
Au nord du canal du Mozambique, considéré comme l’un des hauts lieux mondiaux de biodiversité marine, le parc protège un écosystème d’une richesse exceptionnelle. Le lagon de Mayotte s’étend sur 1 300 km2 et se distingue par une double barrière récifale, phénomène rarissime puisqu’il n’en existe que dix au monde. À cela s’ajoutent 480 km2 de récifs coralliens, 700 hectares de mangroves, autant d’herbiers marins, et même des structures spectaculaires comme le banc de la Zélée et le volcan sous-marin découvert en 2018, à 50 kilomètres à l’est. Sorti du néant à 3 500 mètres de profondeur, ce volcan s’élève déjà de 800 mètres au-dessus du fond marin, rappelant que la région reste géologiquement active et imprévisible.
Une biodiversité hors normes mais sous pression
Cet écrin naturel accueille une faune emblématique qui attire autant les scientifiques que les amateurs de nature. Chaque année, les baleines à bosse quittent l’Antarctique pour venir mettre bas dans les eaux chaudes du lagon. Cinq espèces de tortues marines, dont la tortue verte et l’imbriquée, trouvent sur les plages de l’île des sites de ponte précieux, représentant déjà deux tiers du littoral. Les raies manta, les requins-baleines et une vingtaine d’espèces de dauphins, dont le grand dauphin de l’Indopacifique, complètent ce tableau foisonnant. Mais derrière cette richesse, les chiffres alertent : il ne resterait qu’une dizaine de dugongs dans les eaux mahoraises, vestiges d’une population décimée par la pêche. Même constat pour le crabier blanc, petit héron côtier qui ne subsiste qu’à travers cinq colonies.

Le lagon, miroir de la santé de l’île
La beauté de ces paysages masque mal la fragilité des écosystèmes. Les eaux de Mayotte subissent les conséquences directes d’une urbanisation rapide : manque d’assainissement, mauvaise gestion des déchets, surpêche et multiplication des activités nautiques. Les herbiers arrachés par les ancres, les coraux cassés par les plongeurs maladroits ou les moteurs trop proches du récif sont autant de blessures infligées à cet univers déjà vulnérable. Pour les scientifiques, la qualité de l’eau est devenue un indicateur majeur, un « baromètre » de la santé environnementale et sociétale de Mayotte.

La pêche, entre tradition et réglementation
La mer reste nourricière pour la population mahoraise. La pêche artisanale, souvent à la palangrotte depuis des pirogues ou de petites barques, rythme la vie quotidienne et alimente les marchés locaux. Mais la pression est forte : les ressources récifales s’épuisent et certaines espèces voient leurs stocks menacés. Pour y répondre, le Parc a mis en place une règlementation précise. Les tailles minimales de capture sont strictement encadrées, les quotas limités à 10 poissons par pêcheur solitaire ou 20 à plusieurs, avec un maximum de cinq individus par catégorie (mérous, capitaines, vivaneaux profonds, pélagiques). Des interdictions saisonnières complètent ce dispositif : les crustacés ne peuvent être pêchés entre novembre et mars, et la pêche au poulpe est proscrite entre avril et mi-juin. Certaines espèces sont totalement protégées : requins marteaux, napoléons, raies manta, hippocampes, bénitiers ou encore tortues marines.
Encadrer la plaisance pour sauver les coraux
La montée en puissance du nautisme impose aussi de nouvelles règles. Pour éviter l’arrachage des herbiers et la casse des récifs, le Parc a installé des bouées d’amarrage accessibles aux plaisanciers, avec une limite d’utilisation de 24 heures par bateau. Les instructions sont claires : aborder lentement, vérifier l’état du corps-mort, signaler toute dégradation. Les engins motorisés comme jet-skis, bouées tractées ou wakeboards doivent rester hors lagon, à plus de 300 mètres des plages et des passes. Quant aux mouillages sauvages, ils sont proscrits dans les zones protégées comme la passe en S, N’Gouja, Papani, Saziley ou autour de l’îlot Mbouzi.

Un espace marin aussi culturel que naturel
Au-delà de sa fonction écologique et économique, le Parc est intimement lié à l’histoire et à la culture mahoraise. Les habitants ont toujours vécu de la mer, mais longtemps sans conscience des limites de cet écosystème. Aujourd’hui, une dynamique citoyenne s’affirme : écoles, associations et pêcheurs réclament plus de connaissances et de formation. Parfois, la modernité rejoint la tradition : certaines pratiques ancestrales de pêche sélective ou de respect des saisons sont redécouvertes et intégrées dans la gestion actuelle.
Le Parc naturel marin de Mayotte est à la croisée des chemins. Il doit protéger une biodiversité mondiale, répondre aux besoins alimentaires locaux, encadrer le tourisme nautique et sensibiliser une population en pleine mutation démographique. L’équation est complexe, mais elle fait de Mayotte un véritable laboratoire grandeur nature, où se dessinent les contours d’une nouvelle façon de partager la mer. Entre bouées d’amarrage, interdictions ciblées, suivi scientifique et participation citoyenne, le modèle mahorais pourrait inspirer d’autres régions confrontées à la même équation : comment concilier exploitation et protection d’un patrimoine marin exceptionnel.
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