Mission Océan : une pause et une transatlantique riche en enseignements
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Reprendre notre travail où nous l'avions laissé nous permet de renflouer les caisses et de ne pas se faire oublier dans le métier ! Pendant que Laura est partie à Rotterdam s'occuper d'un projet de conversion d'un bateau d'exploration de 92 mètres en yacht, je ramène un yacht de Floride en Italie d'une façon peu habituelle car il sera en marche arrière, dans l'antre d'un cargo porte-bateau. Je suis donc parti pour une traversée de l'Atlantique, pendant deux semaines.
Côté météo, nous avons eu de la chance. Contrairement à notre traversée du Cap Vert à la Martinique où nous sommes passés par tout type de temps et tout type de mer, là nous n'avons eu qu'une journée avec une houle à 1,50 m. Et malgré les 208 mètres de long du cargo, nous avons bien roulé. Ce type de bateau ne peut pas naviguer par plus de 5 mètres de houle car, pour accueillir les yachts à son bord, il est semi-submersible à coque plate.
Il s'agit d'un cargo de 2007 et donc équipé de façon moderne, avec des pods électriques et un propulseur latéral. Les moteurs sont des gros groupes électrogènes qui produisent 6 000 volts, et la puissance moteur est de 8700 kW chacun, soit 200 fois plus que notre bateau. Ces quelques chiffres donnent le tournis : 80 000 litres de carburant par jour, 20 000 litres par an d'huile moteur et 10 100 tonnes de capacité de chargement. L'équipage est composé de quatre officiers, dont le capitaine, une vingtaine de marins et onze mécaniciens. Une fois complet, le cargo transporte dix yachts de 35 à 48 m, et six bateaux de 10 à 20 m.
Gros transporteur et... gros pollueur
On entend beaucoup parler de la pollution générée par les cargos et les ferries, et le fait qu'ils tournent au fioul lourd avec un taux de souffre 1 000 fois supérieur à celui des automobiles, ce qui provoque bien sûr une très grosse quantité de CO2, entre autres, car le carburant n'est presque pas raffiné. Avec une cylindrée de 800 litres par moteur, un cargo représente la pollution d'un million de voitures. Et certains d'entre eux naviguent 17h/24 toute l'année.
L’autre point noir de ces gros bateaux est le rejet en mer de déchets. Heureusement, cela est mieux contrôlé grâce à l'IMO (International Maritime Organisation), une loi interdisant le rejet en mer de cannettes, bouteilles, papiers et autres objets est en vigueur depuis 2017, car auparavant seulement le rejet du plastique était interdit. Malheureusement, cela est loin d'être suffisant...
Bien que ce fut une très bonne expérience professionnelle, et une belle traversée, ce trajet en cargo m’a montré qu’il est indispensable de réduire notre consommation de biens fabriqués aux quatre coins du monde (des fois triplement emballés dans du plastique…) afin de réduire cette énorme pollution. A cette vitesse, bientôt les seules choses que nous pourrons pêcher lors d'une transatlantique seront les sargasses et les déchets.
Nous lançons donc, plus que jamais, un appel à tous les marins qui nous lisent : partagez avec nous vos solutions ou actions au quotidien pour réduire votre impact sur l’environnement et les océans sur notre page Facebook.