
Un modèle de pêche à bout de souffle
L’épuisement des stocks marins n’est plus une crainte abstraite, c’est une réalité. Selon la FAO, environ 35 % des stocks mondiaux sont surexploités. Des espèces emblématiques, comme le thon rouge ou la morue de l’Atlantique, ont vu leurs populations s’effondrer en seulement quelques décennies. Dans le même temps, la demande en produits de la mer explose, portée par une population mondiale en croissance et des habitudes alimentaires qui évoluent.
L’aquaculture est souvent citée comme la solution miracle pour répondre à cette demande sans continuer à piller les océans. Mais les fermes aquacoles intensives, notamment celles qui élèvent saumons et crevettes, sont elles-mêmes sources de pollutions et de déséquilibres écologiques : prolifération de maladies, pollution des fonds marins, introduction d’espèces invasives… Qu’est-ce qu’une aquaculture durable ?
Face à ces défis, des modèles alternatifs émergent. L’aquaculture durable repose sur trois principes fondamentaux :Réduire l’impact environnemental : Fini l’alimentation basée sur des farines de poissons pêchés en mer. Les filières durables misent sur des solutions innovantes comme les protéines d’insectes, les algues ou encore les végétaux.Réinventer les élevages : L’aquaponie, qui associe élevage de poissons et culture de plantes, limite les rejets polluants. Les fermes offshore, installées en haute mer, réduisent la pression sur les côtes et évitent l’accumulation de déchets.Optimiser les ressources : L’élevage multi-trophique intégré (EMTI) imite les écosystèmes naturels en associant poissons, coquillages et algues. Résultat : moins de déchets et une meilleure résilience des milieux marins.Des exemples concrets de réussite
Certains projets prouvent qu’un modèle plus respectueux des océans est possible.
En Norvège, où l’élevage du saumon est un pilier économique, des fermes en circuit fermé voient le jour. Ces systèmes limitent les rejets et réduisent le risque de contamination des populations sauvages.
En France, la ferme aquacole du Croisic développe un élevage multi-trophique associant bars, huîtres et algues, pour une production quasiment zéro déchet.
L’entreprise Ynsect mise sur les protéines d’insectes pour nourrir les poissons d’élevage, évitant ainsi la dépendance aux farines de poisson.
Les labels de qualité, comme ASC (Aquaculture Stewardship Council) ou Bio, garantissent des pratiques plus vertueuses et structurent progressivement le secteur.

Mais des obstacles persistent…Malgré les avancées, l’essor de l’aquaculture durable reste freiné par plusieurs facteurs. Produire de manière responsable engendre souvent des coûts plus élevés, ce qui se répercute sur le prix final des produits et constitue un frein pour de nombreux consommateurs. Par ailleurs, dans certains pays, le cadre réglementaire demeure flou, avec des normes environnementales encore insuffisamment définies. Enfin, même si l’intérêt du public pour les produits durables progresse, cette adhésion reste limitée par le prix et la difficulté à trouver ces produits sur le marché.

L’aquaculture durable peut préserver les océans en réduisant la pression sur les stocks sauvages et en adoptant des pratiques plus vertueuses. Toutefois, elle doit s’accompagner d’autres efforts comme la lutte contre la surpêche, la protection des habitats marins et la réduction des pollutions pour être réellement efficace.