
Outre la victoire de François Gabart (MACIF), c’est sûrement le duel qui a opposé le Charentais à Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) qui restera dans les annales.
La bataille que se sont livrés Armel Le Cléac’h et François Gabart pendant la majeure partie de la course a donné à la circumnavigation sans escale et sans assistance des allures de régate planétaire. En effet, les deux hommes se sont échangés les politesses en tête de course à 20 reprises jusqu’au cap Horn. Le leadership a même parfois changé plusieurs fois de mains dans la même journée dans les mers du Sud, sur un parcours contraint par les portes des glaces laissant peu de place à la stratégie. Du jamais vu ! Au coude à coude dans le Pacifique le 29 décembre dernier, les deux marins ont même pu se filmer après plus de 15.000 milles de mer. « C’est hallucinant ! Ramené à un autre sport, c’est comme si Usain Bolt gagnait le 100 m d’1 mm », commentait alors Gabart. 3e à l’Equateur et au Cap de Bonne Espérance, alors que Le Cléach’ était en tête, Gabart a repris ensuite l’ascendant sur son rival, et franchi le premier le cap Leeuwin et le cap Horn, avec 1h50 et 1h15 d’avance sur le skipper de Banque Populaire aux deux points de passage. Si depuis le cap mythique, François Gabart a pris les commandes de la course et a réussi à faire le break, ce duel d’anthologie aura rythmé une majeure partie de la course. Et ce n’est pas la première fois qu’ils se livrent un tel duel sur l’eau. En 2010 déjà, François Gabart et Armel Le Cléac’h s’étaient disputés la victoire sur la Solitaire du Figaro. Le skipper de la baie de Morlaix l’avait emporté de justesse au terme d’une course haletante, avec 1 heure et 28 minutes d’avance sur François Gabart. Cette même année, le skipper de MACIF était sacré Champion de France de Course au Large. Cette fois, sur une autre course et un autre circuit, c’est le benjamin qui tire son épingle du jeu.
Les frères ennemis
Cette lutte fratricide n’est pas le fruit du hasard. Les deux ingénieurs de formation, résidents du Pôle Finistère Course au Large, sont en effet partis sur des bateaux quasi similaires, qui ont bénéficié de la marque de fabrique Desjoyeaux. Construits chez CDK, les deux plans VPLP/ Verdier, sont sortis du même moule. Banque Populaire n’est d’ailleurs autre que l’ex-Foncia du « Professeur ». « Il y a très peu de différence au niveau du plan de voilure, seulement au niveau des voiles. Les deux bateaux ont le même moteur mono-vérin, les mêmes safrans, le même système de production d’énergie », explique Michel Desjoyeaux. Niveau quille, celle de MACIF est en acier mécano-soudé, celle de Banque Populaire en carbone. « Je n’ai pas connaissance de toutes les modifications qui ont été apportées à Banque Populaire, poursuit Michel Desjoyeaux. Mais il y a quelques différences au niveau de la forme du pont, de la configuration de ballasts, du wynch d’écoute du cockpit, du sens de la colonne du moulin à café du cockpit, et des systèmes de transmission entre moteur et hélice. MACIF a une cloison étanche et une trentaine de kilos de mousse de flottabilité en plus de la jauge IMOCA. Les dérives ne sont pas identiques, l’une est signée Farr, l’autre VPLP ».