nous sommes donc les multicoques qui pouvons le plus facilement chavirer. Il va donc falloir trouver le bon dosage.

Tu pars sur un bateau à la fois ancien, mais aussi très performant, comment le décrirais-tu ?

Ce bateau a tout le temps subi des évolutions, alors certes c’est l’un des plus anciens, mais peut-être aussi l’un des plus performants et c’est la magie de la jauge Ocean Fifty, cette capacité à avoir des bateaux qui durent vraiment dans le temps. On n’a pas apporté grand-chose au bateau depuis la victoire sur la Route du Café, en dehors du profilage du bras arrière, parce qu’aujourd’hui il est au top. Il était donc plus important pour nous de continuer à bien s’en servir, à le manier du mieux possible, ce qui est probablement un plus grand gage de performance que de passer des mois en chantier ce que nous avions fait en 2020. Je pars donc sur cette Route du Rhum avec le bateau dont je rêvais, en termes de fiabilité, de performance, et aussi en termes de connaissance et c’est important de partir sur une Route du Rhum avec un couple skipper-bateau qui se connaisse.

Et pourtant tu construits un nouveau bateau ?

Oui parce qu’aujourd’hui j’ai le sentiment que je tire la quintessence de ce que je peux tirer de ce bateau là et que certes on a un numerus clausus (NDLR : 10 bateaux maximum) au sein de la classe Ocean Fifty et mon bateau sera le dixième et viendra donc le clôturer avec cette dernière place à prendre. Mon bateau actuel ira à un autre et il fallait quelque part que ces dix bateaux soient construits pour que la classe soit complète. C’est un bateau que l’on va mettre sous les couleurs de Primonial pendant quatre ans, mais on va le faire évoluer, mais comme celui-là, il va avoir quinze ans de vie. Ce n’est donc pas seulement un bateau de plus, mais un bateau qui va entrer dans la grande famille des Ocean Fifty, que je vais commencer à éduquer, et qui ensuite trouvera de nouveaux parents.

Comment va s’organiser ta vie à bord sur ce bateau très volage ?

Alors les quatre sièges extérieurs sur lesquels je peux vraiment prendre la barre, je ne les utilise quasiment jamais, seulement lors du départ et les quelques instants magiques dans les alizés avec une nuit de pleine lune, sans nuages et des conditions de vent parfaites. Il faut dire qu’aujourd’hui on barre de moins en moins nos bateaux car les pilotes automatiques sont de plus en plus performants et qu’on a de moins en moins de temps de les barrer. On est plus dans les réglages, dans l’optimisation, que dans la conduite, et puis le reste du temps on essaie de se reposer. On passe beaucoup de temps à l’extérieur, en veille, entre les winches, mais aussi beaucoup à l’intérieur qui est un des endroits où on peut vraiment être au sec, et jamais à plus d’un mètre des écoutes ! Les plages de sommeil sont courtes mais il faut vivre avec le risque, et prendre ce que le bateau te donne en temps de sommeil. Le bateau est quasiment tout le temps sous pilote, mais ce qui est dur c’est une fois de pouvoir déconnecter et fermer l’œil et ce sont ces phases là qui sont extrêmement courtes, qui se comptent en minutes et il faut réussir à dormir entre 3 et 4 heures par 24 heures.

En Ocean Fifty vous êtes routés, comment es-tu organisé pour la météo ?

Notre cellule météo est composée de deux personnes : Pierre Quiroga, vainqueur de la Solitaire du Figaro et de Monsieur X (rires), quelqu’un proche du projet, mais qui n’est pas dévoilé, et qui nous accompagnera sur l’ensemble de la Route du Rhum. Soit ils m’envoient des fichiers et je lance mon routage, ou même parfois on reçoit les routages tout fait, avec les fichiers de vent dedans. Nous sommes en contact 24H/24, on échange toute la journée et toute la nuit, et les données du bateau sont envoyées toutes les minutes du bateau vers la terre pour qu’ils connaissent en permanence l’environnement du bateau. Pour la performance, la cellule est renforcée par Matthieu Souben, avec qui j’ai gagné la transat Jacques Vabre, qui connaît le bateau sur le bout des doigts, et Jean-Baptiste Gellée, qui est le boat captain, très fin connaisseur technique du bateau.

Temps de course estimé ?

On va dire une dizaine de jours, mais les premiers jours sont un peu « touchy », alors tu peux facilement perdre ou gagner trois jours !

Diaporama
Photo Arnaud Pilpré / #RDR2022
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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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METEO CONSULT est un bureau d'études météorologiques opérationnel, qui assiste ses clients depuis plus de 30 ans. Les services de METEO CONSULT reposent sur une équipe scientifique de haut niveau et des moyens techniques de pointe. Son expertise en météo marine est reconnue et ses prévisionnistes accompagnent les plaisanciers, les capitaines de port et les organisateurs de courses au large depuis ses origines : Route du Rhum, Transat en double, Solitaire du Figaro…