
Figaro Nautisme : On connait l’impressionnante carrière du basketteur que vous étiez, moins celle du marin que vous êtes aujourd’hui : d’où vient votre passion pour le bateau ?
Boris Diaw : Cette passion est venue assez tard. J’ai vraiment découvert le bateau et la mer lorsque je me suis installé sur le bassin d’Arcachon en 2007. Avant je n’étais pas vraiment loin, puisque j’habitais à Bordeaux. Mais c’est à partir de ce déménagement que j’ai commencé à profiter pleinement de tout ce que la mer pouvait offrir. Je me suis acheté un semi-rigide pour pouvoir faire des sorties à la journée sur le bassin. Très vite, j’ai voulu être sur l’eau le plus souvent possible, pour pêcher ou aller me poser sur un banc de sable avec des amis... Des plaisirs simples. En parallèle, j’ai commencé à faire de plus en plus de plongée sous-marine. Et lorsque j’ai commencé à réfléchir à ce que je ferais après ma carrière de basketteur, je me suis dis que ce que j’aimais vraiment c’était voyager, découvrir de nouveaux endroits, faire des rencontres... Et quel meilleur moyen de locomotion peut-on trouver pour réaliser ce rêve qu’un bateau ? En navigant, vous pouvez accéder à tous les plus beaux endroits du monde et même les plus inaccessibles. Et quand on a la chance, comme moi, d’avoir du temps, on peut en profiter plusieurs mois par an.
J’ai découvert le catamaran en faisant une sortie plongée sur un bateau parfaitement équipé en Martinique, le bateau s’appelait Aliotis. Ensuite, j’ai fait plusieurs croisières sur des Lagoon 450, en Méditerranée de Hyères jusqu’en Corse puis aux Antilles et j’ai réalisé que c’était la plateforme idéale pour ma nouvelle vie. Après ces expériences, j’ai compris que je pouvais avoir un bateau qui soit un véritable centre de plongée itinérant.
Je me suis alors lancé dans la recherche du bateau idéal pour mon programme. J’ai exploré un peu chez tous les constructeurs. Etant de Bordeaux, je me suis naturellement rapproché de Lagoon qui, à l’époque, proposait comme plus grand catamaran le 620. En discutant avec le chantier, j’ai appris qu’ils étaient en pleine conception d’un bateau plus grand qui allait devenir le Seventy 7, un catamaran de 77 pieds. Pour mon projet de tour du monde avec un bon équipement de plongée, c’était exactement ce que je recherchais. J’ai suivi le projet depuis quasiment le début et c’est comme ça que je suis devenu l’un des premiers propriétaires à me lancer avec Lagoon.
Figaro Nautisme : Vous êtes le propriétaire d’un catamaran de près de 24 mètres : techniquement, est-ce un bateau compliqué à mener ?
Boris Diaw : C’est un très grand bateau et je n’avais quasiment jamais navigué à la voile... J’ai donc dû me former. Sur un bateau de cette taille, il est essentiel d’avoir un équipage compétent, pour des questions de sécurité, bien sûr, mais aussi pour que le bateau soit bien entretenu. J’ai commencé par du cabotage en Méditerranée avant de faire la transat et de beaucoup naviguer aux Antilles. Pour devenir parfaitement autonome, j’ai suivi une formation poussée et passé un diplôme de Yachtmaster.
Aujourd’hui, je suis aux Tuamotu, à bord de mon bateau et, pour la première fois, j’en suis le skipper. Le capitaine titulaire est en vacances et je me suis dit que c’était l’occasion de me lancer. Pour l’instant, tout se passe parfaitement bien, grâce à l’expérience acquise ces dernières années à bord. En navigation, le Seventy 7 est relativement facile à manœuvrer, même si tout est plus grand et qu’il faut bien réfléchir avant d’agir. Ici, aux Tuamotu, la plus grande difficulté à gérer est le passage dans les passes et les courants. Ca va, je m’en sors [Rires !]. Pour le reste, c’est un bateau sur lequel il faut savoir anticiper, surtout dans les manœuvres d’accostage qui sont toujours un peu stressantes pour moi. Au quotidien, la gestion d’une grande unité n’est pas non plus très simple : à bord, on trouve beaucoup d’hydraulique, d’électronique, de plomberie, etc. Un grand bateau demande donc un entretien régulier et du suivi au jour le jour. Mais cela se passe super bien et je me sens vraiment « à la maison » quand je suis sur le bateau.
Figaro Nautisme : Après 7 années de navigation autour du monde, quel est le moment qui vous a plus marqué ?
Boris Diaw : J’ai vécu d’innombrables moments forts à bord. En Méditerranée, mes coups de cœur restent les îles Kornati et les Éoliennes. Stromboli également : mouiller au pied du volcan, quelle expérience ! Parmi les souvenirs marquants, je citerais aussi ma première transatlantique : un passage qui restera gravé dans ma mémoire.
Les Antilles, bien sûr, avec tellement de mouillages fabuleux. Mais je pense qu’un des moments les plus incroyables est le passage de Panama, où j’ai découvert une ingénierie extraordinaire derrière, une organisation millimétrée : un grand souvenir.
Enfin, ma plus grande traversée à ce jour, la transpacifique : de Panama à Tahiti sans pouvoir nous arrêter aux Marquises pour cause de Covid. 35 jours de mer finalement assez tranquilles comparés au retour de Nouvelle-Zélande vers la Polynésie en passant par les Australes. Là, nous avons eu une mer de face vraiment dure avec du gros temps. Une navigation compliquée et pas forcément très confortable.
Mais globalement, ces années à bord ont été formidables. Je n’en garde que du positif.
Figaro Nautisme : Avec l’expérience acquise sur ce catamaran, comment imaginez-vous le prochain ?
Boris Diaw : Je suis vraiment satisfait de mon bateau. Il a, je pense, la bonne taille si on souhaite naviguer avec un équipage. Si je devais partir sans équipage, je prendrais forcément un bateau plus petit. Pour le reste, je ne vois pas de changements majeurs, mais plus des petites évolutions. Par exemple, les progrès récents en autonomie, sur les nouvelles batteries et les panneaux solaires sont très intéressants, surtout si cela permet d’éviter de faire tourner trop souvent les générateurs.
Mon bateau est très équipé pour la plongée : mais ce qui manque toujours, c’est une annexe un peu plus grande [Rires !]. Aujourd’hui, je suis limité par la largeur du bateau et par le poids de l’annexe.
Figaro Nautisme : Boris Diaw navigateur en chiffres ?
Boris Diaw : Je passe 6 mois par an à bord depuis 7 ans : j’ai donc passé largement plus de 3 années effectives à bord. Je suis parti de France et nous sommes aujourd’hui en Polynésie. Avec de nombreux cabotages et d’allers-retours à chaque fois. Je n’ai pas calculé le nombre de milles - je l’avais fait pour passer mon Yachtmaster mais je n’ai pas actualisé depuis - mais cela doit en faire pas mal. L’objectif est de boucler le tour du monde. La prochaine grande étape sera l’Australie en passant par les îles Cook, Tonga, Fidji et Nouvelle-Calédonie, puis la Papouasie, la Micronésie et - forcément pour un passionné de plongée - par l’Indonésie, le Sri Lanka et les Maldives. On verra après l’Indien pour le retour si je passe par la Mer Rouge ou par le Sud. J’ai encore le temps d’y penser !
Figaro Nautisme : Votre dernière navigation et la prochaine ?
Boris Diaw : Je suis actuellement à bord donc... la dernière navigation était tout à l’heure et la prochaine demain ! Je suis au mouillage sur l’île de Kauehi et je repars demain matin vers Fakarava. La prochaine « grande » navigation est prévue en avril prochain pour partir de Polynésie vers l’Australie. Un joli programme !
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