La folle cavalcade des deux leaders

Course au large
Par Figaro Nautisme

François Gabart et Armel Le Cléac’h continuent de dévaler l’Indien à une cadence élevée. Derrière c’est la Bérézina !

François Gabart et Armel Le Cléac’h continuent de dévaler l’Indien à une cadence élevée. Derrière c’est la Bérézina !

La folle cavalcade de François Gabart (Macif) et Armel Le Cléac’h (Banque-Populaire) prend des allures de triomphe dans la descente de l’océan Indien. En passe de franchir, vendredi à 16 heures, la longitude du cap Leeuwin à la pointe sud-ouest de l’Australie, les deux leaders séparés par 25 milles seulement bénéficient toujours d’un flux de sud-ouest bien établi qui les propulse entre 18,5 et 20,5 noeuds de moyenne. Un rythme que Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec) est incapable de suivre pour le moment. « Ce passage à niveau m’inspire un drôle de sentiment. Hier, j’étais en colère. Tu loupes le train à quelques milles près. Tu trouves cela injuste car tu navigues bien depuis le départ. Je ne fais pas d’erreur stratégique, je subis la météo. Aujourd’hui, je relativise. C’est rageant mais c’est comme cela ». Le double vainqueur de la Barcelona World Race concède désormais 332 milles au skipper de Macif.

 

Thomson et Stamm prisonniers des calmes

 

Derrière, ça tourne à la Bérézina pour Alex Thomson (Hugo Boss) et Bernard Stamm (Cheminées-Poujoulat) coincés huit degrés plus haut en latitude et qui doivent maintenir un cap à l’est, car sous le Britannique et le Suisse se trouve une large bulle anticyclonique qui les empêche de plonger vers le sud. L’écart qui les sépare de la tête de la flotte est respectivement de 541 et 631 milles.
Sixième, Jean Le Cam (SynerCiel) qui accuse 1 324 milles de retard au compteur a trouvé néanmoins une source de satisfaction dans son option prise dernièrement, en prenant une belle avance de 134 milles sur Mike Golding (Gamesa) et 324 miles sur Dominique Wavre (Mirabaud). « Je suis hyper content. Cette nuit a vraiment été extra. J’ai sorti la Rolls Royce du coup stratégique. J’attendais le classement de 5 heures avec impatience, comme un enfant devant un sapin de Noël. Est-ce que mon coup a marché ou pas ? J’ai passé beaucoup de temps à la table à carte à étudier les fichiers et les images satellite pour éviter les zones sans vent et trouver le trou de souris pour m’échapper. Là je suis vraiment heureux ».

 

LES VOIX DU LARGE

 

François Gabart (Macif) : « On a des conditions assez favorables pour aller vite. La mer est particulièrement difficile depuis hier mais le vent me permet de continuer à avancer. Ça fait des bonnes moyennes et ça me permet de gagner en longitude vers l’est assez rapidement. Je suis content de ce qu’on a vécu, on a eu un Indien plutôt facile, avec des bons vents et une mer dans le bon sens ».

 

Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec) : « Une autre course commence maintenant. La pression est légèrement retombée car tu n’es plus à la bagarre bord à bord. Tu te recentres sur toi et sur ton bateau. Tu récupères de l’énergie. Le point positif de la situation, après la longue chevauchée à plus de 20 nœuds, est que je peux inspecter le bateau sous toutes ses coutures. Le diable se cache dans les détails ! J’en profite pour l’entretenir et réparer les petites bidouilles pour la deuxième moitié de la course. J’ai retrouvé ma grosse éponge naturelle qui permet d’enlever l’humidité à l’arrière. Par contre impossible de remettre la main sur ma gamelle ! ».

 

Alex Thomson (Hugo Boss) : « J’ai eu droit à des conditions plutôt agréables ces 24 dernières heures. Il y a une bonne houle d’ouest donc ça glisse bien, pas de problème. Toute mon attention est monopolisée par l’ancien cyclone Claudia et par la façon idéale d’en profiter un maximum. J’utilise deux modèles météo – l’Américain GFS et l’Européen ECMWF – et ils sont à peu près d’accord sur ce qui nous attend au cours des 36 prochaines heures. Mais ensuite, certains détails diffèrent. En fait, j’ai surtout peur de ne plus pouvoir retourner dans le sud ensuite, mais c’est encore trop tôt pour le dire, les données des modèles ne sont pas encore exactes. Pour l’instant, je dois faire avec ce que j’ai et me concentrer sur ma façon d’appréhender Claudia. Je n’ai pas encore eu le temps de me consacrer à la réparation de mon safran mais je pense que le vent va mollir à partir de demain matin, et j’espère pouvoir m’y mettre à ce moment-là ».

 

Arnaud Boissières (Akéna Vérandas) : « Tout va bien à bord. J'ai bien pu me reposer avec cette journée d’hier bien chargée. Le bateau file bien ce matin avec une petite brise et des vagues joliment orientées pour faire des petits surfs bien sympathiques, mais bien humides tout de même : bottes et cirés obligatoires sur le pont du bateau mon capitaine ! Il fait bon, 19 degrés, je n’en reviens pas. En revanche cette nuit, c'était beaucoup plus frais (8 degrés) mais tout ceci est largement supportable ».

 

Bertrand De Broc (Votre Nom Autour du Monde avec EDM Projets) : « Ça s’améliore. On commence à bénéficier de vents portants assez bien établis. On devrait être sous ce régime pendant quatre ou cinq jours. En revanche, la mer est bizarre. On n’est pas porté par les vagues comme quand on navigue à des latitudes plus sud. On navigue très nord pour éviter les icebergs, mais du même coup il manque ce parfum d’aventure. C’est devenu une course vachement sérieuse (rires). Dans l’ensemble, ça va bien. Je prends de plus en plus de plaisir. Je me sens vraiment plus à l’aise, plus réactif dans mes choix de voiles. Je suis certain qu’avec le niveau de connaissances que j’ai maintenant de mon bateau, j’aurais pu parfois aller plus vite sur le début de course. Mais c’est la règle du jeu. Concernant ce premier mois de mer, c’est toujours un moment particulier. On entre petit à petit dans un autre rythme. Il faut rester très vigilant, car la fatigue commence à peser sans que l’on s’en rende forcément compte ».

 

Tanguy de Lamotte (Initiatives-cœur) : « Ça va super bien, il fait super beau. Il y a des albatros pas très loin derrière nous. Il y a encore de belles vagues, une belle houle, mais il y a un super soleil. J’ai pu dormir un peu dans la bannette et on approche de la porte Crozet. Je vais pouvoir la cocher ! Avec les portes qu’on a passé très nord, les conditions sont très sympas. Avec 20 nœuds de vent c’est plutôt cool, je pense que ça va se compliquer un peu dans le sud mais pour l’instant je profite et je ferai mon maximum pour prendre mes précautions et arriver aux Sables en février. Tous les jours je bats mon record de longévité en solitaire en mer. Je prends énormément de plaisir à passer ces 90 jours tout seul et de ne pas m’arrêter avant ».

 

Jean Le Cam (SynerCiel) : « Ma stratégie, je la construis sur le long terme avec des routages non pas sur la prochaine porte mais sur celle d’après. J’ai déjà la tête en Tasmanie ! C’est marrant. Je suis passé à 3 milles de Saint-Paul, apparemment il n’y a personne sur cette île mais j’ai vu des lumières alors j’ai pris mes jumelles. C’était un bateau en standby, à l’abri du vent. Un bateau d’exploration ou de pêche certainement. Quand on marche à 10 nœuds pendant que les autres sont à 20 c’est un peu embêtant mais ça changera après. J’ai entamé une bouteille pour le passage du Cap de Bonne-Espérance, je la finirai sûrement pour le 31 décembre. J’ai prévu une demi-bouteille par mois environ ! ».

 

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Dominique Wavre (Mirabaud) : « Je suis enfin bien reparti, j’avance au près avec environ 15 nœuds de vent. Je me situe désormais devant l’anticyclone, et la dorsale va encore me créer quelques soucis ce soir. Mais d’une façon générale, la tempête tropicale Claudia va étendre ses effets assez loin au sud et influencer les conditions ici aussi. J’ai véritablement subi la situation de ces derniers jours, mais je me disais sans cesse qu’il faut rester philosophe, que c’est comme ça et qu’il faut essayer d’en tirer le maximum. J’ai donc beaucoup barré ; je me suis aussi reposé, et j’ai fait beaucoup de travaux de maintenance. Résultat, je suis en pleine forme et le bateau va bien aussi, nous sommes prêts à affronter des conditions plus musclées ces prochains jours ».

 

CLASSEMENT

Positions du 14/12 à 16 heures : 1.François Gabart (Macif) à 13 684 milles de la ligne d’arrivée; 2.Armel Le Cléac´h (Banque Populaire) à 25,1 milles du leader; 3.Jean-Pierre Dick (Virbac Paprec) à 332,9 m; 4.Alex Thomson (Hugo Boss) à 441,6 m; 5.Bernard Stamm (Cheminées-Poujoulat) à 631,3 m; 6.Jean Le Cam (SynerCiel) à 1 324,8 m; 7.Mike Golding (Gamesa) à 1 458,4 m; 8.Dominique Wavre (Mirabaud) à 1 648,7 m; 9.Javier Sanso (Acciona 100% EcoPowered) à 1 949,8 m; 10.Arnaud Boissières (Akéna Vérandas) à 2 345,3 m; 11.Bertrand De Broc (Votre Nom Autour du Monde avec EDM Projets) à 2 745,9 m; 12.Tanguy de Lamotte (Initiatives-Coeur) à 3 066,8 m; 13.Alessandro Di Benedetto (Team Plastique) à 3 739,7 m. Abandons : Marc Guillemot (Safran); Kito de Pavant (Groupe Bel); Samantha Davies (Savéol); Louis Burton (Bureau Vallée); Jérémie Beyou (Maître CoQ); Zbigniew Gutkowski (Energa); Vincent Riou (PRB).
 

L'équipe
Nathalie Moreau
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Nathalie Moreau est l’atout voyage et évasion de l’équipe, elle est passionnée de croisières et de destinations nautiques. En charge du planning rédactionnel du site figaronautisme.com et des réseaux sociaux, Nathalie suit de très près l’actualité et rédige chaque jour des news et des articles pour nous dépayser et nous faire rêver aux quatre coins du monde. Avide de découvertes, vous la croiserez sur tous les salons nautiques et de voyages en quête de nouveaux sujets.
Gilles Chiorri
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Gilles Chiorri
Associant une formation d’officier C1 de la marine marchande et un MBA d’HEC, Gilles Chiorri a sillonné tous les océans lors de nombreuses courses au large ou records, dont une victoire à la Mini Transat, détenteur du Trophée Jules Verne en 2002 à bord d’Orange, et une 2ème place à La Solitaire du Figaro la même année. Il a ensuite contribué à l’organisation de nombreux évènements, comme la Coupe de l’America, les Extreme Sailing Series et des courses océaniques dont la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro (directeur de course), la Volvo Ocean Race (team manager). Sa connaissance du monde maritime et son réseau à l’international lui donnent une bonne compréhension du milieu qui nous passionne.
Il collabore avec les équipes de METEO CONSULT et Figaro Nautisme depuis plus de 20 ans.
Sophie Savant-Ros
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Sophie Savant-Ros, architecte de formation et co-fondatrice de METEO CONSULT est entre autres, directrice de l’édition des « Bloc Marine » et du site Figaronautisme.com.
Sophie est passionnée de photographie, elle ne se déplace jamais sans son appareil photo et privilégie les photos de paysages marins. Elle a publié deux ouvrages consacrés à l’Ile de Porquerolles et photographie les côtes pour enrichir les « Guides Escales » de Figaro Nautisme.
Albert Brel
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Albert Brel, parallèlement à une carrière au CNRS, s’est toujours intéressé à l’équipement nautique. Depuis de nombreuses années, il collabore à des revues nautiques européennes dans lesquelles il écrit des articles techniques et rend compte des comparatifs effectués sur les divers équipements. De plus, il est l’auteur de nombreux ouvrages spécialisés qui vont de la cartographie électronique aux bateaux d’occasion et qui décrivent non seulement l’évolution des technologies, mais proposent aussi des solutions pour les mettre en application à bord des bateaux.
Jean-Christophe Guillaumin
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Journaliste, photographe et auteur spécialisé dans le nautisme et l’environnement, Jean-Christophe Guillaumin est passionné de voyages et de bateaux. Il a réussi à faire matcher ses passions en découvrant le monde en bateau et en le faisant découvrir à ses lecteurs. De ses nombreuses navigations il a ramené une certitude : les océans offrent un terrain de jeu fabuleux mais aussi très fragile et aujourd’hui en danger. Fort d’une carrière riche en reportages et articles techniques, il a su se distinguer par sa capacité à vulgariser des sujets complexes tout en offrant une expertise pointue. À travers ses contributions régulières à Figaro Nautisme, il éclaire les plaisanciers, amateurs ou aguerris, sur les dernières tendances, innovations technologiques, et défis liés à la navigation. Que ce soit pour analyser les performances d’un voilier, explorer l’histoire ou décortiquer les subtilités de la course au large, il aborde chaque sujet avec le souci du détail et un regard expert.
Charlotte Lacroix
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Charlotte est une véritable globe-trotteuse ! Très jeune, elle a vécu aux quatre coins du monde et a pris goût à la découverte du monde et à l'évasion. Tantôt à pied, en kayak, en paddle, à voile ou à moteur, elle aime partir à la découverte de paradis méconnus. Elle collabore avec Figaro Nautisme au fil de l'eau et de ses coups de cœur.
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Max est tombé dedans quand il était petit ! Il a beaucoup navigué avec ses parents, aussi bien en voilier qu'en bateau moteur le long des côtes européennes mais pas que ! Avec quelques transatlantiques à son actif, il se passionne pour le monde du nautisme sous toutes ses formes. Il aime analyser le monde qui l'entoure et collabore avec Figaro Nautisme régulièrement.
Denis Chabassière
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Naviguant depuis son plus jeune âge que ce soit en croisière, en course, au large, en régate, des deux côtés de l’Atlantique, en Manche comme en Méditerranée, Denis, quittant la radiologie rochelaise en 2017, a effectué avec sa femme à bord de PretAixte leur 42 pieds une circumnavigation par Panama et Cape Town. Il ne lui déplait pas non plus de naviguer dans le temps avec une prédilection pour la marine d’Empire, celle de Trafalgar …
Michel Ulrich
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Après une carrière internationale d’ingénieur, Michel Ulrich navigue maintenant en plaisance sur son TARGA 35+ le long de la côte atlantique. Par ailleurs, il ne rate pas une occasion d’embarquer sur des navires de charge, de travail ou de services maritimes. Il nous fait partager des expériences d’expédition maritime hors du commun.
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