Pourquoi le record du Vendée Globe va être battu de neuf à dix jours ?

Par Figaronautisme.com

On le sait, tous les 4 ans, les postulants à la victoire sont des marins expérimentés, des skippers toujours mieux préparés, des compétiteurs à la motivation exacerbée. On le sait, tous les 4 ans, les nouveaux bateaux rendent presque obsolètes ceux de l’édition précédente. Le principal aléa reste la météo. L’édition 2024 met la barre très haut.


Portrait de deux champions :
Charlie Dalin a 40 ans. Il avait 6 ans quand il a tiré ses premiers bords sur Optimist. Depuis, il a toujours orienté ses choix de vie vers la navigation. Il a choisi de faire des études dans le domaine de l’architecture navale à la très réputée Université de Southampton, lui permettant d’allier la double compétence de marin et de technicien du voilier. Son attrait pour la course au large l’amène sur les circuits des Mini 6.50, des Class40 puis des IMOCA. Il a pratiqué assidûment la Solitaire du Figaro, meilleure école de régate au large, pour laquelle il est monté tous les ans sur le podium de 2014 à 2018. Il était le premier à passer la ligne d’arrivée du précédent Vendée Globe mais a laissé sa place de vainqueur à Yannick Bestaven qui bénéficiait d’une compensation de temps pour avoir porté secours à un concurrent naufragé.

Yoann Richomme a lui aussi 40 ans et lui aussi pratique la voile depuis sa tendre enfance. Il est lui aussi diplômé d’une école spécialisée dans l’ingénierie maritime (École Nationale Supérieure de Techniques Avancées Bretagne). Il a pris le tremplin de la Mini Transat avant de courir sur Class40 et remporter 2 fois la Solitaire du Figaro en 2016 et 2019. C’est sa première participation au Vendée globe.

Ces deux champions n’étaient pas favoris par hasard. Cependant les vainqueurs des précédentes éditions avaient des profils assez similaires et ils étaient tout aussi prédéterminés et déterminés. Vive l’expérience.

Des voiliers conçus pour l’exploit :
L’aérodynamisme global des bateaux, la conception des voiles et des mâts, se traduisent par toujours plus d’efficacité en termes de vitesse et de stabilité. Pour preuve, le record de distance parcourue en 24 heures est nettement amélioré à plusieurs reprises au cours de ce tour du monde. Si les carènes sont toujours mieux adaptées pour atteindre de grandes vitesses dans diverses conditions de mer, si les matériaux progressent et assurent des structures plus légères et plus rigides, ce sont surtout les nouveaux foils qui font la différence. Ceux de 2024 bénéficient de matériaux plus résistants et de formes plus efficaces pour optimiser la portance et limiter la traînée. De leur côté, les systèmes de pilotage automatique et de gestion de la vitesse sont plus sophistiqués et plus fiables.
Vive l’expérience.

La météo, l’arbitre des océans :
Pour améliorer le record, il faut les meilleurs bonhommes, les meilleurs bateaux, et un peu de chance avec la météo. On ne la choisit pas puisque la date de départ est fixée.

La descente de l’Atlantique nord, depuis les Sables d’Olonne jusqu’à l’Équateur, n’a pas été particulièrement rapide. C’est la faute de l’anticyclone des Açores. Après un manque de vent dans le golfe de Gascogne, après une descente assez rapide dans l’alizé portugais, les skippers ont souffert d’un anticyclone très étendu formant une barrière entre les latitudes des Canaries et du Cap-Vert. Ils ont ensuite pâti d’un alizé trop faible et d’un Pot-au-Noir qui n’a pas fait aucun cadeau. Charlie Dalin a mis presque deux jours de plus que son temps enregistré lors de l’édition précédente. C’est mal parti pour un record !

La traversée de l’Atlantique Sud a été plutôt bénéfique grâce à un anticyclone de Saint-Hélène qui ne s’est pas montré trop envahissant et une bonne concomitance avec l’arrivée d’une dépression sur le grand tapis roulant des quarantièmes rugissants. Le retard de Charlie Dalin sur le meilleur temps au passage du cap Bonne Espérance s’est réduit à une journée et quelques heures.

Au cap Leeuwin, Charlie Dalin et Yoann Richomme n’ont plus que 6 heures de retard sur Armel Le Cleach, le tenant du titre en 2017. Au cap Horn, ils auront 4 jours et demi d’avance. C’est donc bien dans le Pacifique que l’énorme différence s’est faîte. Dans l’ensemble, les conditions n’ont été ni pires, ni meilleures, mais les performances des bateaux ont permis une constance stupéfiante des vitesses moyennes très élevées, en particulier celles du bateau de Yoann. Charlie, lui, s’étant illustré par une option extrêmement pointue de la météo pour passer sur une route plus tendue, à proximité d’un centre dépressionnaire. L’un comme l’autre ont avalé le Pacifique en un temps de 14 jours et 9 heures qui restera dans les annales.

La remontée de l’Atlantique s’est faite sans coups d’éclat, péniblement comme à son habitude, avec une succession de calmes anticycloniques, de temps orageux dans des dépressions au déplacement difficilement prévisible, d’alizés mal établis...
Beaucoup d'aléas qui se traduisent par un temps de 12 jours et 5h pour Charlie Dalin. Boris Hermann avait mis 11 heures de moins, il y a quatre ans.

Enfin, il faut remercier la météo pour le retour sur l’Atlantique Nord. Un Pot-au-Noir discret, un alizé raisonnable, un anticyclone absent et juste une douce dorsale pour assurer la transition entre les vents de nord-est et ceux de sud, apportés par une lointaine dépression. Ces vents de sud ont été généreux juste comme il faut pour que les deux leaders aillent très vite vers la Bretagne. Seul petit bémol, le beau temps anticyclonique que les spectateurs ont commandé pour l’arrivée, beau temps frais qui se traduit par vent faible et un peu trop dans l’axe de la route pour que le sprint final. Moyennant quoi, le temps de parcours de 8 jours sur ce tronçon améliore de 3 jours le précédent record détenu par... Charlie Dalin, 4 ans plus tôt. Autant dire qu’il connaît le chemin.

En conclusion, on peut estimer que l’infaillibilité des skippers et l’excellente performance des bateaux ont permis d’exploiter au mieux des conditions météorologique qui ont été distribuées avec des cartes plutôt chiches lors de la descente de l’Atlantique Nord, assez standardisées dans l’hémisphère sud, et vraiment généreuses pour la remontée de l’Atlantique Nord. Il fallait bien récompenser les skippers les plus vaillants.

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Nathalie Moreau
Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
Max Billac
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Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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