Gel de l'abattement pour vétusté des navires de plaisance : explications
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Quels sont les navires redevables et exonérés de la DAFN ?
Rappelons qu’est redevable de cet impôt tout propriétaire d’un navire de plaisance de sept mètres et plus, ou d'une longueur de coque inférieure à sept mètres doté d'une motorisation égale ou supérieure à 22 CV, ayant obtenu la délivrance par le service des douanes d'un acte de francisation. Depuis le 1er janvier 2013, les propriétaires de véhicules nautiques à moteur dont la puissance réelle des moteurs est supérieure ou égale à 90 kW doivent également acquitter de cette taxe.
A noter qu’un droit de passeport est perçu dans les mêmes conditions que le DAFN pour les navires de plaisance immatriculés à l'étranger et appartenant à des personnes ayant leur résidence principale ou leur siège social en France.
Sont en revanche exonérés du droit de francisation et de navigation les embarcations appartenant à des écoles de sports nautiques, les embarcations mues principalement par l'énergie humaine ou encore les bateaux classés au titre des monuments historiques ou ayant reçu le label bateau d'intérêt patrimonial.
Les évolutions depuis le 1er janvier 2019
Par un courrier adressé début mars 2019 à l’Union Nationale des Associations de Navigateurs, la Direction des Douanes précise les éléments suivants :
Les navires francisés, ou sous passeport, qui ne bénéficiaient d’aucun abattement en 2018 en raison de leur âge, ne pourront jamais en obtenir ;
Les navires francisés, ou sous passeport, qui bénéficiaient d’un abattement en 2018 en raison de leur âge, garderont toujours le même taux.
Autrement dit l'abattement est supprimé depuis le 1er janvier 2019 pour les propriétaires de navires qui n'en bénéficiaient pas encore. A l'inverse, les navires qui bénéficient de l’abattement continueront à en bénéficier au même taux.
Les navires qui sont francisés ou mis sous passeport postérieurement à compter du 1er janvier 2019 :
Ne bénéficieront d’aucun abattement si leur âge au 1er janvier 2019 est inférieur ou égal à 11 ans ;
Bénéficieront d’un abattement de 33% si leur âge au 1er janvier 2019 est supérieur à 11 ans et égal ou inférieur à 21 ans ;
Bénéficieront d’un abattement de 55% si leur âge au 1er janvier 2019 est supérieur à 21 ans et égal ou inférieur à 26 ans ;
Bénéficieront d’un abattement de 80% si leur âge au 1er janvier 2019 est supérieur à 26 ans.
Seuls sont donc concernés les navires qui n’étaient ni francisés ni mis sous passeport avant le 1er janvier 2019, et sous réserve que la date de construction du navire lui ouvre droit à un taux d’abattement.
Exemples
• Un navire étranger non assujetti au droit de passeport construit en mars 2000 qui serait francisé en 2019, aura 18 ans au 1er janvier 2019 et bénéficiera donc d’un abattement de 33%. Les années suivantes, ce navire bénéficiera toujours du taux de 33%.
• Un navire étranger non assujetti au droit de passeport construit en mars 1997 qui sera francisé en 2020, aura 18 ans au 1er janvier 2019 et bénéficiera donc d’un abattement de 33%. Les années suivantes, ce navire bénéficiera toujours du taux de 33%
Cette mesure peut être appréhendée sous une triple lecture :
- D'une part, le principe de l’abattement du DAFN pour vétusté dont bénéficient les navires de plaisance ou de sport incite les propriétaires à conserver des bateaux anciens, plus polluants que les nouveaux bateaux mis sur le marché. Au regard des enjeux de développement durable, cette disposition est d’autant plus paradoxale que plus le navire est ancien, plus l’abattement est important. L'objectif semble ainsi d'inciter les propriétaires à changer de navire vieillissant voire de s'inscrire dans une démarche de recyclage de leur navire en fin de vie.
- D'autre part, cette mesure impactera essentiellement les bateaux neufs mis aujourd'hui sur le marché et fortement motorisé avec certainement un objectif de dissuasion au regard de l'impact environnemental et le cas échéant ralentir le marché du renouvellement.
- Enfin cette mesure se justifie également du fait d’une forte dégressivité de la taxe, les entrées en flotte ne suffisant plus à compenser les sorties d’un nombre important de navires du dispositif par l’effet mécanique des abattements vétusté.
Comment concilier l'objectif de sortie de flotte des navires vieillissants au risque de ralentissement des ventes de navires neufs ?
Par ailleurs, à la différence de nombreux dispositifs fiscaux, ces abattements obéissent à un barème qui ne connaît pas d’actualisation automatique et le vieillissement de la flotte de plaisance conduit à une baisse de l’assiette de collecte du DAFN.
Enfin, les mesures de mise en place d'une fiscalité verte en lien avec le financement du conservatoire du littoral et des rivages lacustres, de la responsabilité élargie du producteur pour les bateaux de plaisance (filière REP à hauteur de 2% puis de 5%) et le financement de la société nationale de sauvetage en mer (SNSM), assises pour partie sur la mobilisation de cette ressource fiscale rendait nécessaire de faire contribuer au moins en partie les navires les plus anciens à ce dispositif.
Une taxe coûteuse pour la Cour des Comptes
Les 22 directions régionales des douanes assurent la gestion du droit annuel de francisation et de navigation (DAFN). Le produit du DAFN était de 45.3 M€ en 2016 sachant que le coût de gestion de cette taxe représente 19.62%, ce qui est particulièrement élevé.
Or, la Cour des comptes a soulevé l'inadaptation de cette organisation puisque la gestion du DAFN ne nécessite aucun besoin de proximité, pas plus d’ailleurs que la francisation des navires et la conservation des hypothèques maritimes, assurée dans les recettes régionales des douanes.
Dans son dernier rapport publié le 27 février 2019 concernant les taxes à faible rendement : https://www.ccomptes.fr/system/files/2019-02/20190227-refere-S2018-3303-taxes-faible-rendement.pdf, la Cour signale le coût de collecte très élevé du droit annuel de francisation et de navigation et du droit de passeport des navires de plaisance, qui atteint près de 20 % du rendement de ces deux impôts dont le produit annuel est d’environ 45 M€.
La mise en place, trop longtemps repoussée, d’un portail dématérialisé commun à la douane et à l’administration des affaires maritimes permettrait de simplifier la double procédure de l’immatriculation et de la francisation des navires, unique en Europe et incompréhensible pour l’usager. Elle contribuerait à moderniser ces deux taxes, dont le produit est tendanciellement en diminution, et d’en réduire le coût de gestion, aujourd’hui disproportionné.
Pour plus de précisions consultez également les sites suivants :
Direction générale des douanes et droits indirects
Union Nationale des Associations de Navigateurs