
Les débuts
Jacques-Yves Cousteau naît le 11 juin 1911 en Gironde, à Saint-André-de-Cubzac. Après avoir fait une classe préparatoire au collège Stanislas de Paris afin d’intégrer l’école navale, il intègre celle de Brest où il deviendra officier canonnier en 1933, à bord du Jeanne d’Arc. Bien qu’il soit sur les flots, c’est des airs dont rêve Cousteau, et plus particulièrement de devenir pilote. Hélas, un accident de la route survenu en 1935 le blesse au bras, et par la même occasion, lui coupe les ailes. Pour autant, c’est le début d’une grande histoire qui s’amorce suite à cet événement plutôt qu’un destin brisé.
La découverte des fonds marins
En convalescence à Toulon, il embarque sur le Condorcet où un certain Pierre Thailliez (un des pionniers, avec Cousteau, de la plongée sous-marine) lui prête ses lunettes sous-marines Fernez (ces lunettes sont considérées aujourd’hui comme précurseurs des lunettes de plongée actuelles !). En essayant le fameux instrument, révolutionnaire de son temps, Cousteau s’éprend instantanément de la vie marine. Il se trouve émerveillé devant la faune et la flore, pleines de couleur. En août 1937, Philippe Thailliez peaufine la formation de Cousteau en plongée sous-marine. En 1938, Thailliez rencontre un autre chasseur sous-marin, Frédéric Dumas. Avec Cousteau, ils formeront l’équipe subaquatique les « Mousquemers ». Tout comme le célèbre roman Les Trois Mousquetaires, l’équipe de Cousteau aura un quatrième acolyte, Léon Vêche, pro de la logistique.
La guerre et le développement de la plongée
Avec les habilitations de Cousteau, ce dernier n’échappa pas à la guerre et à son devoir de soldat. Il servit dans le service de renseignement et fut envoyé à Shanghai. En 1940, il est assigné au contre-espionnage à Marseille. Il participe notamment à l'Opération Vado contre l'Italie, et donc au bombardement de Gênes. Pour ces faits d’arme, Cousteau reçoit une croix de guerre "avec palme et deux citations". Il participe également à la Résistance, activité pour laquelle il est élevé au rang de chevalier de la légion d’honneur.
Toutefois, pendant ces années de guerre, Cousteau ne cesse d’explorer le monde subaquatique quand le devoir militaire se relâche (son commandant à Shanghai le lui permet dans la mesure du service à accomplir). A cette époque, les « Mousquemers » détournent l’usage des palmes de sauveteurs (de Pierre Corlieu), expérimentent les appareils de Hans Hass pour les prises de vue sous-marine, les masques de plongée de Fernez et autres appareils de respiration innovants. En 1943, Emile Gagnan (ingénieur), Cousteau et son équipe travaillent à la création d’un scaphandre autonome : une révolution pour l’exploration marine. Il est breveté et commercialisé en 1945 CG-1945 (initiales pour Cousteau et Gagnan, 45 pour l’année). Cousteau le surnomme "aqua-lung", littéralement "poumon aquatique". Ce scaphandre permet une autonomie par rapport à la pression, une arrivée d’air qui ne nécessite plus d’effort, la possibilité de débiter l’air en fonction du besoin du plongeur. Surtout, il permet au plongeur une liberté totale car le scaphandre n'est plus relié au bateau.
Simultanément à cette conception de 1943, Cousteau sort un documentaire, Par dix-huit mètres de fond, tourné en apnée par Thailliez et Dumas à l’aide d’un objectif conçu pour filmer en subaquatique par Léon Vêche. Les Mousquemers remportent ex-aequo le prix du meilleur documentaire devant les officiels du gouvernement de Vichy et le Kommandantur.
En 1945, il présentera le film Epaves (tourné à l’aide des prototypes de scaphandre autonome) devant le chef d’état-major de la Marine. Ce dernier demanda alors à Cousteau et son équipe de créer le Groupement de Recherche Sous-Marine de la Marine Nationale à Toulon, connu aujourd’hui sous le nom de CEPHISMER. Les Mousquemers entreprirent différentes missions, parmi lesquelles l’exploration sous-marine, de sous-marins et des essais technologiques. Point d’orgue de l’exploration : la plongée et la visite de l’épave romaine de Mahdia en Tunisie. L’équipe en fit un film, regroupant les technologies subaquatiques nouvelles et fonds marins inexplorés au cœur d’une épave. Le film reçoit pour titre sobre et efficace Carnet de plongée. Il sera présenté à Cannes.
La Calypso
En 1949, Cousteau est promu au grade de Capitaine de Corvette, lui permettant de fonder les Campagnes océanographiques Françaises en 1950. Il lui faut néanmoins un navire afin de réaliser ses divers documentaires. Un mécène niçois, en 1950, lui fait don du bateau La Calypso.
Au cours de leurs treize années d’expédition, Cousteau et son équipe réalisent différents films, dont "Aventures en Mer Rouge" qui est primé à la Biennale de Venise, ainsi que "Le Monde sans Soleil" qui est primé aux oscars pour le meilleur film documentaire en 1965.
Il devient directeur du Musée Océanographe de Monaco et il est admis à la National Academy of Science.
En 1975, Cousteau, avec sa nouvelle société Cousteau Society, découvrit l’épave du Britannic, petite sœur du Titanic. Il y plonge en 1976. Simultanément, il organise une expédition en Antarctique et réalise son dernier document long-métrage, Voyage au bout du monde.
Cependant, différents drames se produisent et fragilisent le commandant. En 1976, lors de l’expédition en Antarctique, le second de bord est tué par l’hélice de la queue d’un hélicoptère. Trois ans plus tard, au Portugal, c’est son fils Philippe qui meurt frappé par l’hélice d’un hydravion. Après cette année, Cousteau se retire de La Calypso pour différents projets, notamment la construction de parcs aquatiques et des engagements envers l’environnement.
Postérité
Jacques-Yves Cousteau est l’inventeur de la plongée moderne d’aujourd’hui, et ses engagements écologiques lui ont valu des récompenses tels que le Pahlava Prize du Programme des Nations Unies pour l’environnement, ainsi que le Palmarès Mondial des 500 (en 1977 puis en 1988). Il reçut également l’ordre du mérite maritime en 1980 pour son engagement envers la protection de la nature. Il est intronisé à l’Académie française en 1988.
Toutefois, bien que Cousteau s’engagea et milita pour l’environnement, cela n’était pas le cas à ses débuts. Il lui fut reproché de nombreuses choses lors de ses expéditions, notamment le dynamitage d’une barrière de coraux pour le tournage de ses films, ainsi que de chasser la faune marine pour les mêmes objectifs. Des incidents eurent lieu lors des explorations, dont l’un, narré par Gérard Mordillat, d’un bébé cachalot massacré sous les pales du navire, achevé d’une balle en pleine tête et dévoré par les requins. Il rajouta qu’un banc de poissons fut dynamité, et ce, pour le seul tournage du « Monde sous silence ». Enfin, si cela ne suffisait pas, les animaux auraient été manipulés pour obtenir de belles images.
De même, les engagements écologiques pouvaient sonnés faux lorsque l'on apprenait que certaines campagnes du Commandant étaient financées par… des industriels et autres compagnies pétrolières.
A sa décharge, à l’époque des explorations, l’intérêt était porté sur la découverte et l’excitation des nouvelles technologies pour capter les plus belles images. En 1956, les personnes s’émerveillaient devant le film qui fit tant de bruits à son visionnage quelques décennies plus tard. Et ce pour des raisons environnementalistes qui n’avaient plus rien à voir avec l’émerveillement d’antan. Cousteau se décrivait comme un découvreur, et non un homme de science. Et la conscience environnementale à l’époque de ses tournages, était plus faible qu'aujourd'hui.
Toutefois, au contact de Pierre Thailliez, sa vision évolua pour progressivement adopter la cause de la protection et de la qualité de vie de la faune marine. Engagement qui alla croissant à partir des années 70, aboutissant à certaines actions écologiques, notamment la « sanctuarisation » de l’Atlantique.
Jacques-Yves Cousteau s'éteint le 25 juin 1997 à Paris, et lègue l'ensemble des droits liés à l'usage de son nom et de son oeuvre à la Cousteau Society. Aujourd'hui, il reste l'une des personnalités ayant le plus marqué les Français.