
La Coupe Louis Vuitton remportée lundi par les Néo-Zélandais oscille entre flops et spectacle magnifique. Bilan.
La victoire lundi soir des Néo-Zélandais dans la Coupe Louis Vuitton laisse comme un goût d'inachevé à San Francisco. Il y a quelques années encore, ce prélude qualificatif pour la Coupe de l'America aurait déchaîné les passions. Cette année, il n'en est rien. Difficile pourtant de dire que la Coupe est en déclin tant le spectacle sur l'eau a été magnifique et le niveau technique atteint par les équipages exceptionnel.
En fêtant son 30e anniversaire, la Coupe Louis Vuitton a pris un sacré coup de jeune. Finis les monocoques Class America et leurs spinnakers symétriques, place aux AC72, mastodontes des mers longs de 22 mètres et équipés d'ailes rigides de 40 mètres de hauteur, plus grandes qu'une aile de Boeing 747. Des monstres capables de voler au-dessus de l'eau trois fois plus vite que la vitesse du vent grâce à un système de foils qui sustente le poids des catamarans. Ces machines futuristes ont assuré un show de toute beauté en baie de San Francisco.
Le manque de concurrents, trois seulement, a sérieusement plombé l'intérêt sportif de cette Coupe Louis Vuitton 2013. Autrefois, pour la remporter, la voie à suivre s'apparentait à un véritable chemin de croix. En 2007, il fallait prouver sa supériorité contre 11 challengers. Pire, le chavirage du défi suédois Artemis entraînant la mort d'un de ses équipiers en mai avait encore réduit le suspense, seuls les Italiens (Luna Rossa) et les Néo-Zélandais (Emirates TNZ) étant prêts au lancement de la compétition. Nombre de régates se sont donc déroulées à un seul bateau jusqu'à ce que les Suédois reviennent sur l'eau mais sans jamais se montrer capables d'inquiéter les Italiens, eux-mêmes nettement dominés par les Néo-Zélandais.
La compétition avait d'ailleurs mal commencé en juillet avec un litige réglementaire entraînant le boycott de la première régate par Luna Rossa. Mécontent d'une mesure concernant les plans porteurs, le défi italien avait décidé de boycotter la course inaugurale de cette Coupe Louis Vuitton. Une querelle de techniciens bien dans la tradition de la Coupe mais qui a ajouté de la complexité dans une compétition n'ayant certainement pas besoin de cela pour tenter de séduire le public aux abonnés absents.
Le fossé gigantesque séparant le challenger néo-zélandais et le defender américain en termes financiers semble bien moins important en termes de technicité. Le suspense est donc entier. Oracle Team USA, financé par Larry Ellison, 5e fortune mondiale évaluée à 43 milliards de dollars, possède un budget de 200 millions de dollars loin devant celui de son concurrent néo-zélandais estimé à 84 millions. À la différence des Américains financés par un seul homme, les Kiwis sont financés à un tiers par l'État, un autre tiers par des sponsors classiques et le reste par des apports privés.
Sur l'eau, les All Blacks paraissent tout aussi impressionnants que leurs illustres collègues. Ils ont été les premiers à faire voler complètement un AC72 (certains croyaient même à un trucage photo) et ont réussi à atteindre la vitesse vertigineuse de 47,18 noeuds (87,38 km/h) le 24 août. De plus, ils n'ont jamais perdu de duel autre que sur abandon pour raison technique. Une domination sans partage qui va leur permettre de disputer les matchs suprêmes de la Coupe de l'America pour la cinquième fois en six éditions. Suite à leur troisième succès dans la Coupe Louis Vuitton (après 1995 et 2007), les Néo-Zélandais espèrent ne pas contredire le dicton «jamais deux sans trois» qui leur permettrait d'écrire une belle trilogie après avoir brandi la Coupe de l'America en 2000 et en 2003. «La Coupe Louis Vuitton n'était qu'une étape», prévenait lundi Dean Barker, le skipper kiwi, déjà totalement focalisé sur ce nouveau défi qui se jouera face aux Américains en baie de San Francisco du 7 au 21 septembre.