
1. Hiver 2013-2014 : la saison où l’Atlantique s’est déchaîné
Entre décembre 2013 et mars 2014, la façade atlantique a enchaîné les dépressions explosives. Chaque semaine ou presque, une tempête nouvelle balayait la Bretagne, les Landes ou le Pays basque. Le 5 février 2014, la bouée des Pierres-Noires enregistre un record absolu : une vague maximale de 23,6 mètres, la plus haute jamais mesurée en France.
Pendant des semaines, les houles se sont succédé sans répit, creusant les dunes, submergeant les digues, brisant les enrochements. À Saint-Guénolé, la mer projetait des blocs de granit sur la route, et à Biarritz, les vagues frappaient la Grande Plage comme des coups de canon. C’est l’un des hivers les plus marins de mémoire d’homme, où l’océan n’a jamais laissé aux côtes le temps de souffler.
2. Ciarán, la tempête du siècle (1er-2 novembre 2023)
Venue du large de l’Atlantique nord, Ciarán a explosé sur la Manche et la Bretagne avec une violence que peu avaient anticipée. Les rafales ont atteint 207 km/h au cap de la Hague, un niveau rarement mesuré en France métropolitaine. En mer, les bouées CANDHIS ont affiché une hauteur significative de 13,6 mètres et une vague isolée à plus de 21 mètres.
Les quais de Brest ont disparu sous les flots, les digues de Saint-Malo ont été battues sans relâche et les navires de pêche réfugiés dans les ports ont encaissé des coups de boutoir toute la nuit. Même les ferries reliant la Grande-Bretagne ont dû suspendre leurs traversées. Au large, les capitaines parlaient d’un chaos liquide, avec des lames qui montaient plus haut que les mâts. Rarement la Manche aura dégagé une telle énergie brute.
3. Xynthia (27-28 février 2010) : quand la mer s’invite à terre
Xynthia n’était pas la plus violente en vent, mais elle reste l’une des plus dramatiques par ses conséquences. Ce week-end-là, une marée de vives-eaux coïncide avec une surcote exceptionnelle de 1,5 mètre, provoquant la submersion des zones basses du littoral atlantique. À La Rochelle-La Pallice, le niveau d’eau atteint 8,01 mètres, un record historique.
La mer a franchi les digues, envahi les terres et piégé les habitants dans leur sommeil. À La Faute-sur-Mer et à l’Aiguillon, l’eau s’est engouffrée à plus de deux kilomètres à l’intérieur des terres. Les vagues pénétraient jusque dans les jardins. Cette tempête a marqué un tournant dans la conscience du risque côtier en France, soulignant la fragilité des littoraux face aux combinaisons fatales entre houle, vent et marée.

4. L’« ouragan » d’octobre 1987 : la Manche sous le choc
Dans la nuit du 15 au 16 octobre 1987, une dépression d’une rapidité explosive traverse la Manche. Sur les côtes bretonnes et normandes, les vents dépassent 160 km/h et la mer atteint une surcote de 1,6 mètre. Les pêcheurs de Cherbourg racontent encore les creux de 12 à 14 mètres, invisibles dans la nuit noire, qui faisaient tanguer les chalutiers comme des bouchons.
À Saint-Malo, les quais ont été ravagés, et plusieurs ferries sont restés bloqués au port pendant des jours. Cet épisode, souvent oublié du grand public, a pourtant servi de référence aux ingénieurs et aux météorologues pendant plus de vingt ans. Il a démontré combien la Manche, pourtant souvent jugée "fermée", pouvait rivaliser avec l’Atlantique lorsqu’elle s’échauffe.
5. Gloria (21-23 janvier 2020) : la Méditerranée en colère
Habituellement épargnée par les grandes houles, la Méditerranée a prouvé en 2020 qu’elle pouvait, elle aussi, devenir monstrueuse. Gloria a frappé les côtes catalanes puis françaises avec une intensité rare : des vagues de plus de 8 mètres relevées au large, des surcotes, et des pluies diluviennes.
Les digues de Collioure, Sète et Port-Barcarès ont été balayées, des bateaux arrachés de leurs amarres, et les plages entières ont reculé de plusieurs mètres. Les habitants d’Argelès-sur-Mer ont découvert au matin un paysage méconnaissable : la mer avait tout remodelé. Cet épisode a rappelé qu’en Méditerranée, la mer monte plus vite qu’elle ne descend, et qu’une tempête d’hiver peut suffire à bouleverser la côte.
6. Darragh (7-8 décembre 2024) : la tempête de la nouvelle ère
Dernière en date, Darragh a frappé l’Atlantique avant de balayer la Méditerranée. Une trajectoire inhabituelle, signe de perturbations plus vastes. En mer d’Iroise, des vagues supérieures à 12 mètres ont été relevées, tandis que le cap Béar enregistrait des rafales à 184 km/h.
Les pêcheurs ont décrit une houle brève et hachée, d’une violence difficile à anticiper. En Méditerranée, les rafales ont balayé le golfe du Lion comme rarement observé en décembre. Darragh a rappelé que la fréquence des tempêtes "hybrides", touchant à la fois l’Atlantique et la Méditerranée, tend à augmenter : un signe inquiétant pour les décennies à venir.
Ces six tempêtes racontent une même histoire : celle d’un pays où la mer peut, en quelques heures, reprendre ce qu’elle avait accordé. Elles ont provoqué des records historiques : vagues de plus de 20 mètres, niveaux d’eau jamais atteints, vents d’ouragan. Mais elles ont aussi forcé les scientifiques à revoir leurs modèles, et les pouvoirs publics à renforcer la surveillance des côtes.
Car derrière chaque tempête, il y a une leçon : la mer n’est pas seulement un horizon. C’est une force vivante, imprévisible, capable du pire comme du plus grand spectacle. Et face à elle, la France ne peut qu’apprendre à composer avec la puissance de son propre littoral.
Avant toute sortie en mer ou journée sur la plage, consultez les prévisions détaillées de METEO CONSULT Marine pour connaître les conditions à venir sur nos côtes.
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