Vendée Globe : sortir de cette zone !
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Il n’y a normalement pas de glaces dérivantes au Nord de la Zone d’Exclusion Antarctique (ZEA) : la Direction de Course a ainsi confirmé par mail la position des icebergs repérés par CLS et de fait, c’est plutôt largement au Sud de l’île de Gough qu’il y aurait des dangers flottants. Alors pourquoi Sébastien Simon hier matin et Samantha Davies au soir ont-ils percuté un OFNI ? Qu’est-ce qui aurait provoqué des dégâts sur leur foil ?
Tout simplement parce qu’au Sud du cap de Bonne-Espérance, les courants marins brassent des milliards de tonnes d’eau de mer, chaudes venant de l’océan Indien en glissant le long des côtes du Mozambique, froides en remontant de l’Antarctique. Sans compter que nombre de cargos passent encore par cette voie maritime pour rallier les Indes… Et que l’état de la mer est souvent très chaotique avec le courant des Aiguilles qui lève des vagues parfois scélérates, emportant containers et autres matériels dans les flots.
Le jour se lève vers 4h00, heure française
En fin de printemps austral et naviguant autour du 40° Sud, les solitaires entrant dans l’océan Indien ont l’avantage de ne subir qu’une petite dizaine d’heures de nuit, avec en sus au moins une heure d’aube et une heure de crépuscule, et en plus, une lune plutôt coopérative en ce moment (la pleine lune a eu lieu lundi à 10h32 TU). Mais de là à intervenir sur une avarie alors que le vent souffle à plus de trente nœuds sur une mer plutôt agitée, il y a un pas. Un pas que Sébastien Simon (ARKEA-PAPREC), puis Samantha Davies (Initiatives Cœur) n’ont pas voulu franchir sous les assauts de vagues encore chaotiques…
Rejoindre la zone de hautes pressions qui s’est installée sous Port Elizabeth (Afrique du Sud), c’est aussi bénéficier d’un soleil plus radieux et d’une mer plus apaisée, du moins après avoir traversé le courant des Aiguilles : les deux solitaires devraient donc informer plus précisément la Direction de Course et leurs équipes techniques à terre de la situation de leur monocoque, dans la journée.
Sortir de cette zone de courants contraires
En attendant, Charlie Dalin (Apivia) s’échappe par le Nord-Est à près de vingt nœuds avant de repiquer vers le Sud-Est derrière le front froid qui le suit, mais qui devrait le dépasser ces heures prochaines. Son « dauphin » Louis Burton (Bureau Vallée 2), nettement plus au Sud, est déjà dans cette configuration, avec un vent de Sud-Ouest puissant et une mer forte : son objectif semble être de pointer son étrave vers le point le plus extrême de la ZEA, au Nord de l’archipel de Crozet, vers le 43° Sud. Avant de redescendre vers les Kerguelen.
Thomas Ruyant est aussi sorti des méandres du courant des Aiguilles qui a posé bien des tracas au groupe des poursuivants : par 37° Sud, le skipper de LinkedOut a préféré éviter le gros de cette tempête australe et profiter de son foil encore intact à tribord, avant d’empanner vers l’archipel des TAAF. La manœuvre devrait avoir lieu dans la matinée. Quant au groupe des poursuivants qui navigue entre le 39° Sud (Jean Le Cam) et le 41° Sud (Damien Seguin), il encaisse un flux de secteur Sud-Ouest sur une mer encore agitée mais la configuration devrait s’améliorer au fil des heures à venir.
Profiter d’une nouvelle dépression
Changement total de décor plus en arrière, où Stéphane Le Diraison (Time for Oceans) a rejoint Alan Roura (La Fabrique) et les deux solitaires devraient même se voir dans un flux de secteur Nord modéré sur une mer lisse. Ils longent la ZEA mais vont buter d’ici demain vendredi sur une bulle anticyclonique. Cela risque d’être aussi le cas pour Armel Tripon (L’Occitane en Provence) et Arnaud Boissières (La Mie Câline-Artisans Artipôle) qui « allument » grave à près de vingt nœuds, en avant d’un front qui a déjà rattrapé leurs poursuivants, le trio international Cousin-Costa-Hare…
Quant au dernier groupe, il peut enfin obliquer à gauche vers le cap de Bonne-Espérance avec Fabrice Amedeo (Newrest-Art & Fenêtres) en ouvreur le long d’une cellule anticyclonique qu’ils vont devoir longer pendant plusieurs jours avant d’atteindre l’océan Indien. Et ce n’est pas évident pour les six compagnons de route (Barrier-Giraud, Merron-Shiraishi-Huusela-Destremau) qui voient Jérémie Beyou (Charal) revenir dans leur sillage sur une même trajectoire courbe. Une parenthèse avant d’entrer dans le dur : les Quarantièmes Rugissants !