
PORTRAIT : Son 60 pieds est un des plus aboutis du plateau. François Gabart (Macif), tête bien faite, savoure la chance qu’il a d’être au départ. Et il n’a pas fini d’étonner.
Il court vite le jeune homme. Une étoile mystérieuse mais n’ayant rien d’une nova. Sous ses faux airs de Tintin, l’Angoumoisin n’a rien du petit vingtième de la classe. A 29 ans, son palmarès n’est certes pas aussi long que l’annuaire des marées mais il a de quoi intriguer. Ses titres de champion de France en Optimist ou en Moth Europe, champion du monde jeune en Tornado, ne sont qu’une mise en bouche. Alors qu’il termine ses études d’ingénieur à l’INSA de Lyon lui permettant de pratiquer toujours sa passion voile, il débarque dans le monde des solitaires en comète en 2007. Trois ans plus tard, il décroche le titre de champion de France de course au large après un triomphe sur le Bosphore.
Acharné de la belle ouvrage, voici donc François Gabart à la conquête de sa licorne : « En me retournant sur ma courte carrière, il est certain que me voir au départ du Vendée Globe est pour moi quelque chose d’extraordinaire. Un truc que j’avais imaginé mais peut-être pas arrivant aussi vite. A mon âge, c’est génial. Mais il y en a eu d’autres qui ont fait cette course aussi jeunes comme Alain Gautier ou Sébastien Josse ».
Et pour cette aventure, pourquoi ne pas se faire cornaquer par un éléphant solitaire, double vainqueur de l’épreuve, la personne ad hoc ? « A l’issue de ma belle saison en Figaro, Michel Desjoyeaux m’a proposé de faire la Barcelona avec lui sur Foncia. Avec la Macif qui est sur la voile depuis longtemps et qui avait le désir d’un projet Vendée Globe, nous nous sommes donc engagés. Soit nous achetions le bateau, soit nous en construisions un nouveau. Je suis donc allé naturellement chercher la présence de Mich. Elle ne m’a pas été imposée. J’ai eu la chance et l’opportunité de travailler avec lui et j’en suis ravi », relate-t-il.
Aventure
Le projet dévorant de la construction de son plan VPLP/Verdier mis à l’eau en août 2011 a demandé beaucoup d’engagement et de sacrifices. L’envie, la passion viscérale, le rêve, des concepts dépassant tout cartésien, le font avancer.
Tout est allé à une vitesse fulgurante. Peut-être un peu trop ? L’euphorie du moment, François Gabart sait la canaliser. Tout du moins feint-il d’y croire : « Je suis bien conscient que cela peut s’arrêter vite et que le bateau peut casser. J’ai vécu cette tristesse avec Mich sur la Barcelona. C’est très dur mais cela fait partie de notre métier. C’est ce qui rend cette course exceptionnelle. Je suis donc préparé à le revivre en souhaitant que cela n’arrive pas. Pour moi, c’est une aventure et c’est bien. Tout a été imaginé, prévu mais au final, il y a toujours des inconnues. Humainement, c’est très fort. Être premier c’est bien, mais je pense qu’on va chercher quelque chose de plus fort ».
Peur
Le jeu ne va pas être calme. Cela ne veut pas dire qu’il sera trop poussé : « C’est un juste équilibre. Est-ce que cela va être comme il y a quatre ans ? De toutes façons, cela sera différent. La peur est nécessaire car c’est là que tu sens le danger, qu’il ne faut pas aller plus loin. A toi de la contrôler pour aller dans le bon sens. Mon profil ne fait pas partie du profil moyen des vendéeglobistes de cette édition. Il y a énormément de recidivistes, avec un vainqueur et quelques podiums et donc de l’expérience. Je les connais bien tous. A la différence du circuit Figaro, on n’est pas là pour écraser les autres. C’est ce qui nous rapproche je pense. Et il y a beaucoup d’échanges. Terminer est un tel challenge qu’on se serre les coudes ».
De son œil de marin, François Gabart souhaite ramener de belles images qu’il narrera à son petit Hugo. Mais aucun doute, la contemplation ne sera pas tout le temps du voyage. Le jeune skipper peut sur ce 7e Vendée Globe faire un très beau numéro.