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Les deux leaders de la flotte ont fait un sacré coup hier en s’échappant du peloton. Près de 300 milles séparent ce vendredi midi le 1er du 3e concurrent.
L’état de la flotte
François Gabart (Macif) et Armel Le Cleac’h (Banque Populaire) naviguent en tête ce midi avec une vingtaine de milles d’écart et une vingtaine de noeuds de vitesse. « Ce sont deux profils de compétiteurs sur des machines similaires, spécialement conçues pour cette édition du Vendée Globe, analyse le champion en titre de course au large, Morgan Lagravière. Le bateau de François est juste un peu plus léger, celui d’Armel un peu plus solide, en fonction des choix des skippers. » Morgan Lagravière ajoute : « Cela ne doit pas être facile au niveau mental de se dire que même s’ils sont en tête aujourd’hui, rien n’est joué : la course est loin d’être finie. » En troisième position, Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec) a de quoi enrager après avoir perdu 200 milles en 24 heures : « Ce passage à niveau m’inspire un drôle de sentiment, explique-t-il. Hier, j’étais en colère. Tu loupes le train à quelques milles près. Tu trouves cela injuste car tu navigues bien depuis le départ. Je ne fais pas d’erreur stratégique, je subis la météo. Aujourd’hui, je relativise. La pression est légèrement retombée car tu n’es plus à la bagarre bord à bord. Tu te recentres sur toi et sur ton bateau. Tu récupères de l’énergie », souligne calmement le skipper niçois qui a déjà prouvé qu’il savait très bien remonter au classement après des aléas comme celui-ci. Il en profite d’ailleurs pour entretenir son bateau et réparer « les petites bidouilles » afin d’être paré pour la deuxième moitié de course.
Pour Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat) et Alex Thomson (Hugo Boss), l’addition est encore plus salée. La dorsale leur a littéralement barré la route. « Ils ont choisi de monter au nord », observe Eric Mas, directeur de l’information météo chez Météo Consult – La Chaîne Météo. « La mer y était plus confortable mais cette stratégie est plus risquée avec des bordures d’anticyclone à négocier » Hugo Boss négocie en ce moment sa descente vers la porte Australie Ouest.
Le trio des tontons flingueurs a affronté une situation également très corsée. Jean Le Cam est ce midi à 1300 milles du leader, Mike Golding à 1430 NM et Domique Wavre à un peu plus de 1600 NM de François Gabart.
Notre analyse météo
Les écarts se sont creusés entre les 5 navigateurs en tête de la course. Les deux leaders Gabart et La Cléach bénéficient de la meilleure configuration météo sous l’influence d’un flux de sud-ouest d’une vingtaine de nœuds. Après avoir franchi aisément la porte ouest Australie, ils continuer de progresser vers l’est avec des vitesses proches de 20 nœuds, en dépit d’une mer désordonnée. J.P Dick situé plus à l’ouest voit le flux de sud-ouest nettement faiblir, rattrapé progressivement par une dorsale. Il peine donc à rejoindre la porte ouest Australie et risque bien de se faire engluer dans la molle anticyclonique. Quant à Stamm et Thomson qui ont choisi de prendre une route nord pour éviter la dorsale et retrouver de l’air, ils ont nettement rallongé leur route et se trouvent maintenant à 500 milles des 2 leaders.
Pour le reste de la flotte, le groupe des trois emmené par La Cam, Golding et Wavre se situent dans le sillage d’une dépression tropicale nommée Claudia et naviguent au près dans des vents de sud instables et une mer difficile. Plus à l’ouest, le restant de la troupe est sous l’influence des vents d’ouest à sud-ouest en marge de dépressions circulant au niveau des 50ème rugissants. Il leur faut négocier le passage de fronts et des conditions de mer parfois difficiles. Ils progressent à une allure variant entre 10 et 15 nœuds.
Au cours des prochains jours, Gabart et La Cleach devraient garder, voire conforter leur avance puisqu’ils vont rester sous l’influence des vents portants de sud-ouest entre 20 à 25 nœuds pour se diriger vers la porte Australie Est. Les vents prendront tout de même un peu de droite pour s’orienter ouest dans la journée de dimanche. Ils devront alors faire quelques empannages avant de franchir la seconde porte Australie dans la journée de lundi.
Pour J.P Dick, les conditions météo s’annoncent nettement plus difficiles puisqu’il ne pourra échapper au passage d’une dorsale entre vendredi et samedi avec des vents faibles et même un risque de pétole pendant quelques heures. Il devra donc patienter avec de retrouver de l’air en marge sud de l’ex dépression tropicale Claudia. Les vents s’orienteront au sud-est, ce qui nécessitera une navigation au près pour se diriger vers la porte Australie Est.
Nos pronostics
Dans un contexte météo très différent des deux leaders, les milles de retard risquent fort de s’accumuler. Stamm et Thomson (Hugo Boss) pourraient d’ailleurs profiter de cette situation météo, difficile pour Dick, pour rattraper leur retard (comme le montre nos cartes de trajectoires ci dessous). Sous l’influence directe de la dépression Claudia, ils profiteront à l’avant de la dépression d’un flux d’ouest à nord-ouest modéré puis d’un flux d’est soutenu lorsqu’ils passeront dans le sud de la dépression. Ils devraient retrouver de bonnes vitesses de navigation et pourraient rattraper J.P Dick dès dimanche. Les grains orageux accompagnés de vents très instables pourraient toutefois être un handicap sérieux et les jeux sont loin d’être faits. Verdict lundi prochain…
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